Lectures en cours 2017-2019

Je viens de terminer la lecture de cette délicieuse anthologie :



Sans surprise, j'ai passé un très bon moment.
"Sans surprises", car c'est l'un des thèmes qui m'ont toujours fasciné et je ne me lasse jamais de lire de bons récits sur les voyages de le temps. Et ça tombe bien, car le concept est décliné ici de toutes les façons possibles et imaginables.
Car s'il est question ici de voyage entre les époques, on y parle aussi de troublants paradoxes, de regards particuliers sur certaines époques (ou leur avenir) ou de visions temporelles azimutées. On y croisera ainsi des textes poétiques narrant les folies à venir du progrès (magnifique Reflets, de Milora), des thrillers SF au rythme prenant, des réflexions sur la perception désynchronisée du temps ou leurs improbables conséquences sur une famille haute en couleurs dans le surprenant Famille Décomposée de Herr Mad Dokotor (qui gagne haut la palme le titre de récit le plus déglingué du recueil, mais je vous rassure : dans ma bouche, c'est un joli compliment). Tout le spectre du thème y passe : courses-poursuites, réalités alternatives, visions cosmiques délirantes et autres truculents pastiches sur fonds de légionnaires romains !
Pour compléter le tout, nous avons droit à de superbes illustrations, toutes différentes pour chaque texte et qui donne une plus-value négligeable à l'objet -- dont la superbe couverture de Cham Wahl n'est pas des moindres.
Pour être honnête, j'ai adoré la quasi totalité des textes ici réunis, le reste n'étant qu'affaire de sensibilités. Mais si je dois mentionner quelques coups de cœur, néanmoins :
-- C'est de l'Argent, de Sylvain Lamur : Probablement mon texte favori du recueil, qui s'approprie le thème de façon très originale en faisant du temps une denrée brute et commercialisable, qui amènera quelques désagréments au protagoniste principal. De la très belle ouvrage, portée par une plume au rythme impeccable !
-- Le Corps et la Main, de Geoff "MacReady" Barbieux : Une plongée fascinante dans un univers proto-lovecraftien aux ramures cosmiques qui épate autant par le fond de son propos que par les proportions gargantuesques de la chose. Pour réhausser le tout, l'illustration qui l'accompagne est une petite merveille, parfaitement dans le ton.
-- Reflets, de Milora : Déjà mentionné plus haut, mais ce texte m'a vraiment marqué, autant par la sensibilité de sa plume que pour la réflexion qu'il amène. L'approche plutôt poétique marque des points et contribue à la variété de l'ensemble : j'ai beaucoup aimé.
-- La Sensationnelle et Tristement Méconnue Invention de l'Ingénieur Ducycle, de Delphine Schmitz : Là encore, une petite merveille d'inventivité (c'est le cas de le dire ! ), portée par une plume burlesque et entraînante nous évoquant par son biais les effluves de cette folle époque. Jules Vernes et ses amis ne sont pas loin. Dans tous les cas, j'achète !
Bien sûr, tous les autres mériteraient d'être salués en mentionnés, que ce soit pour la qualité de leur prose ou de leur propos, mais le manque de temps (oui, encore lui) et de place me limiteront à résumer que j'ai globalement passé un excellent moment à découvrir tous ces récits.
Et d'un point de vue plus personnel et subjectif, j'ai été plus qu'honoré d'ouvrir cette anthologie, tout comme d'avoir pu bénéficier de cette magnifique illustration de Maniak, qui cerne parfaitement l'esprit du texte. Un honneur, vraiment. Merci pour cet incroyable travail !

Souvenirs du Futur est donc une lecture hautement recommandable pour tous les amateurs de SF ouverts d'esprit, mais pas que ! Lu et triplement approuvé, en ce qui me concerne.
Et bravo encore aux cinglés du bulbe des Artistes Fous Associés, nous offrant là un ouvrage d'excellente qualité, dans ses choix éditoriaux comme dans la finition : chapeau bas, messieurs !

Un jour, je me le procurerai certainement. Quand ? Ça c'est une autre histoire. Et puis, le temps, c'est relatif. Si ça se trouve, je l'ai déjà commandé et lu, mais je ne le sais pas encore.

