Un million de vus (Musique 1)
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Un million de vus (Musique 1)
En plus du thème de l'atelier, je me suis infligé un exercice auquel je ne m'étais pas encore prêté (car c'est un supplice) : écrire dans la langue des jeunes branleurs. Mais je suis assez satisfait de la fin. Ça représente tellement bien l'époque...
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VERSION 2 (12/05/19)
— Faut qu'on filme ça, Dam ! Obligé ! Ça va faire un buzz de ouf ! Des millions d'vus, mon gars !
— Ce soir. On y va et on s'planque. Tu sais où c'est, t'es sûr ? Pas qu'on s'fasse gauler.
— Ouais, t'inquiète. J'ai repéré l'coin.
— J'te prends à 21 h 30, ok ?
— Ça marche ! A tout'.
Seb en peut plus. Lui, son Facebook et sa chaîne YouTube... Il est vraiment chiant des fois avec ça. Je le raccompagne sur le pas de la porte avant de rejoindre mes parents à table. Je leur raconte un gros bobard pour qu'ils me laissent sortir ce soir, en leur promettant d'être rentré pour minuit. Minuit et demi grand max. Ça nous laisserait à peu près trente minutes de battement pour rappliquer chez nous. On bouffe devant les infos. Une cathédrale qui crame, ça change. Je monte ensuite dans ma chambre et débranche mon iPhone, chargé à bloc pour l'occasion. L'heure de rendez-vous arrive vite. Je guette depuis la fenêtre de ma chambre, au premier étage, l'arrivée de Seb. Pile dans les temps.
— À tout à l'heure ! hurlé-je à mes parents avant de partir.
Pour mes dix neuf ans, j'ai eu droit à une demi-heure de plus avant le couvre-feu. Je grimpe dans la poubelle de mon pote : une vieille Audi noire cabossée de partout. Ça pue la clope. Obligé d'ouvrir le carreau pour aérer.
— C'est partiiii ! beuglé-je, enthousiaste.
Seb venait d'avoir sa première voiture. Une occas' à cinq mille boules. Il conduit plutôt raisonnablement pour un jeune de vingt ans. Faut dire que l'année dernière, l'un de nos camarades s'est mangé un arbre. Cent dix au lieu de quatre-vingt. Ça pardonne pas. En le voyant paralysé des deux jambes, ça en a calmé une paire. Moi le premier. Et j'ai pas encore le permis.
Après une bonne trentaine de minutes de route, on arrive sur place, tout excités. Seb gare la voiture dans un chemin de terre, un peu avant l'entrée de la forêt. On voit assez bien où on va avec la pleine lune. On est presque en avance sur le programme. Seb préfére qu'on trace quand même pour se mettre en position. On se met à courir pour traverser l'entrée et le chemin principal de la forêt. Je me contente de suivre mon ami. C'est le seul à connaître l'endroit exact et il nous fait passer en-dehors des sentiers battus. Les ronces me piquent les jambes.
— On arrive, murmure Seb, après dix bonnes minutes de course.
C'était une clairière et il y avait un bloc de pierre plat au milieu.
— C'est quoi ça ? demandé-je à voix basse.
— Un autel.
— Ah ? C'est le truc pour sacrifier des animaux ?
— Ouais, et c'est ça qu'on va filmer.
— Ah ouais, putain, gros gros buzz.
— Chut, ils arrivent.
On la boucle, couchés derrière un énorme arbre déraciné. Des torches traversent la forêt. On s'est habillés en gris pour être moins visibles. Tous les gens portent une robe pourpre à capuche et un masque un peu dans le genre Anonymous, mais sans la pilosité. Tout blanc. Ils commencent à faire une ronde autour de l'autel en tournant les paumes vers le ciel. Seb et moi commençons à filmer. Zoom à fond. Une question me démange mais faut rester silencieux. Je vois pas l'animal pour le sacrifice. Bizarre. Y en aura peut-être pas finalement. Tant mieux. En fait, j'aime pas qu'on fasse mal aux bêtes.
