Normal

À mon tour, avec un texte qui n'est pas SFFF, mais dans un genre "ami" (pas comme le narrateur de cette histoire, qui est loin d'être amical...). Longueur : 13.265 sec.

Voici le lien vers le PDF :

https://drive.google.com/file/d/1CxjdP4byv1eBDFBsaFTraCBY0y9Kqcq6/view?usp=sharing

Je dois te dira qu'aux première signes j'ai eu très peur lol Le style vulgaire ne sied guère ^^ mais la suite a réussi à me prendre au jeu. Ce personnage m'a rappelé une série que j'aime beaucoup :"You". Le perso parle un peu de cette façon (voix off), lui tombe amoureux de certaines filles jusqu'à l'obsession et n'hésite pas à les tuer si elle découvre à quel point il a tout manigancé... Donc un bon texte, pas mon préféré du concours mais en tout cas j'avais envie de savoir ce qui se passerait à la fin.. Un éternel recommencement..

Merci Mélodie. J’avoue, le début est fait pour donner le ton : c’est cinglant, désagréable... Perso, à chaque fois que je le relie, je me sens agressé par ces premières phrases, qui sont détestables. En même temps, c’est le but recherché... Je suppose que ça passe ou ça casse. D’autant plus que j’ai fait des choix assez particuliers pour ce texte, avec le présent, les passages à la deuxième personne, et puis ce personnage qui n’a vraiment rien de charmant – sans oublier le genre et le traitement du thème : mon intention étant de développer une histoire d’horreur psychologique, en soulevant le « masque de normalité » d’un tueur en série (les textes que je poste sur le forum sont décidément dark, même si j’écris normalement plus du fantastique que de l’horreur ou du gore !).
En tout cas, c’est toujours plaisant d’avoir des retours, et je suis content si le texte t’a quand même (relativement) plu.
En passant, c’est marrant que tu mentionnes You, j’y pensais justement après avoir posté, en réalisant que le « toi » que le narrateur utilise à quelques reprises pouvait faire penser au titre de cette série. Que j’ai bien aimé d’ailleurs (bon twist de saison 2, j’attends la 3 avec impatience — sans doute un éternel recommencement là aussi ).

Salut Sacripan,
Ici, je rejoins Mélodie. Si l'on n'était pas dans le concours, je n'aurais peut-être pas lu au delà du premier paragraphe. Un peu comme un lecteur qui feuillette des livres inconnus au hasard avant de faire son choix et lit juste les premières lignes...  Que les pensées du héros, à la première personne, soient plates et vulgaires, évidemment tu dois les rendre telles. Mais c'est là que peuvent se révéler utiles quelques codes pour communiquer au lecteur que ce n'est pas ton style qui est pauvre et déplacé.

La suite captive tout de suite et on lit jusqu'au bout pour connaître l'issue, quoique sans surprise, mais c'est bien amené.
A l'arrivée, c'est une bonne prestation pour moi.


Je noterai, pour pinailler une petite faute de concordance de temps :" Si un de tes voisins sort, je dégainerais mon té­lé­phone."
Et tu as utilisé deux fois "faire" comme verbe introducteur, ce qui sonne assez mal à mon oreille:
— Au revoir, fait-elle en se retournant à moitié.
— Merci, fais-tu en fourrant le courrier dans ton sac.

Trantor a écrit:Si l'on n'était pas dans le concours, je n'aurais peut-être pas lu au delà du premier paragraphe. Un peu comme un lecteur qui feuillette des livres inconnus au hasard avant de faire son choix et lit juste les premières lignes...  Que les pensées du héros, à la première personne, soient plates et vulgaires, évidemment tu dois les rendre telles. Mais c'est là que peuvent se révéler utiles quelques codes pour communiquer au lecteur que ce n'est pas ton style qui est pauvre et déplacé.

C’est vraiment un choix à double tranchant pour le coup (et, pour l’instant, avec Mélodie et toi, ça se retourne plutôt contre l’envie de lire le texte...). L’effet recherché, c’était d’interpeller – violemment – le lecteur, de lui faire froncer les sourcils, et se dire “C’est qui ce sale type ?”. Donc, de susciter de la curiosité. Mais si ça produit l’effet inverse, j’y suis sans doute allé trop fort... (Un truc comme “ma belle” au lieu de “ma salope” aurait peut-être rendu le côté prédateur de la phrase, mais sans la grossièreté...)

Du coup, ça m’interroge : quels sont les codes auxquels tu fais référence, et qui auraient pu communiquer plus clairement au lecteur que c’est bien le personnage-narrateur qui s’exprime (et pas moi, Sacripan) ?

En tout cas, si tu as accroché avec la suite, ça me fait sincèrement plaisir.

Trantor a écrit:Je noterai, pour pinailler une petite faute de concordance de temps :" Si un de tes voisins sort, je dégainerais mon té­lé­phone."

Le conditionnel me semblait logique, mais tu as raison, c’est du futur. Merci !

Disons qu'un conseil qui revient souvent, dans les masterclass d'écriture et dans les bouquins sur le sujet, est de travailler particulièrement les premières lignes d'un texte. Ici, le problème n'est pas tant la vulgarité des mots que le fait qu'ils soient inclus dans un paragraphe dénué de style, sans attrait,
Ce qui n'est pas le cas du reste de ton texte.

Dans le genre psychopathe, les deux première phrases d'Orange Mécanique, avec un vocabulaire au raz des pâquerettes, sont un monument du genre:  

""« Bon, alors ça sera quoi, hein ? »
  Il y avait moi autrement dit Alex, et mes trois drougs, autrement dit Pierrot, Jo et Momo, vraiment momo le Momo, et on était assis au Korova Milkbar à se creuser le rassoudok pour savoir ce qu’on ferait de la soirée, – une putain de soirée d’hiver, branque, noire et glaciale, mais sans eau....  ""

Merci, Trantor ! Effectivement, l’incipit d’Orange Mécanique est admirable (ça me donne envie de le lire, du coup...).

C’est vrai que je n’y avais pas pensé comme ça, à mon intro, mais ce que tu dis est très juste. Pourtant, j’ai moi aussi suivi la masterclass d’Eric-Emmanuel Schmitt , et il insiste bien là-dessus ! En passant, j’ai passé un excellent moment avec cette masterclass : l’investissement pas donné (heureusement, à -60%!), mais EES fait ça bien, et les exercices et conseils qu’il donne sont souvent utiles et intéressants.

Habiter de l'intérieur, fût-ce le temps d'une nouvelle, un prédateur social aussi sinistre que ton personnage est un exercice hautement périlleux. Tout est dans la justesse du ton à trouver : trop léger et tu n'est pas crédible, trop forcé et tu tombes dans la caricature ou le ridicule.
En l'occurrence, tu t'en sors avec une aisance presque inquiétante. Avec ce qu'il faut de cynisme, de mépris, d'obsession (Ma salope), d'absence de remords et, en filigrane, d'assez haute opinion de lui-même pour rendre réaliste - et donc plausible - cet "auto-portrait" de tueur.
Un numéro peut-être un peu court sur le plan de l'intrigue mais assez dérangeant pour en recommander la lecture à tous les petits chaperons rouges trop confiants.
Mais si, hélas, il en reste !

Le ton et cette introspection sont très bien gérés je trouve. Par contre, je n'aurais pas vu ce thème de cette manière, mais c'est une possibilité qui n'enlève pas la parfaite maîtrise de ta nouvelle. Ça fait peur !!!
T'es sûr Jack qu'il existe encore des "Chaperons rouges" ?
Le pire serait qu'il existe ce genre de psychopathe et que j'ai peut-être eu affaire à lui en tant que caissier

Jack-the-rimeur a écrit:En l'occurrence, tu t'en sors avec une aisance presque inquiétante. Avec ce qu'il faut de cynisme, de mépris, d'obsession (Ma salope), d'absence de remords et, en filigrane, d'assez haute opinion de lui-même pour rendre réaliste - et donc plausible - cet "auto-portrait" de tueur.

Merci Jack, je suis content si le texte a réussi à te convaincre ! J’avoue un truc : avec ce que j’ai posté sur le forum (les trois quarts de mes textes parlant de tueurs en première personne du singulier), je me suis demandé si on n’allait pas me prendre pour un vrai fou...

Après, le phénomène des tueurs en série (et le true crime en général - à la « Hondelatte raconte ») est un truc qui m’a pas mal intrigué et intéressé à une époque (beaucoup moins maintenant). Pour moi, ça relève presque du fantastique psychologique que d’essayer de comprendre comment un monstre froid comme celui du texte peut fonctionner sur le plan mental. Essayer d’appréhender et de montrer un paysage mental fondamentalement autre, froid, impitoyable, haineux, et surtout complètement différent de l’image lisse que le personnage affiche avec son « masque de normalité ». Ce texte est en fait nourri d’une chiée de bouquins et de docus que j’ai regardé à une époque : dans des petits détails (maîtrise du sourire, expressions faciales ou ton de la voix, etc. pour constituer son masque) ou dans des références qui parleront peut-être aux adeptes du true crime (Ted Bundy, tueur américain très connu, a travaillé comme bénévole dans un centre type SOS Amitié).

Sinon, ton pseudo me fait penser à un excellent film sur un tueur en série : The House That Jack Built, de Lars Von Trier. Très fort et extrêmement malaisant (il y a plusieurs scènes atroces, qui perso me retiennent de le mater une deuxième fois, pour l’instant).

Françoise a écrit:Le ton et cette introspection sont très bien gérés je trouve. Par contre, je n'aurais pas vu ce thème de cette manière, mais c'est une possibilité qui n'enlève pas la parfaite maîtrise de ta nouvelle. Ça fait peur !!!
T'es sûr Jack qu'il existe encore des "Chaperons rouges" ?
Le pire serait qu'il existe ce genre de psychopathe et que j'ai peut-être eu affaire à lui en tant que caissier affraid

Merci Françoise ! En fait, c’était l’idée – certes, pas très originale – du « masque de normalité » dont se parent les tueurs en série : comment ils simulent les émotions, cachent leur vraie personnalité sous les aspects de la normalité, etc. Il me semble que Phantom y avait pensé aussi avant de se dire que c’était pas très orignal (il l’explique dans les commentaires sous sa propre nouvelle).
Je sais pas si mon personnage est totalement crédible ou pas. En revanche, je suis peut-être parano, mais je suis sûr que ce genre d’individus, quand on les croise on les reconnait pas ! Donc, c’est possible qu’on en ait déjà croisé un sans le savoir... Des prédateurs au sein de nos sociétés, moi j’avoue que ça me fait flipper en tout cas !

Je crois que c'est Jeffrey Dahmer qu'on a surnommé "le tueur au visage d'ange. Dans le film éponyme, on voit le vampire de Dusseldorf aider une petite vieille à monter son cabas dans l'escalier, et il est reconnu qu'appelé en urgence au milieu de la nuit, le docteur Petiot n'hésitait pas à sauter sur son vélo même en plein hiver.
C'est ça le problème avec les tueurs en série : ils ressemblent à n'importe qui.
Certains n'ont jamais éprouvé d'empathie, beaucoup l'ont tuée en eux pour survivre à une enfance cruellement maltraitée mais, tous, en parfaits caméléons, savent en reproduire les signes extérieurs. Quand les filles disparaissaient au Yorkshire, Sutcliffe n'était pas le dernier à participer aux recherches et, bien qu'interrogé à trois reprises, jamais il n'a éveillé les soupçons des enquêteurs. Ou, quand Francis Heaulme veut se constituer prisonnier, le gendarmes lui donnent 100 francs pour qu'il puisse rentrer chez lui.
Quand on n'a pas la tête de l'emploi...
Ce côté passe-partout est d'ailleurs un facteur clé du serial killer, ne serait-ce que pour la raison évidente qu'un tueur au comportement trop suspect n'aura guère l'occasion de récidiver.
Je me souviens m'être demandé à une époque si les tueurs en série ne pouvaient pas être considérés comme relevant du paranormal, peut-être une branche voisine des possessions démoniaques (certains entendent des voix), mais j'ai eu quelque appréhension à creuser de ce côté. Mais si le coeur t'en dis...
Par contre, une étude (dont j'ai perdu les références hélas) m'a pas mal donné à réfléchir. Celle-ci établissait un curieux constat : 80% des serial killers sont américains et 80% des serial killers américains sont de Californie. De là à imaginer que l'éclosion et l'épanouissement des tueurs en série serait favorisés par un certain type de société est plus que tentant.
L'autre côté du rêve américain ?...
Une autre fois peut-être...

J'aime bien Von Triers mais Jack-the-rimeur n'est qu'une variation d'une irrésistible drôlerie (enfin, je croyais) à partir du mythique Jack the Ripper. J'en avais fait le titre d'un poème où un rimeur apprécié pour ses vers à l'eau de rose rêvait de tremper sa plume dans le soufre. Un petit jeu Jekyll-Hyde toujours enseveli dans les tréfonds
de la bibliothèque.

J’avoue qu’il y a un côté mystérieux dans ce phénomène... On a du mal à comprendre ce qui pousse des êtres humains à adopter des comportements aussi abominables. Car le tueur en série représente le pire qu’on puisse imaginer, au niveau individuel (des dictateurs tuent bien plus, mais pour des motifs différents). Dans un sens, ils sont insaisissables : leur logique prend naissance et s’applique dans un univers mental différent de celui des gens normaux. C’est d’ailleurs pour ça que le FBI a réussi à mieux les comprendre en mettant à contribution... des serial killers emprisonnés (en mode Le Silence des Agneaux) !

C’est sans doute cette incompréhension, ce « mystère » qui explique la fascination qu’ils peuvent exercer. Ça, et puis peut-être l’envie d’apprendre à les repérer, au cas où on tomberait un jour sur l’un d’entre eux (ou une version light : les psychopathes sont parfois non violents, ce qui ne les empêchent pas de faire des dégâts autour d’eux) !

Mon opinion est 100% subjective, et je ne m'en cache pas.
C'est tout ce que j'aime lire, et j'aurais aimé l'écrire. Plusieurs de mes textes sont écrits de la même façon, à la première personne. C'est super immersif. Et là, j'avoue, j'étais à fond dedans. Du début à la fin. impossible de décoller du récit tellement c'était entraînant, puissant, crédible. Je me suis fondu avec le personnage, au point d'envisager les mêmes plans. D'une manière un peu lugubre, je dois l'avouer. En même temps, j'étais un peu en empathie avec la victime, un peu comme quand je visionnais "Maniac"... Récit hyper classique, certes, mais pour ma part, j'y étais tellement imprégné que je ne peux que le plébisciter !

Merci beaucoup, Cancereugène ! Ça me fait très plaisir que tu aies aimé ce texte (et la vie de ce salopard de Brian ). Maniac, c’était la jaquette du vidéoclub qu’on flippait rien qu’en la voyant (le mec sans visage avec un scalp dans une main, un couteau dans l’autre)... Au final, je m’en souviens mieux que du film lui-même, mais tu me donnes envie de le revoir. (En passant ça me rappelle un autre film complètement barré, Schizophrenia... bien glauque, dans le genre... ça vaut le visionnage si par hasard tu ne l’as pas déjà vu !)

Si je l'ai vu, en VO, et en effet, c'est bien glauque...