Peter Straub
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Paladin
SILENCE
Tak
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Peter Straub
Chose promise, chose due !
Plutôt que débuter par l'habituelle note biographique (wikipédia est là pour ça : https://fr.wikipedia.org/wiki/Peter_Straub), je vais plutôt parler de la façon dont j'ai découvert cet auteur.
À l'époque sans réel revenu fixe, je passais pas mal de temps au Cash Converters du coin avec mon frangin, à la recherche du film (aaah la bonne époque des vieilles VHS d'occas' à l'image pourrie !) , du jeu vidéo, du bouquin ou du CD providentiel à moins de 2€... Et c'est donc là que je suis tombé, quelque part au début des années 2000, sur le fameux Ghost Story, que je connaissais de réputation et qui revenait régulièrement dans les listes de romans fantastique à lire, aux côtés des best-sellers de Stephen King, Clive Barker (que j'ai découvert à la même époque et de la même façon, dans ces sublimes éditions Pocket Terreur, pour lesquelles je garde une affection particulière) ou autres Graham Masterton.
Et pour la petite note perso, si j'ai eu un peu de mal à rentrer dedans au début, j'ai vite révisé mon avis sur ce roman, au point même de m'être inspiré d'un de ses personnages dans l'un de mes textes de jeunesse (quelque part aux alentours de 2004-2005, oui ça remonte !).
Je vous propose donc, pour commencer, une petite chro' dudit roman que j'ai écrite il y a une paire d'années... D'autres suivront, même si elles ne seront pas nombreuses : Straub est un auteur que j'adore mais ses romans sont exigeants et se "méritent", ce qui explique qu'il s'est passé beaucoup de temps entre la lecture de chacun d'entre eux.
Mais j'y reviendrais sûrement, il y a encore quelques petites pépites à découvrir dans sa biblio' et je prendrais tout le temps nécessaire pour les découvrir comme il se doit
Mais pour en revenir à nos moutons :
Dans la sinistre petite ville de Milburn, quatre vieux amis passent leurs soirées à se raconter de terrifiantes histoires de fantômes. Mais, depuis la disparition de l'un des membres du club dans de fort étranges circonstances, aucun d'eux n'échappe aux terribles visions qui hantent leurs nuits. Entre créatures mythiques et esprits vengeurs tout droit sortis de leurs récits d'horreur, envoûtés par la même femme aux mille visages, ils découvrent bientôt que la pire des monstruosités est en réalité issue de leur propre passé.
Quand je l'ai lu, cela faisait des années que j'en avais entendu parler et que je le voyais encensé ci ou là, en me demandant si c'était mérité. Et à première vue, j'ai été un peu déçu en me plongeant dedans. Bien que le scénario à multiples ramifications soit très bien conçu, il n'y a en effet pas erreur sur la marchandise : c'est bien une histoire de fantômes qui nous est contée là, avec tous ses codes et ses poncifs (même si certains sont modernisés).
Et puis, avec un peu de recul, j'ai appris à apprécier la plume alambiquée de Straub, aussi bien à l'aise dans la description quasi-naturaliste d'un décor extérieur que pour poser une atmosphère lourde, glaciale et plutôt malsaine. Il faut aussi saluer la qualité des personnages brossés par l'auteur, avec leurs bons et leurs mauvais cotés, leurs contradictions et leurs subtilités qui apparaissent au fil des dialogues ou derrière un geste apparemment anodin. Il y a une grande finesse psychologique dans les romans de Peter Straub et leurs protagonistes tirent réellement ceux-ci par le haut.
L'autre grande qualité de cet écrivain, c'est sa faculté à créer des scénariis complexes, denses et construits comme des puzzle dont on peine longtemps à remettre en place toutes les pièces. Cela vient aussi de sa propension à mélanger ses deux genres de prédilection : le polar et le fantastique. Du premier, il garde ainsi les histoires biscornues et cette atmosphère noire, souvent traversée par l'aura sordide du crime. Le second se chargera, lui, d'ajouter une couche supplémentaire d'angoisse, de mystère et d'horreur à l'ensemble, indispensable dans une histoire de fantômes comme celle-ci.
