Re: La poupée de Noël

par **Mnémosyne** Jeu 25 Aoû 2022 - 18:57

Commentaire de Raven :

Bonjour Blahom,

Une très bonne participation, comme toujours. Un style qui me plaît toujours autant, qui fleure bon le "classique", pas dans un sens critique mais plutôt dans le sens où je me sens en terrain agréablement familier, comme quand on ouvre un bouquin d'un auteur qu'on aime et dont on apprécie l'univers.
L'ambiance est tout de suite palpable, on est dedans, le vieux bizarre toqué de poupées, la collection tout aussi bizarre, la mère qui peine à joindre les deux bouts, ce sentiment de culpabilité de plus en plus prégnant et le malaise ambiant. De ce point de vue, c'est tout bon.
Mes petites critiques seront donc assez basiques : tout d'abord, le côté un peu prévisible de la chute qu'on devine dès la mention du grain de beauté. On ne sait pas encore comment ça va se produire mais on suppose que cette marque servira plus tard à différencier la fille de la poupée. Il y a aussi le "ailleurs, elles mouraient". Sur le coup, je me suis dit que tu avais sûrement voulu dire "ailleurs, elles mourraient", mais te connaissant il était évident qu'il ne s'agissait pas d'une coquille, ce qui m'a poussée malgré moi à anticiper la fin (du moins, j'ai compris que c'est une façon de "sauver" les fillettes qui, du point de vue du vieux, sont en train de "mourir", dans le cas de Tina négligée par sa mère qui ne peut lui apporter tout ce dont elle est censée avoir besoin) (quoique, après réflexion, l'emploi du conditionnel serait juste aussi puisque la poupée meurt). J'ai aussi moyennement accroché à la répétition "Mia éprouva un tel sentiment de mésaise" / "Mia éprouvait un âpre sentiment de malaise.", mais bon c'est un détail.
Enfin, les prénoms Eva/Mia/Tina n'aident pas à bien se repérer : tous courts et trop semblables. Là, j'ai tout de suite compris que c'était dû à la limite de signes (mes persos chez La Musardine aussi s'appellent toutes Eva-Léa-Béa pour les mêmes raisons, ça m'a bien fait sourire de t'imaginer remplacer toi aussi les prénoms de tes persos pour gagner un peu de place). C'est trois fois rien mais ça ralentit la lecture en nous obligeant à revenir en arrière pour vérifier de qui on parle.

Tout ceci n'entache en rien le plaisir de ma lecture : que la fin soit attendue ou pas n'est pas le propos, tout réside dans cette atmosphère oppressante, qui passe du manoir à la maison, par le transfert de lieu de la poupée. Je ne relève pas les raisons du changement de la fillette en poupée, on s'en fiche, ça ne nécessite pas d'être approfondi, libre choix au lecteur dans son interprétation, je garderai juste en mémoire cette ambiance et ce style. Et le changement de ton sur la fin, les odeurs (un terme peut-être un peu trop répété), les sensations, le déploiement de l'horrifique, pas dans l'excès, juste ce qu'il faut en jouant sur les contrastes avec ce qui précédait et avec la scène finale du manoir. Une mention spéciale aussi aux angoisses de la mère de famille qui se sent de plus en plus prise à la gorge, l'accident achevant de la faire basculer et franchir la limite (le vol) pour essayer de compenser ce qu'elle ressent comme des échecs en tant que mère. Ça aussi, c'est bien vu, bien mené.

Bref, une très belle participation !

par **Blahom** Jeu 25 Aoû 2022 - 19:37

Mnémosyne a écrit:

L'ambiance est tout de suite palpable, on est dedans, le vieux bizarre toqué de poupées, la collection tout aussi bizarre, la mère qui peine à joindre les deux bouts, ce sentiment de culpabilité de plus en plus prégnant et le malaise ambiant. De ce point de vue, c'est tout bon.

C'est un aspect du texte dont je suis satisfait et j'apprécie que cela ait fonctionné avec certains lecteurs.

Mes petites critiques seront donc assez basiques : tout d'abord, le côté un peu prévisible de la chute qu'on devine dès la mention du grain de beauté. On ne sait pas encore comment ça va se produire mais on suppose que cette marque servira plus tard à différencier la fille de la poupée.

Oui, ce point a déjà été abordé. La brièveté du format confère à ce malheureux grain de beauté les dimensions d'une maison.

Il y a aussi le "ailleurs, elles mouraient". Sur le coup, je me suis dit que tu avais sûrement voulu dire "ailleurs, elles mourraient", mais te connaissant il était évident qu'il ne s'agissait pas d'une coquille, ce qui m'a poussée malgré moi à anticiper la fin (du moins, j'ai compris que c'est une façon de "sauver" les fillettes qui, du point de vue du vieux, sont en train de "mourir", dans le cas de Tina négligée par sa mère qui ne peut lui apporter tout ce dont elle est censée avoir besoin) (quoique, après réflexion, l'emploi du conditionnel serait juste aussi puisque la poupée meurt).

J'apprécie le tact dont tu fais preuve en relevant ce qui est bien une affreuse coquille, sans doute due à un moment d'inattention et aux ravages de l'âge (tu ne connais sans doute pas encore les affres de la presbytie). Il s'agissait bien sûr d'un conditionnel, il fallait bien lire et comprendre "elles mourraient", ce qui porte le nombre de signes à 5499 . Bref, le genre de plaisanterie qui peut coûter cher...

Enfin, les prénoms Eva/Mia/Tina n'aident pas à bien se repérer : tous courts et trop semblables. Là, j'ai tout de suite compris que c'était dû à la limite de signes (mes persos chez La Musardine aussi s'appellent toutes Eva-Léa-Béa pour les mêmes raisons, ça m'a bien fait sourire de t'imaginer remplacer toi aussi les prénoms de tes persos pour gagner un peu de place).

La prochaine fois, je raconterai les trépidantes aventures de Léa et Béa.

Et le changement de ton sur la fin, les odeurs (un terme peut-être un peu trop répété), les sensations, le déploiement de l'horrifique, pas dans l'excès, juste ce qu'il faut en jouant sur les contrastes avec ce qui précédait et avec la scène finale du manoir.

Comme je l'indiquais plus haut, j'ai pris un réel plaisir à rédiger ce passage plus horrifique (toutes proportions gardées).

Bref, une très belle participation !

Merci Raven.

par **Tak** Jeu 25 Aoû 2022 - 19:49

Mnémosyne a écrit:
Commentaire de Raven :

J'ai aussi moyennement accroché à la répétition "Mia éprouva un tel sentiment de mésaise" / "Mia éprouvait un âpre sentiment de malaise.", mais bon c'est un détail.

Ah, en voyant cette mention dans ton comm', je me sens un peu moins seul, car j'avais moi aussi légèrement tiqué dessus à la lecture. Pas de quoi enlever des points, bien entendu, mais la répétition des sonorités aussi bien que la signification m'a également fait tilter sur le moment, mais aussi (et surtout) parce que je ne connaissais pas ce terme de "mésaise" : au final, c'est plutôt un bon point caché dans une remarque de pure forme.
Merci donc ce palier à mes lacunes en matière de vocabulaire, Blahom ! Wink

par **Blahom** Jeu 25 Aoû 2022 - 19:55

C'est toujours un plaisir, Tak. Smile

par **Tobermory** Ven 26 Aoû 2022 - 16:02

Bonjour Blahom
Après avoir lu ton texte j’ai lu les commentaires. Ils soulèvent un certain nombre d’imperfections que je n’avais pas repérées. Ce que j’expose ici, c’est mon impression et qui comptera sans doute beaucoup dans mon classement. Pour moi c’est un texte très classique (qualificatif qui revient souvent dans les commentaires des textes de ce concours) mais excellent.
Si j’ai bien deviné que tout cela allait mal finir, en revanche je n’avais pas pensé à la substitution finale, malgré l’indice de la tache, qui aurait dû me mettre la puce à l’oreille.
Tu as su créer une bonne atmosphère, celle inquiétante du manoir, mais aussi celle de tristesse de la saison hivernale.
Quant au personnage de la mère, je l’ai trouvé attachant. Contrairement à Cancéreugène, pour moi, avec elle n’était pas une bonne mère on est dans son point de vue, sa culpabilité vis-à-vis de sa fille.

Le plus délicat dans ton histoire

Spoiler:

Mais ces réserves sont mineures et ça reste un très bon texte.

par **Blahom** Ven 26 Aoû 2022 - 16:30

Je prends note de ce problème de répétition, déjà soulevé par Raven. Dans un texte d'une telle brièveté, cela ne peut évidemment pas fonctionner. Idem pour les guillemets.

À part ça, j'apprécie que tu sois entré dans le texte et en aies apprécié l'atmosphère.
"La fin est impressionnante dans son Horreur." Merci, je suis très sensible à ce compliment.

Merci Tobermory.

par **Similien** Lun 29 Aoû 2022 - 13:57

Comme d'habitude, Blahom, tu exploites le thème imposé dans une entrée très solide. Je suis admiratif (et un peu envieux) de ta capacité à travailler ainsi "sur commande", en produisant des textes qui ne manquent jamais d'à-propos mais respectent en même temps tout à fait les édits du récit d'horreur. Il y a cinquante ans, tu aurais peut-être été bien équipé pour devenir un auteur professionnel, du type marathonien qui livre des récits sous une kyrielle de signatures différentes…
Dommage que le public pour ce type de littérature ne soit plus ce qu'il était…

Cela dit, j'évoque la facture "classique" du récit (et d'autres ont mieux expliqué en quoi on y retrouve une recette —ou une architecture— bien éprouvée) mais je rejoins aussi cette excellente remarque de Collapsus :

Collapsus a écrit:Le contexte social et économique en toile de fond de ta nouvelle m’a beaucoup plu. J’ai ressenti l’aspect dur et désespérant de la condition de ton héroïne.