Je compte les têtes... Treize. Ils commencent à chanter des espèces d'incantations en latin. Trop chelou. Flippant même. Je suis plus aussi chaud qu'au début. L'une des personnes s'avance et retire sa robe. Une femme à poil. En plus, ça caille. Elle doit pointer. Je souris et m'assure de bien tout filmer. Je donne un coup de coude à Seb en tirant la langue. Il fait aller ses sourcils de bas en haut. Quelle bande de crevards. Puis une autre personne s'approche d'elle et brandit une dague. Et là, on sourit moins. On se regarde comme des cons même. Mais on filme. Faut pas en perdre une seule miette. Le bonhomme à la cape parle encore en latin, il pose sa lame sur le cou de la nana. Qu'est-ce qu'elle est bonne en plus. Il l'égorge net. Putain de merde. Et là, je crois pas que ça soit un trucage. C'est trop réaliste. On panique. Fin de la vidéo. On essaie de se barrer sans faire de bruit mais forcément dans une forêt, c'est mort d'avance. On aurait mieux fait de pas bouger et d'attendre qu'ils se cassent. Mais quels débiles. Trop tard. On est grillés.
— Cours, putain. Cours ! Cours ! gueula Seb.
Heureusement, avec le foot, on est habitués à tailler des pointes. Ils nous pourchassent dans la forêt avec leurs torches mais on réussit à les semer et à retourner à la voiture. Je regarde par le pare-brise arrière. Ils arrivent. Vite. L'Audi a eu le temps de refroidir et le moteur galère. Ils se sont plus qu'à quelques mètres. Je tremble comme une feuille. Ça y est, ça démarre.
— Allez ! Fonce, fonce ! crié-je, agrippé au siège.
Seb démarre et accélère en dérapant dans la terre. Ils ont dû voir la plaque d'immatriculation. Je stresse à mort.
— Putain de merde ! C'est quoi ce bordel ?! brailla-t-il. T'imagines ? Sérieux ? Tu te rends comptes ? Ils l'ont buté. Saignée comme une truie. Sans pitié.
— Ouais c'est horrible, pauvre femme. Qu'est-ce qu'on va faire ? Faut qu'on montre la vidéo à nos darons.
— T'es con ou quoi ?
— Hein ?!
Je le regarde les yeux grand ouverts.
— Qu'est-ce qu'on va faire ? Je vais te dire ce qu'on va faire, tête de bite ! Un putain de million de vus.
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VERSION 2 (12/05/19)
— Faut qu'on filme ça, Dam ! Obligé ! Ça va faire un buzz de ouf ! Des millions d'vus, mon gars !
— Ce soir. On y va et on s'planque. Tu sais où c'est, t'es sûr ? Pas qu'on s'fasse gauler.
— Ouais, t'inquiète. J'ai repéré l'coin.
— J'te prends à 21 h 30, ok ?
— Ça marche ! A tout'.
Seb en peut plus. Lui, son Facebook et sa chaîne YouTube... Il est vraiment chiant des fois avec ça. Je le raccompagne sur le pas de la porte avant de rejoindre mes parents à table. Je leur raconte un gros bobard pour qu'ils me laissent sortir ce soir, en leur promettant d'être rentré pour minuit. Minuit et demi grand max. Ça nous laisserait à peu près trente minutes de battement pour rappliquer chez nous. On bouffe devant les infos. Une cathédrale qui crame, ça change. Je monte ensuite dans ma chambre et débranche mon iPhone, chargé à bloc pour l'occasion. L'heure de rendez-vous arrive vite. Je guette depuis la fenêtre de ma chambre, au premier étage, l'arrivée de Seb. Pile dans les temps.
— À tout à l'heure ! hurlé-je à mes parents avant de partir.
Pour mes dix neuf ans, j'ai eu droit à une demi-heure de plus avant le couvre-feu. Je grimpe dans la poubelle de mon pote : une vieille Audi noire cabossée de partout. Ça pue la clope. Obligé d'ouvrir le carreau pour aérer.