Pour autant Straub ne se prive pas pour ajouter des éléments "autres" que les fantômes mentionnés et la construction de l'histoire, entre fausses pistes et retours en arrière, permet de laisser le mystère intact jusqu'aux derniers instants. Si bien que même si dans l'ensemble, l'histoire n'est pas des plus originales (si ce n'est dans sa dernière partie, qui réserve toutefois quelques jolies surprises), la façon dont Straub nous la narre la rend tout à fait passionnante. Je me souviendrais longtemps de cette ambiance de conte d'hiver noire et envoûtante, parfaitement captée et rendue par l'auteur...
Alors, peut-être que par certains aspects Ghost Story a peut-être un peu vieilli (années soixante-dix obligent !) et que la hauteur de sa réputation aura pu décevoir certains à sa lecture, mais avec le recul, et pour peu de s'immerger complètement dans l'intrigue, ce roman est une petite merveille qui saura se mériter aux plus exigeants.
Un excellent roman, donc, dont je garde un très bon souvenir.
Plutôt que débuter par l'habituelle note biographique (wikipédia est là pour ça : https://fr.wikipedia.org/wiki/Peter_Straub), je vais plutôt parler de la façon dont j'ai découvert cet auteur.
À l'époque sans réel revenu fixe, je passais pas mal de temps au Cash Converters du coin avec mon frangin, à la recherche du film (aaah la bonne époque des vieilles VHS d'occas' à l'image pourrie !) , du jeu vidéo, du bouquin ou du CD providentiel à moins de 2€... Et c'est donc là que je suis tombé, quelque part au début des années 2000, sur le fameux Ghost Story, que je connaissais de réputation et qui revenait régulièrement dans les listes de romans fantastique à lire, aux côtés des best-sellers de Stephen King, Clive Barker (que j'ai découvert à la même époque et de la même façon, dans ces sublimes éditions Pocket Terreur, pour lesquelles je garde une affection particulière) ou autres Graham Masterton.
Et pour la petite note perso, si j'ai eu un peu de mal à rentrer dedans au début, j'ai vite révisé mon avis sur ce roman, au point même de m'être inspiré d'un de ses personnages dans l'un de mes textes de jeunesse (quelque part aux alentours de 2004-2005, oui ça remonte !).
Je vous propose donc, pour commencer, une petite chro' dudit roman que j'ai écrite il y a une paire d'années... D'autres suivront, même si elles ne seront pas nombreuses : Straub est un auteur que j'adore mais ses romans sont exigeants et se "méritent", ce qui explique qu'il s'est passé beaucoup de temps entre la lecture de chacun d'entre eux.
Mais j'y reviendrais sûrement, il y a encore quelques petites pépites à découvrir dans sa biblio' et je prendrais tout le temps nécessaire pour les découvrir comme il se doit
Mais pour en revenir à nos moutons :
Dans la sinistre petite ville de Milburn, quatre vieux amis passent leurs soirées à se raconter de terrifiantes histoires de fantômes. Mais, depuis la disparition de l'un des membres du club dans de fort étranges circonstances, aucun d'eux n'échappe aux terribles visions qui hantent leurs nuits. Entre créatures mythiques et esprits vengeurs tout droit sortis de leurs récits d'horreur, envoûtés par la même femme aux mille visages, ils découvrent bientôt que la pire des monstruosités est en réalité issue de leur propre passé.
Quand je l'ai lu, cela faisait des années que j'en avais entendu parler et que je le voyais encensé ci ou là, en me demandant si c'était mérité. Et à première vue, j'ai été un peu déçu en me plongeant dedans. Bien que le scénario à multiples ramifications soit très bien conçu, il n'y a en effet pas erreur sur la marchandise : c'est bien une histoire de fantômes qui nous est contée là, avec tous ses codes et ses poncifs (même si certains sont modernisés).
Et puis, avec un peu de recul, j'ai appris à apprécier la plume alambiquée de Straub, aussi bien à l'aise dans la description quasi-naturaliste d'un décor extérieur que pour poser une atmosphère lourde, glaciale et plutôt malsaine. Il faut aussi saluer la qualité des personnages brossés par l'auteur, avec leurs bons et leurs mauvais cotés, leurs contradictions et leurs subtilités qui apparaissent au fil des dialogues ou derrière un geste apparemment anodin. Il y a une grande finesse psychologique dans les romans de Peter Straub et leurs protagonistes tirent réellement ceux-ci par le haut.
L'autre grande qualité de cet écrivain, c'est sa faculté à créer des scénariis complexes, denses et construits comme des puzzle dont on peine longtemps à remettre en place toutes les pièces. Cela vient aussi de sa propension à mélanger ses deux genres de prédilection : le polar et le fantastique. Du premier, il garde ainsi les histoires biscornues et cette atmosphère noire, souvent traversée par l'aura sordide du crime. Le second se chargera, lui, d'ajouter une couche supplémentaire d'angoisse, de mystère et d'horreur à l'ensemble, indispensable dans une histoire de fantômes comme celle-ci.
Pour autant Straub ne se prive pas pour ajouter des éléments "autres" que les fantômes mentionnés et la construction de l'histoire, entre fausses pistes et retours en arrière, permet de laisser le mystère intact jusqu'aux derniers instants. Si bien que même si dans l'ensemble, l'histoire n'est pas des plus originales (si ce n'est dans sa dernière partie, qui réserve toutefois quelques jolies surprises), la façon dont Straub nous la narre la rend tout à fait passionnante. Je me souviendrais longtemps de cette ambiance de conte d'hiver noire et envoûtante, parfaitement captée et rendue par l'auteur...
Alors, peut-être que par certains aspects Ghost Story a peut-être un peu vieilli (années soixante-dix obligent !) et que la hauteur de sa réputation aura pu décevoir certains à sa lecture, mais avec le recul, et pour peu de s'immerger complètement dans l'intrigue, ce roman est une petite merveille qui saura se mériter aux plus exigeants.
Un excellent roman, donc, dont je garde un très bon souvenir.
Tak- Mélomane des Ondes Noires
Disciple des Livres de Sang - Messages : 6299
Date d'inscription : 01/12/2012
Age : 42
Localisation : Briançon, Hautes-Alpes
Re: Peter Straub
Merci pour ta chronique Tak ! Comme expliqué, je l'ai dans ma bibliothèque mais je ne l'ai pas encore attaqué tellement j'ai peur d'être déçu. Ton article donne vraiment envie !
SILENCE- — — — Moine copiste — — — Disciple des Lois du Silence
- Messages : 4040
Date d'inscription : 02/01/2012
Age : 50
Re: Peter Straub
Tout ça me donne fortement envie de relire Ghost Story.
Il y a un film qui en a été tiré Le Fantôme de Milburn, de John Irvin en 1981. Pas mauvais mais très résumé et de plus dans le film, les quatre messieurs âgés ont tué une femme qui revient les hanter. Dans le roman, on apprend que ce n'était pas une vraie femme, mais une créature surnaturelle.
Il y a un film qui en a été tiré Le Fantôme de Milburn, de John Irvin en 1981. Pas mauvais mais très résumé et de plus dans le film, les quatre messieurs âgés ont tué une femme qui revient les hanter. Dans le roman, on apprend que ce n'était pas une vraie femme, mais une créature surnaturelle.
Re: Peter Straub
Pas vu ce film, mais n'en ayant jamais entendu parler, je me doute qu'on ne doive pas s'attendre à un chef d'œuvre...
Silence : ben dans ce cas, attends encore un peu deux ou 3 mois, histoire de bien te mettre dans l'ambiance, -10 à l'extérieur, un bon fauteuil au coin du feu avec un verre de scotch à portée de main et là je pense que tu seras dans les meilleures conditions pour apprécier ce roman (ah oui et du jazz en fond sonore aussi, en option).
Silence : ben dans ce cas, attends encore un peu deux ou 3 mois, histoire de bien te mettre dans l'ambiance, -10 à l'extérieur, un bon fauteuil au coin du feu avec un verre de scotch à portée de main et là je pense que tu seras dans les meilleures conditions pour apprécier ce roman (ah oui et du jazz en fond sonore aussi, en option).
Tak- Mélomane des Ondes Noires
Disciple des Livres de Sang - Messages : 6299
Date d'inscription : 01/12/2012
Age : 42
Localisation : Briançon, Hautes-Alpes
Re: Peter Straub
Je me demande si ce roman ne faisait pas partie du lot que je t'ai envoyé quand j'ai déménagé en 2008 ? Je ne l'avais pas gardé en tout cas, je l'ai retrouvé il y a quelques années sur un vide-greniers pas loin de chez moi.
Re: Peter Straub
Ah, possible que je me sois emmêlé les pinceaux avec Mr. X, que j'avais acheté dans les mêmes conditions (dans cette fameuse boutique d'occasion franchisée) à peu près à la même époque, ma mémoire me jouant souvent des tours lol dans le lot que tu m'avais envoyé, je me souviens surtout des Livres de Sang de Barker qui me manquaient (peut-être Cabale également) et de quelques antho' d'époque regorgeant de petites merveilles oubliées...
Et maintenant que j'y réfléchis, tu dois sûrement avoir raison car ce fameux personnage féminin dont je m'étais inspiré a bien plus sa place dans Mr. X que dans Ghost Story! Aïe aïe aïe, à peine 40 piges et je suis déjà à moitié alzheimer, pauvre de moi
Et maintenant que j'y réfléchis, tu dois sûrement avoir raison car ce fameux personnage féminin dont je m'étais inspiré a bien plus sa place dans Mr. X que dans Ghost Story! Aïe aïe aïe, à peine 40 piges et je suis déjà à moitié alzheimer, pauvre de moi
Tak- Mélomane des Ondes Noires
Disciple des Livres de Sang - Messages : 6299
Date d'inscription : 01/12/2012
Age : 42
Localisation : Briançon, Hautes-Alpes
Re: Peter Straub
Je ne me souviens plus, en fait, de ce que je t’avais envoyé, je sais seulement que je n’avais plus Ghost Story en arrivant à Marseille. Donc il fait en tout cas partie des livres dont je me suis défait avant le déménagement (il y en a eu pas mal)
Re: Peter Straub
Je laisse cette chro' quasi telle quelle, que j'avais écrite à l'époque sur un forum de lecture où je traînais pas mal mes guêtres. Cette fois-ci, ce sera donc au tour du très intéressant Shadowland ! (et juste relire ces lignes, ça me donne envie d'y replonger...).
En arrivant à Shadowland, le Royaume des Ombres, pour être initiés à la magie, Tom et Del pensaient apprendre quelques tours de cartes ou le numéro du lapin ou de la colombe. Mais Collins, le Magicien, a d'autres desseins : Tom est doté de pouvoirs exceptionnels et c'est lui qui sera son successeur, le nouveau Roi des Ombres. Tom se sent soudain envahi d'une terreur irraisonnée lorsque ses visions hideuses de bébés embrochés sur des piques ou de garçons crucifiés se révèlent plus que de simples hallucinations. Et si Collins n'était pas le brave homme qu'il prétend ? Si, pour être magicien, il fallait exploiter ses fantasmes les plus profonds, apprendre la haine ?
Après avoir découvert Le Dragon Flottant (que je recommande au passage), voici donc ma dernière lecture Straubienne en date. Là où ce dernier se montrait plutôt efficace et prenant, étonnement abordable, Shadowland est un roman tout en faux rythme et en atmosphère, plutôt lent au démarrage. L'ambiance y est plus onirique qu'horrifique, mais dans le fond et les thématiques abordées, on reconnaît bien son auteur.
Bien que le thème de la magie n'ait rien de très original en matière de littérature fantastique, j'ai beaucoup apprécié la façon dont il est ici abordé : non pas comme simple artifice narratif ou vecteur de quelconque quota spectaculaire, mais comme un réel moteur de l'intrigue et des personnages. Source de savoir confinant au Divin pour certains, pouvoir servant à écraser et à soumettre pour les autres, chacun y trouve sa propre motivation, mais au final c'est par et pour la magie qu'existent tous ces personnages. Qu'ils vivent, meurent, se querellent ou se déchirent...
D'ailleurs, une réflexion que je me suis faite au passage : sur un thème un peu similaire, j'ai pas mal pensé à The Damnation Game de Clive Barker (ou encore mieux, son film Le Maître des Illusions), même si l’œuvre de P. Straub est sortie quelques années auparavant. Même mise en scène dans l'irruption du surnaturel, même thématique autour de l'illusion et de ses artifices – ou celles de la réalité. Comme chez S.King, où j'ai retrouvé à posteriori pas mal de thématiques Straubiennes, il semblerait que ses romans aient influencé plus de monde qu'on pourrait ne le penser de prime abord.