Il me semble que ce genre de galère de mère célibataire ancre bien le récit dans l'époque contemporaine (tandis que l'âge d'or du récit horrifique se centre, il me semble, plus sur la famille nucléaire américaine typique des années 50 et 60).

Du coup, je suis un peu partagé vis-à-vis de la remarque de Nao, sur l'accident de voiture : l'amateur de récits efficaces en moi est entièrement d'accord, et trouve que cet épisode pourrait effectivement être retranché ; mais, en même temps, de par mon penchant pour les récits ancrés dans le temps présent, je trouve que c'est un élément intéressant. Car il fait le lien avec une réalité concrète et actuelle, tandis que le reste du récit (le cadre du manoir…) appartient davantage à un répertoire conventionnel, dès lors plus "romanesque" et moins réaliste…

Il faudrait donc voir quel aspect du texte tu souhaiterais privilégier lors de la réécriture…

par **Blahom** Lun 29 Aoû 2022 - 14:32

Similien a écrit: Je suis admiratif (et un peu envieux) de ta capacité à travailler ainsi "sur commande", en produisant des textes qui ne manquent jamais d'à-propos mais respectent en même temps tout à fait les édits du récit d'horreur.

Quant à moi, je suis toujours impressionné par la pertinence de tes commentaires (je parle de tes commentaires en général, pas seulement ceux concernant mes histoires).
Cette "capacité" que tu admires n'est hélas que la conséquence de mon dilettantisme et - il faut bien l'avouer - de ma fainéantise.
S'il n'y avait les concours de l'Écritoire, ma production serait proche de zéro.

Il y a cinquante ans, tu aurais peut-être été bien équipé pour devenir un auteur professionnel, du type marathonien qui livre des récits sous une kyrielle de signatures différentes…

Franchement, même durant l'âge d'or de la littérature populaire, j'aurais été incapable d'un tel exploit. N'est pas G. J. Arnaud qui veut. Et s'il est un terme qui s'applique mal à ma petite personne, c'est bien "marathonien". Je suis quelqu'un de très zen, de très lent. Pour moi, la procrastination est une seconde nature.

Cela dit, j'évoque la facture "classique" du récit (et d'autres ont mieux expliqué en quoi on y retrouve une recette —ou une architecture— bien éprouvée) mais je rejoins aussi cette excellente remarque de Collapsus :

Collapsus a écrit:Le contexte social et économique en toile de fond de ta nouvelle m’a beaucoup plu. J’ai ressenti l’aspect dur et désespérant de la condition de ton héroïne.

Inscrire ce récit dans un contexte social et économique actuel m'a paru intéressant. Cela n'a visiblement pas été du goût de tout le monde.

Il me semble que ce genre de galère de mère célibataire ancre bien le récit dans l'époque contemporaine (tandis que l'âge d'or du récit horrifique se centre, il me semble, plus sur la famille nucléaire américaine typique des années 50 et 60).

Oui, c'est ça... Procéder de la sorte me permettait de briser le caractère intemporel (ou carrément "hors du temps") de mon histoire.

Du coup, je suis un peu partagé vis-à-vis de la remarque de Nao, sur l'accident de voiture : l'amateur de récits efficaces en moi est entièrement d'accord, et trouve que cet épisode pourrait effectivement être retranché ; mais, en même temps, de par mon penchant pour les récits ancrés dans le temps présent, je trouve que c'est un élément intéressant. Car il fait le lien avec une réalité concrète et actuelle, tandis que le reste du récit (le cadre du manoir…) appartient davantage à un répertoire conventionnel, dès lors plus "romanesque" et moins réaliste…

Les deux points de vue sont dignes d'intérêt. Dans l'optique très particulière de ce concours estival, caractérisé par une drastique limitation de signes, ce passage aurait sans doute pu être supprimé au profit d'éléments relevant du surnaturel.

Merci Similien.

par **Endymion** Mer 31 Aoû 2022 - 20:10

Salut Blahom,
une bonne participation, sans reprendre les autres commentaires, il y a des éléments qui amènent à deviner la fin. Mais le plaisir de lecture y est, et s'est l'essentiel. Pas forcément mon préféré pour l'histoire, mais on est dans le thème.

par **Blahom** Mer 31 Aoû 2022 - 22:12

Endymion a écrit: il y a des éléments qui amènent à deviner la fin. Mais le plaisir de lecture y est, et s'est l'essentiel.

Si je devais reprendre ce texte en vue de l'améliorer, je ferais en sorte de rendre certains indices moins évidents.
Cela ne pourrait que renforcer la notion de plaisir de lecture.

Merci Endymion.

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