Le temps peut être notre pire ennemi, mais tu verras (ou a déjà vu ?) qu'il peut être ici un très agréable compagnon

Celui-là me tente depuis le début ! J'attends ma paie et je me l'offre !

N'hésite pas Raven, c'est d'la bonne !

J'ai lu ce livre il y a quelques mois, en version e-book, les Artistes Fous cultivaient aussi la folie de publier gratuitement la version numérique de leurs ouvrages.

J'en ai gardé une belle impression. J'ignorais que Tak se cachait derrière l'auteur de la première nouvelle, je me vais de ce pas y porter un regard neuf :-)

Eh oui, Trantor : aussi étrange que cela paraisse, Tak n'est pas mon nom de naissance

Et pareil ça m'a étonné aussi quand j'ai appris qu'ils partageaient leurs versions numériques gratis, mais d'une autre façon ça peut aussi leur faire une pub sympa (perso, je m'étais procuré par ce biais leur antho' "Folies", très sympa elle aussi ! ).

Cela faisait longtemps que je voulais laisser un petit mot sur l'excellent Vers le Pays Rouge de Justine Niogret. Voilà, c'est maintenant chose faite :



Anton Vandenberg disait en préambule à propos de ces textes qu'ils sont « viscéraux, indomptables et inclassables » et je ne peux qu'abonder en son sens. Il y a quelque chose de vrai et de brut qui s'imprime en nous lorsque nous les lisons et nous reste longtemps en mémoire. Plus loin, le même Anton mentionnait « une œuvre qui se trouverait quelque part entre le cri primal et le silence de fin du monde » et encore une fois, je ne pourrais lui donner tort (ce qui est bien avec les préfaces comme celle-ci, c'est qu'on a juste besoin de citer et de dire « tout pareil » sans avoir à se fouler... ).
Mais bien sûr, ce ne serait pas rendre justice à l'auteure et je vais m'empresser de dire pourquoi.

La première grande qualité de Justine Niogret est de ne pas ancrer ses récits dans une époque trop définie, de façon à laisser toute latitude à l'imaginaire pour s'y développer et d'y créer sa propre histoire (ce que, en tant que lecteur, je trouve plus qu'appréciable). L'anthologiste parlait de Fantasy « symbolique », pour ma part je parlerais plus de Merveilleux au sens très large, avec une part de mysticisme et de drame intime, mais finalement peu importent les genres et les étiquettes, tant les récits proposés nous emportent, que ce soit aux côtés d'une fée aquatique lasse du mensonge des hommes ou d'une jeune fille au bout du monde dialoguant avec son dragon de compagnie. La variété des cadres, des personnages et des lieux est également à mentionner ; il y a toujours quelque chose à retirer de ces récits, dans l'inventivité, l'intelligence du discours ou le ton choisi.
On pourra reprocher à ces textes de ne pas respirer la gaieté, certes, mais plutôt que d'y voir d'impénétrables chapes obscures, je préfère y trouver une démarche cathartique. Les affres de l'humanité y sont montrées sans complaisance, mais derrière la veulerie, l'égoïsme, la cruauté, la lâcheté ordinaire, on sent surtout une volonté de dépasser ces misérables sentiments pour y recomposer une toile multiforme, fédératrice et intimiste à la fois.
C'est du moins ainsi que je l'ai ressenti.

Quant à la plume, comme mentionné plus haut, elle dégage quelque de chose de brut qui s'imprime durablement en nous. Les mots de Justine nous prennent à la gorge et nous clouent à la page, sans chercher à faire dans le « beau » (même s'ils amènent naturellement l'émotion sans forcer) ou à user d'artifices éculés derrière lesquels se cacher. Ici, tout est juste, file droit au but et on passe souvent d'un extrême à l'autre, tout en restant scotché par l'épure parfaitement maîtrisée de la plume. Parfois, une petite touche d'humour délicieusement noir ou complètement barré – comme dans La Hamarsheimt, en Presque Pareil – vient également rehausser une palette stylistique déjà riche et surprenante.
D'habitude, j'aime bien faire le menu détaillé des textes que j'ai aimé, de ceux qui m'ont le moins plu ou de mes quelques coups de cœur, mais pour ce recueil je serais bien en peine de dégager un texte de l'autre, tant j'ai adoré tout ce que j'ai lu, en trouvant à chaque fois une pertinence aussi bien dans le propos que la forme. Pour moi, tout se valait niveau qualité et il m'est souvent arrivé de fermer le livre pour réfléchir quelques minutes à ce que je venais de lire, avant (d'essayer) de reprendre ma lecture, avec l'impression de m'être fait secouer dans une lessive géante remplie de shrapnel. Sauf que parfois le shrapnel s'amalgamait en grosses masses ouateuses pour venir m'étreindre chaleureusement... Et me rappeler ma condition d'humain faillible, au sein duquel perdure néanmoins une étincelle d'amour originel et d'éternité.
Difficile de poser des mots sur les sentiments qui nous traversent après une telle lecture, mais il est certain que la Dame Niogret possède un talent rare et d'autant plus précieux...
Ceci dit, si je dois tout de même noter un ou deux textes qui m'ont laissé une empreinte plus vivace que d'autres (question de sensibilité perso), je pourrais citer Je t'humilierai pour n'avoir plus à t'humilier, quelque part entre Dark-Fantasy et loi du Talion, Derrière cet Horizon, simplement magistral et dont le propos sur les tourments de l'amour perdu (ou de la possessivité) complètent à merveille celui de la perte de l'être chéri (dans une configuration ceci dit diamétralement opposée) au menu du final Le Souvenir de la Langue, qui m'a laissé quelque part entre les larmes et un grand vide intérieur dont je ne sais toujours quoi penser...
Et je m'arrêterais là pour mon bref passage en revue, auquel cas je serais capable de citer chaque texte en y trouvant pour chacun des grilles de lectures passionnantes et multiples (et je suis certain d'ailleurs d'en avoir raté un paquet).

Toujours est-il que j'ai passé un moment très fort en lisant ce recueil – d'où certainement ce petit laps de temps (j'ai fini cette lecture à la fin du mois d’août dernier) pour le digérer et tenter de trouver les mots justes à poser sur ceux de l'auteure. J'ai en tous cas vogué vers ce pays rouge et bien que le voyage ait été tumultueux et que je n'en sois pas ressorti complètement indemne, j'en garderais des souvenirs/impressions indélébiles...
Que rajouter de plus ? Merci Justine, tout simplement.

J'ai profité des promos de fin d'année de Rivière Blanche pour me procurer ce recueil, entre autres.
Ton avis me galvanise pour la lecture !
On verra ça plus tard, mais c'est déjà intéressant !

N'hésite pas Cancer, dès que tu pourras le lire, c'est du très bon. Et perso, ça me donne envie d'aller lire ses romans (elle a déjà une jolie biblio), mais vu l'état de ma PAL, ça devra attendre un peu...
Allez zou, prochaine lecture : Extinctions, d'une certaine demoiselle fort populaire par ici (effectivement, y'a du lourd chez Rivière Blanche).

Tout juste fini Hel de Masterton. Et j'avoue être légèrement déçu.

Le début est très bon - et étonnamment soft pour du Masterton, mais ça a l'avantage de changer de ses autres textes.
La révélation sur l'origine de la menace est superbe aussi (et pour avoir écrit un texte sur une idée similaire - L'ombre - je ne peux que m'incliner devant Hel, qui a fait d'un même concept quelque chose de bien plus puissant).

Mais toute la partie finale (les 100/200 dernières pages en gros) m'a peu intéressé. Trop "fantaisiste" à mon goût. Il y a quelques années, j'aurais sans doute adoré, mais avec le temps, je remarque que mes goûts se détournent de plus en plus de "l'imaginaire extrême" et me ramènent de plus en plus vers de l'horreur et du fantastique plus "subtil".

Bref, je crois que quelqu'un m'avait dit que Hel est le meilleur des Masterton. Peut-être que j'ai eu des attentes démesurées du coup, m'attendant à une claque du niveau de Rituel de chair (son meilleur à mes yeux, malgré ses 20 dernières pages qui ruinent tout).
Ca reste une bonne découverte, cela dit, mais pas assez bonne pour que je conserve le livre chez moi.