Pour revenir au roman, outre la thématique centrale de l'illusion, il y a aussi Shadowland (une propriété perdue au milieu de nulle part) et ses environs, véritable personnage à part entière et par qui arrive le mystère aussi bien que l'effroi. On sentirait presque respirer la bâtisse et laisser planer son ombre mortifère sur le destin des deux adolescents. Une sombre féerie s'échappe de ces décors et de ce coté-là, j'ai vraiment été transporté. Au final, cadre, écriture soignée et personnages ambivalents : tout cela concorde pour donner au roman une réelle atmosphère, onirique, irréelle et oppressante à souhait.
Un autre point aussi que j'ai adoré, c'est le recours régulier de l'écrivain aux contes et à leurs codes. Non seulement l'imagerie du conte cadre parfaitement dans un récit initiatique sur la magie, mais elle lui donne également un poids supplémentaire par sa force allégorique. C'est ainsi par images et associations que marche l'intrigue, par jeux de miroirs – comme souvent chez Straub – et renvois à d'autres situations, d'autres histoires qu'avance ce récit. Notamment par ce récit de deux adolescents perdus dans une autre histoire, dont les mécanismes ont été analysés et décortiqués plus tôt dans l'année, en cours de littérature.
Ce sera aussi l'occasion pour l'auteur d'y glisser quelques digressions et même
Bref, que du plaisir !
Seul petit bémol : qu'on en sache pas un peu plus sur le parcours de Tom Flanagan après son été à Shadowland et deux-trois points du scénario que j'aurais pas rechigné à voir plus développés
Ceci dit, j'aurais peut-être pris plus de plaisir à lire le roman d'une traite, en quelques jours, comme je l'avais fait pour Le Dragon Flottant. La prose de Straub et la construction de ses histoires peuvent se révéler confuses si l'on ne se trouve pas dans l'état d'esprit adéquat ou que le sommeil vient nous embrouiller les idées, par exemple ! J'ai parfois eu du mal à reprendre le livre et à me rappeler ce qui s'était déroulé d'un chapitre à l'autre – mais c'est aussi, je pense, un effet voulu par l'auteur, qui cherche à plonger le lecteur dans le même état de confusion et de perte de repères que ses personnages. Le temps, le pourquoi, le où et le quand deviennent à leur tour des illusions et il faut plonger dans l'intrigue sans chercher de réponses toutes faites. Il n'y en aura pas vraiment, certes, mais en revanche on est souvent bluffés et transportés, dans ce monde de la magie, de l'ombre et de la haine, intemporel, flippant et néanmoins plus que séduisant à sa façon.
Bref, j'ai encore une fois pris beaucoup de plaisir à lire, même si ma lecture a été très morcelée et chaotique. Du très bon Peter Straub, qui devient l'air de rien l'un de mes écrivains favoris du genre, aux cotés de S. King et C. Barker. Encore une très jolie proposition, donc !
En arrivant à Shadowland, le Royaume des Ombres, pour être initiés à la magie, Tom et Del pensaient apprendre quelques tours de cartes ou le numéro du lapin ou de la colombe. Mais Collins, le Magicien, a d'autres desseins : Tom est doté de pouvoirs exceptionnels et c'est lui qui sera son successeur, le nouveau Roi des Ombres. Tom se sent soudain envahi d'une terreur irraisonnée lorsque ses visions hideuses de bébés embrochés sur des piques ou de garçons crucifiés se révèlent plus que de simples hallucinations. Et si Collins n'était pas le brave homme qu'il prétend ? Si, pour être magicien, il fallait exploiter ses fantasmes les plus profonds, apprendre la haine ?
Après avoir découvert Le Dragon Flottant (que je recommande au passage), voici donc ma dernière lecture Straubienne en date. Là où ce dernier se montrait plutôt efficace et prenant, étonnement abordable, Shadowland est un roman tout en faux rythme et en atmosphère, plutôt lent au démarrage. L'ambiance y est plus onirique qu'horrifique, mais dans le fond et les thématiques abordées, on reconnaît bien son auteur.
Bien que le thème de la magie n'ait rien de très original en matière de littérature fantastique, j'ai beaucoup apprécié la façon dont il est ici abordé : non pas comme simple artifice narratif ou vecteur de quelconque quota spectaculaire, mais comme un réel moteur de l'intrigue et des personnages. Source de savoir confinant au Divin pour certains, pouvoir servant à écraser et à soumettre pour les autres, chacun y trouve sa propre motivation, mais au final c'est par et pour la magie qu'existent tous ces personnages. Qu'ils vivent, meurent, se querellent ou se déchirent...
D'ailleurs, une réflexion que je me suis faite au passage : sur un thème un peu similaire, j'ai pas mal pensé à The Damnation Game de Clive Barker (ou encore mieux, son film Le Maître des Illusions), même si l’œuvre de P. Straub est sortie quelques années auparavant. Même mise en scène dans l'irruption du surnaturel, même thématique autour de l'illusion et de ses artifices – ou celles de la réalité. Comme chez S.King, où j'ai retrouvé à posteriori pas mal de thématiques Straubiennes, il semblerait que ses romans aient influencé plus de monde qu'on pourrait ne le penser de prime abord.
Pour revenir au roman, outre la thématique centrale de l'illusion, il y a aussi Shadowland (une propriété perdue au milieu de nulle part) et ses environs, véritable personnage à part entière et par qui arrive le mystère aussi bien que l'effroi. On sentirait presque respirer la bâtisse et laisser planer son ombre mortifère sur le destin des deux adolescents. Une sombre féerie s'échappe de ces décors et de ce coté-là, j'ai vraiment été transporté. Au final, cadre, écriture soignée et personnages ambivalents : tout cela concorde pour donner au roman une réelle atmosphère, onirique, irréelle et oppressante à souhait.
Un autre point aussi que j'ai adoré, c'est le recours régulier de l'écrivain aux contes et à leurs codes. Non seulement l'imagerie du conte cadre parfaitement dans un récit initiatique sur la magie, mais elle lui donne également un poids supplémentaire par sa force allégorique. C'est ainsi par images et associations que marche l'intrigue, par jeux de miroirs – comme souvent chez Straub – et renvois à d'autres situations, d'autres histoires qu'avance ce récit. Notamment par ce récit de deux adolescents perdus dans une autre histoire, dont les mécanismes ont été analysés et décortiqués plus tôt dans l'année, en cours de littérature.
Ce sera aussi l'occasion pour l'auteur d'y glisser quelques digressions et même
- Spoiler:
l'apparition des frères Grimm en personne ! Joli clin d’œil pour un roman se jouant des conventions et des réalités.
Bref, que du plaisir !
Seul petit bémol : qu'on en sache pas un peu plus sur le parcours de Tom Flanagan après son été à Shadowland et deux-trois points du scénario que j'aurais pas rechigné à voir plus développés
- Spoiler:
comme tout ce qui a attrait au coté occulte de celui-ci, ainsi que les nombreuses mentions au « Roi des Ombres » et tout ce qui s'y rapporte...
Ceci dit, j'aurais peut-être pris plus de plaisir à lire le roman d'une traite, en quelques jours, comme je l'avais fait pour Le Dragon Flottant. La prose de Straub et la construction de ses histoires peuvent se révéler confuses si l'on ne se trouve pas dans l'état d'esprit adéquat ou que le sommeil vient nous embrouiller les idées, par exemple ! J'ai parfois eu du mal à reprendre le livre et à me rappeler ce qui s'était déroulé d'un chapitre à l'autre – mais c'est aussi, je pense, un effet voulu par l'auteur, qui cherche à plonger le lecteur dans le même état de confusion et de perte de repères que ses personnages. Le temps, le pourquoi, le où et le quand deviennent à leur tour des illusions et il faut plonger dans l'intrigue sans chercher de réponses toutes faites. Il n'y en aura pas vraiment, certes, mais en revanche on est souvent bluffés et transportés, dans ce monde de la magie, de l'ombre et de la haine, intemporel, flippant et néanmoins plus que séduisant à sa façon.
Bref, j'ai encore une fois pris beaucoup de plaisir à lire, même si ma lecture a été très morcelée et chaotique. Du très bon Peter Straub, qui devient l'air de rien l'un de mes écrivains favoris du genre, aux cotés de S. King et C. Barker. Encore une très jolie proposition, donc !