— C'est partiiii ! beuglé-je, enthousiaste.
Seb venait d'avoir sa première voiture. Une occas' à cinq mille boules. Il conduit plutôt raisonnablement pour un jeune de vingt ans. Faut dire que l'année dernière, l'un de nos camarades s'est mangé un arbre. Cent dix au lieu de quatre-vingt. Ça pardonne pas. En le voyant paralysé des deux jambes, ça en a calmé une paire. Moi le premier. Et j'ai pas encore le permis.
Après une bonne trentaine de minutes de route, on arrive sur place, tout excités. Seb gare la voiture dans un chemin de terre, un peu avant l'entrée de la forêt. On voit assez bien où on va avec la pleine lune. On est presque en avance sur le programme. Seb préfére qu'on trace quand même pour se mettre en position. On se met à courir pour traverser l'entrée et le chemin principal de la forêt. Je me contente de suivre mon ami. C'est le seul à connaître l'endroit exact et il nous fait passer en-dehors des sentiers battus. Les ronces me piquent les jambes.
— On arrive, murmure Seb, après dix bonnes minutes de course.
C'était une clairière et il y avait un bloc de pierre plat au milieu.
— C'est quoi ça ? demandé-je à voix basse.
— Un autel.
— Ah ? C'est le truc pour sacrifier des animaux ?
— Ouais, et c'est ça qu'on va filmer.
— Ah ouais, putain, gros gros buzz.
— Chut, ils arrivent.
On la boucle, couchés derrière un énorme arbre déraciné. Des torches traversent la forêt. On s'est habillés en gris pour être moins visibles. Tous les gens portent une robe pourpre à capuche et un masque un peu dans le genre Anonymous, mais sans la pilosité. Tout blanc. Ils commencent à faire une ronde autour de l'autel en tournant les paumes vers le ciel. Seb et moi commençons à filmer. Zoom à fond. Une question me démange mais faut rester silencieux. Je vois pas l'animal pour le sacrifice. Bizarre. Y en aura peut-être pas finalement. Tant mieux. En fait, j'aime pas qu'on fasse mal aux bêtes.
Je compte les têtes... Treize. Ils commencent à chanter des espèces d'incantations en latin. Trop chelou. Flippant même. Je suis plus aussi chaud qu'au début. L'une des personnes s'avance et retire sa robe. Une femme à poil. En plus, ça caille. Elle doit pointer. Je souris et m'assure de bien tout filmer. Je donne un coup de coude à Seb en tirant la langue. Il fait aller ses sourcils de bas en haut. Quelle bande de crevards. Puis une autre personne s'approche d'elle et brandit une dague. Et là, on sourit moins. On se regarde comme des cons même. Mais on filme. Faut pas en perdre une seule miette. Le bonhomme à la cape parle encore en latin, il pose sa lame sur le cou de la nana. Qu'est-ce qu'elle est bonne en plus. Il l'égorge net. Putain de merde. Et là, je crois pas que ça soit un trucage. C'est trop réaliste. On panique. Fin de la vidéo. On essaie de se barrer sans faire de bruit mais forcément dans une forêt, c'est mort d'avance. On aurait mieux fait de pas bouger et d'attendre qu'ils se cassent. Mais quels débiles. Trop tard. On est grillés.
— Cours, putain. Cours ! Cours ! gueula Seb.
Heureusement, avec le foot, on est habitués à tailler des pointes. Ils nous pourchassent dans la forêt avec leurs torches mais on réussit à les semer et à retourner à la voiture. Je regarde par le pare-brise arrière. Ils arrivent. Vite. L'Audi a eu le temps de refroidir et le moteur galère. Ils se sont plus qu'à quelques mètres. Je tremble comme une feuille. Ça y est, ça démarre.
— Allez ! Fonce, fonce ! crié-je, agrippé au siège.
Seb démarre et accélère en dérapant dans la terre. Ils ont dû voir la plaque d'immatriculation. Je stresse à mort.
