PETITES HISTOIRES D'OUTRE-CRYPTE : 5 - Lila (V.1 ~ 3800 SEC)
Page 1 sur 1
PETITES HISTOIRES D'OUTRE-CRYPTE : 5 - Lila (V.1 ~ 3800 SEC)
— Moi j'aime bien quand la prof de géo galère ! Vous savez pourquoi ? Parce que madame Turle lutte !
Grégoire. Le cancre de la classe. Il y en avait toujours un ou deux dans une classe. Les profs s'arrachaient déjà les cheveux avec lui et pourtant, la rentrée remontait à la semaine dernière. Passé maître dans l'impertinence et la moquerie, il avait choisi dans la classe sa prochaine victime. Il s'en donnait à cœur joie pour lâcher les vannes les plus blessantes. Mais tant que les autres s'en amusaient… « Pour un lilas, tu pues vachement ».« Les mouches sont pas censées se posaient sur toi ». Et enfin, au bout du deuxième jour de classe seulement : « T'as plus une tronche de pissenlit en fait ! ». Les premiers mots dans le carnet de liaison du sale gamin ne furent d'aucun secours à la petite Lila, fille de jardinière. Ceci expliquait cela.
Ses parents insistaient sur le fait qu'il lui fallait passer outre ses railleries stupides, mais à son âge, chaque « Pissenlit » la meurtrissait un peu plus chaque jour. Plutôt du genre à fuir les autres, lasse de jouer les têtes de turc, elle s'était repliée dans les livres. Le dernier qu'elle avait d'ailleurs emporté au collège avait fini dans une flaque. Et grâce à qui ?
16 h 30. Grégoire avait séché le cours de mathématiques avec son trio pour traîner dans le parc, inondé ça et là par les hallebardes tombées en début d'après-midi. La bande s'entraînait au tir sur les canards et les cygnes du bassin, s'arrêtaient après l'intervention de quelques passants interloqués, puis recommençaient. Lila aurait pu contourner leur lieu de rassemblement mais aurait rallongé son chemin d'une bonne vingtaine de minutes. Elle avait mal aux pieds et envie d'aller aux toilettes. Hélas, malgré l'exploitation des angles morts et de la densité des buissons, son tortionnaire la repéra de loin et s'empressa de la rejoindre. Une bouffée d'angoisse flamba l'acné de Lila qui accéléra, à l'instar de son palpitant.
— Eh les gars ! V'là not' cher Pissenlit ! Et j'ai l'impression qu'il a soif ! nasilla-t-il, riant déjà de l'acte malicieux qu'il s'apprêtait à commettre.
Il balaya de la tranche de sa chaussure une flaque d'eau entre elle et lui. La vague formée doucha Lila de la tête aux pieds, la recouvrant au passage de boue et de feuilles de frênes. Elle fondit en larmes et prit la fuite, sous les éclats de rires de son bourreau. Adeptes de l'acharnement gratuit, les trois complices la poursuivirent. Ils auraient pu la rattraper facilement, mais sa peur les nourrissaient. Lila traversa hors des passages cloutés dans l'espoir de trouver refuge dans la pharmacie un peu plus loin.
Sans qu'elle s'y attendît, un double choc, à quelques secondes d'intervalle, la fit jeter un coup d’œil par-dessus son épaule. Une voiture venait de s'encastrer dans l'un des nombreux gros arbres qui bordaient l'avenue. La bande s'était arrêtée au milieu de la route. Grégoire avait disparu. Lila suivit la direction des regards des deux garçons tétanisés et retrouva la trace du cador de onze ans. Une jambe et un bras sortait du dessous de l'épave, immobiles.
Elle rebroussa chemin et s'en approcha, ravie. Visage violacé et congestionné, le vieil homme au volant semblait mort. La fillette n'avait pas les connaissances médicales nécessaires pour diagnostiquer un infarctus du myocarde mais elle était suffisamment habituée à ce genre d'accident, fortuit en apparence, pour identifier la cause sous-jacente. Elle regarda la route. Elle le cherchait. C'était leur petit secret. T'en as mis du temps, pensa-t-elle. Sur le trajet emprunté par le chauffeur décédé, elle distingua enfin la nébulosité blanchâtre de son grand-frère qui lui faisait signe de la main. Elle lui envoya un sourire complice en guise de remerciement. Il l'avait sauvé. Une fois de plus.
Grégoire. Le cancre de la classe. Il y en avait toujours un ou deux dans une classe. Les profs s'arrachaient déjà les cheveux avec lui et pourtant, la rentrée remontait à la semaine dernière. Passé maître dans l'impertinence et la moquerie, il avait choisi dans la classe sa prochaine victime. Il s'en donnait à cœur joie pour lâcher les vannes les plus blessantes. Mais tant que les autres s'en amusaient… « Pour un lilas, tu pues vachement ».« Les mouches sont pas censées se posaient sur toi ». Et enfin, au bout du deuxième jour de classe seulement : « T'as plus une tronche de pissenlit en fait ! ». Les premiers mots dans le carnet de liaison du sale gamin ne furent d'aucun secours à la petite Lila, fille de jardinière. Ceci expliquait cela.