Tak- Mélomane des Ondes Noires
Disciple des Livres de Sang - Messages : 6299
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Re: Peter Straub
Ah ben super Pala', comme ça tu pourra nous donner un 2e avis (après relecture, donc) et peut-être donner à certains aussi l'envie de s'y mettre !
Et moi, tout ça me donne envie de compléter ma collection. Mais il faudrait déjà pour ça que je fasse fondre une partie de ma PAL, qui de toute évidence ne compte pas se laisser faire aussi facilement
Et moi, tout ça me donne envie de compléter ma collection. Mais il faudrait déjà pour ça que je fasse fondre une partie de ma PAL, qui de toute évidence ne compte pas se laisser faire aussi facilement
Tak- Mélomane des Ondes Noires
Disciple des Livres de Sang - Messages : 6299
Date d'inscription : 01/12/2012
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Re: Peter Straub
Reste à savoir si j'arriverai à tenir les 637 pages !
J'aimerais aussi relire Le Talisman, co-écrit avec S.King et pourquoi pas sa suite Territoires.
J'ai aussi de lui, mais jamais lu, son recueil de nouvelles Magie de la terreur et son thriller Le Club de l'enfer qui fait quand même 763 pages !
J'aimerais aussi relire Le Talisman, co-écrit avec S.King et pourquoi pas sa suite Territoires.
J'ai aussi de lui, mais jamais lu, son recueil de nouvelles Magie de la terreur et son thriller Le Club de l'enfer qui fait quand même 763 pages !
Re: Peter Straub
Paladin a écrit:Ah oui, j'ai aussi, sur ma Kindle, son thriller Messe Noire en numérique !
Celui-là avait l'air chouette, je l'avais mis direct sur ma liste d'achats amazon, lors de sa sortie...
Pour Le Club de l'Enfer, en effet un joli petit pavé, mais en ce qui me concerne le nombre de pages n'est pas un élément dissuasif. Si je suis pris dans l'histoire, peu importe qu'il en fasse 200 ou 800, tant que l'intrigue est prenante et la plume de qualité (à l'image de nombre de romans de collègue S.King, qui dépassent souvent le format "standard" habituel, mais qui une fois dedans, ne veulent plus nous lâcher... d'ailleurs, un de mes romans préférés de l'auteur du Maine est Les Tommyknockers et je crois qu'il dépasse allègrement les 900 pages, ce qui ne m'a pas empêché de le dévorer à plusieurs reprises ! et je parle même pas de Ca, Le Fléau ou le cycle de la Tour Sombre).
Tak- Mélomane des Ondes Noires
Disciple des Livres de Sang - Messages : 6299
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Re: Peter Straub
Stephen King est un des rares auteurs dont j'ai pu ingurgiter des 1000 pages comme dans Ca ou Le Fléau, sans doute grâce à son style si vivant qui nous entraîne même quand il ne se passe pas grand chose. Mais pour les autres, il arrive un moment, passé les 300 pages, où si je ne sui spas vraiment pris dans l'histoire, je décroche ! C'est ce qui fait que j'ai beaucoup de mal à lire Clive Barker, dont pourtant j'adore les univers, mais il fait de trop gros pavés : j'ai tenté deux fois de lire L'Empire des Devins, c'est un excellent roman, mais à chaque fois j'ai calé au bout d'un moment. D'ailleurs ça m'emmerde, ça me me fait passer à côté de trucs sans doute super, mais je finis par m'ennuyer quand un roman dure trop, sauf exception par exemple pour King (J'ai aussi réussi à lire deux fois Le Seigneur des Anneaux, mais en faisant des pauses pour lire d'autres choses entre temps).
Re: Peter Straub
Dommage pour Le Royaume des Devins (pas "L'Empire" lol tu me le recopieras 150 fois au tableau, pour la peine) : c'est un véritable perle dans son genre, mais dans ce cas, je n'oserais même pas te parler d'Imajica et de ses près de 1500 pages
Bon, ceci étant dit, c'est de Peter Straub dont il est censé être question, ici ! Si ça continue, je vais devoir modérer le modérateur, hum (on aura tout vu! ).
Bon, ceci étant dit, c'est de Peter Straub dont il est censé être question, ici ! Si ça continue, je vais devoir modérer le modérateur, hum (on aura tout vu! ).
Tak- Mélomane des Ondes Noires
Disciple des Livres de Sang - Messages : 6299
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