— Putain de merde ! C'est quoi ce bordel ?! brailla-t-il. T'imagines ? Sérieux ? Tu te rends comptes ? Ils l'ont buté. Saignée comme une truie. Sans pitié.
— Ouais c'est horrible, pauvre femme. Qu'est-ce qu'on va faire ? Faut qu'on montre la vidéo à nos darons.
— T'es con ou quoi ?
— Hein ?!
Je le regarde les yeux grand ouverts.
— Qu'est-ce qu'on va faire ? Je vais te dire ce qu'on va faire, tête de bite ! Un putain de million de vus.
Re: Un million de vus (Musique 1)
Alors de tête je me souviens plus du morceau, mais en tous cas ton texte est assez prenant et immersif. D'une part grâce à tes dialogues, plutôt réussis, mais aussi de par son rythme soutenu, qui fait qu'on a pas le temps de s'ennuyer.
Après c'est dommage qu'il n'y ai pas de "réelle" note conclusive, même si l'idée du "1 million de vues" dans ce contexte est marrant. Mais j'aurais peut-être imaginé quelque chose d'un peu plus "trash" ou je ne sais quoi, pour rester dans le ton général.
Ceci dit, j'ai pris plaisir à te lire et c'est tout ce qui est censé compter.
Pour la musique elle-même, eh ben je dirais que c'est tellement subjectif que chacun peut y voir (ou entendre) ce qu'il veut. Du coup, si tu as réussi à sortir quelque chose en te basant sur le morceau, l'atelier est forcément réussi.
Du moins, c'est ainsi que je le conçois.
Après c'est dommage qu'il n'y ai pas de "réelle" note conclusive, même si l'idée du "1 million de vues" dans ce contexte est marrant. Mais j'aurais peut-être imaginé quelque chose d'un peu plus "trash" ou je ne sais quoi, pour rester dans le ton général.
Ceci dit, j'ai pris plaisir à te lire et c'est tout ce qui est censé compter.
Pour la musique elle-même, eh ben je dirais que c'est tellement subjectif que chacun peut y voir (ou entendre) ce qu'il veut. Du coup, si tu as réussi à sortir quelque chose en te basant sur le morceau, l'atelier est forcément réussi.
Du moins, c'est ainsi que je le conçois.
Tak- Mélomane des Ondes Noires
Disciple des Livres de Sang - Messages : 6299
Date d'inscription : 01/12/2012
Age : 42
Localisation : Briançon, Hautes-Alpes
Re: Un million de vus (Musique 1)
Bravo Phantom, une fois de plus, tu proposes un texte de bon niveau. Je ne suis sans doute pas le plus compétent pour évaluer ton travail. Je pense cependant que tu es trop soucieux d'offrir à ton lecteur une vision conforme à ce qu'il attend, et que cela te fait employer un langage pas vraiment adapté. "Je tremble comme une feuille" me paraît un bon exemple. J'aurais plutôt vu un truc du genre "je chie dans mon slip" ou "Mon slip va subir un outrage bien merdique" - mes exemples ne sont pas meilleurs, je le concède, c'est juste une question de langage.
En tout cas, j'étais bien dans ton récit, c'est fluide, entraînant, tu as cette capacité à prendre ton lecteur et à ne pas le lâcher, c'est une grande qualité.
Pour le reste, je ne vois pas de lien avec le morceau n°1 proposé dans l'atelier.
En tout cas, j'étais bien dans ton récit, c'est fluide, entraînant, tu as cette capacité à prendre ton lecteur et à ne pas le lâcher, c'est une grande qualité.
Pour le reste, je ne vois pas de lien avec le morceau n°1 proposé dans l'atelier.
Re: Un million de vus (Musique 1)
Merci. Eh bien, le morceau a fait penser à une ambiance un peu de secte satanique. D'où ce texte. Oui, je reconnais que j'ai encore du mal à "me lâcher". L'atelier / catégorie gore /porno m'a aidé à cela ah ah ah
Re: Un million de vus (Musique 1)
Très bon texte qui donne une bonne image de la noirceur des desseins d'êtres dits humains, toujours capables du pire. Bien vu.
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