Ses parents insistaient sur le fait qu'il lui fallait passer outre ses railleries stupides, mais à son âge, chaque « Pissenlit » la meurtrissait un peu plus chaque jour. Plutôt du genre à fuir les autres, lasse de jouer les têtes de turc, elle s'était repliée dans les livres. Le dernier qu'elle avait d'ailleurs emporté au collège avait fini dans une flaque. Et grâce à qui ?
16 h 30. Grégoire avait séché le cours de mathématiques avec son trio pour traîner dans le parc, inondé ça et là par les hallebardes tombées en début d'après-midi. La bande s'entraînait au tir sur les canards et les cygnes du bassin, s'arrêtaient après l'intervention de quelques passants interloqués, puis recommençaient. Lila aurait pu contourner leur lieu de rassemblement mais aurait rallongé son chemin d'une bonne vingtaine de minutes. Elle avait mal aux pieds et envie d'aller aux toilettes. Hélas, malgré l'exploitation des angles morts et de la densité des buissons, son tortionnaire la repéra de loin et s'empressa de la rejoindre. Une bouffée d'angoisse flamba l'acné de Lila qui accéléra, à l'instar de son palpitant.
— Eh les gars ! V'là not' cher Pissenlit ! Et j'ai l'impression qu'il a soif ! nasilla-t-il, riant déjà de l'acte malicieux qu'il s'apprêtait à commettre.
Il balaya de la tranche de sa chaussure une flaque d'eau entre elle et lui. La vague formée doucha Lila de la tête aux pieds, la recouvrant au passage de boue et de feuilles de frênes. Elle fondit en larmes et prit la fuite, sous les éclats de rires de son bourreau. Adeptes de l'acharnement gratuit, les trois complices la poursuivirent. Ils auraient pu la rattraper facilement, mais sa peur les nourrissaient. Lila traversa hors des passages cloutés dans l'espoir de trouver refuge dans la pharmacie un peu plus loin.
Sans qu'elle s'y attendît, un double choc, à quelques secondes d'intervalle, la fit jeter un coup d’œil par-dessus son épaule. Une voiture venait de s'encastrer dans l'un des nombreux gros arbres qui bordaient l'avenue. La bande s'était arrêtée au milieu de la route. Grégoire avait disparu. Lila suivit la direction des regards des deux garçons tétanisés et retrouva la trace du cador de onze ans. Une jambe et un bras sortait du dessous de l'épave, immobiles.
Elle rebroussa chemin et s'en approcha, ravie. Visage violacé et congestionné, le vieil homme au volant semblait mort. La fillette n'avait pas les connaissances médicales nécessaires pour diagnostiquer un infarctus du myocarde mais elle était suffisamment habituée à ce genre d'accident, fortuit en apparence, pour identifier la cause sous-jacente. Elle regarda la route. Elle le cherchait. C'était leur petit secret. T'en as mis du temps, pensa-t-elle. Sur le trajet emprunté par le chauffeur décédé, elle distingua enfin la nébulosité blanchâtre de son grand-frère qui lui faisait signe de la main. Elle lui envoya un sourire complice en guise de remerciement. Il l'avait sauvé. Une fois de plus.
Sujets similaires
» PETITES HISTOIRES D'OUTRE-CRYPTE : 2 - Nénette (V.1 ~ 4250 SEC)
» PETITES HISTOIRES D'OUTRE-CRYPTE : 3 - L'hôtel (V.2 ~ 4170 SEC)
» PETITES HISTOIRES D'OUTRE-CRYPTE : 7 - Duels (V.1 ~ 3650 SEC)
» PETITES HISTOIRES D'OUTRE-CRYPTE : 1 - L'anniversaire de Charlie (V.2 ~ 4260 SEC)
» PETITES HISTOIRES D'OUTRE-CRYPTE : 6 - Madame Fernand (V.1 ~ 3900 SEC)
» PETITES HISTOIRES D'OUTRE-CRYPTE : 3 - L'hôtel (V.2 ~ 4170 SEC)
» PETITES HISTOIRES D'OUTRE-CRYPTE : 7 - Duels (V.1 ~ 3650 SEC)
» PETITES HISTOIRES D'OUTRE-CRYPTE : 1 - L'anniversaire de Charlie (V.2 ~ 4260 SEC)
» PETITES HISTOIRES D'OUTRE-CRYPTE : 6 - Madame Fernand (V.1 ~ 3900 SEC)
Page 1 sur 1
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum