"Un autre recueil", la suite, de Christophe Siébert
+3
Ulysse
Naëlle
Léonox
7 participants
Page 2 sur 2
Page 2 sur 2 • 1, 2
Re: "Un autre recueil", la suite, de Christophe Siébert
Merci Catherine.
Nouvelle rafale, avec un mini-cycle thématique qui me fait penser au dernier roman finalisé du regretté Thierry Jonquet, Ils sont votre épouvante et vous êtes leur crainte.
49
Il y a des séparations qui sont comme des arbres foudroyés, comme des maisons qui flambent et dont le toit s'effondre et tue les habitants, il y a des séparations pleines de fracas, il y a des séparations qui sont comme des catastrophes, et il y a des séparations qui sont comme une dent usée dont la racine, invisible dans la gencive, s'érode, s'érode, comme une dent usée qui bouge, se détache progressivement, finit par ne tenir qu'à un bout de racine, qui un jour se détache sans qu'on puisse bien savoir pourquoi c'est aujourd'hui et pourquoi pas hier, et pourquoi pas demain.
50
Sur France-Inter ils croient
Les bienheureux connards
Que l'argot des ados
Verlan, mots inventés
Ça leur sert à parler
Sans que les parents pigent
Ce serait supposer
Espèces d'hypocrites
Que les adultes écoutent
Ce que disent les jeunes
51
Moi en ce moment ce qui m'intéresse au cinéma, dans les films de Bonitzer par exemple, ou bien ceux avec Luchini, c'est de voir les actrices interpréter des cruches, des potiches, des jolies gourdes, à la télé ce qui m'intéresse, en ce moment, c'est de voir des pubs sexistes avec de séduisantes actrices, ça me fascine, je pourrais passer des heures à regarder ça, je pourrais y passer des heures, à voir ça, à me demander à quoi pensent ces actrices quand elles jouent des connes, quand elles jouent des personnages qui sont tellement, tellement des fantasmes de vieux bourgeois de cinquante ans, à quoi pensent ces actrices quand elles incarnent les fantasmes de jeune femme charmante et conne, discrète, soumise, cultivée, que les réalisateurs mâles de cinquante ans mettent en scène sans vergogne, sans aucun sens du ridicule, à quoi pensent ces femmes qui se prêtent à ce jeu, c'est ça qui me fascine.
52
Ça c'est passé en cinq temps
Un
Nous avons oublié que nos enfants nous étaient en tous points supérieurs
Deux
Ils nous étaient soumis et nous les dominions
Trois
Mais nous avons voulu rétablir l'équilibre
Quatre
Nous avons découvert leur supériorité
D'abord avec surprise
Et puis ravissement
Maintenant nous flippons
Cinq
Oui nous avons peur d'eux
53
On est dans une civilisation qui méprise et craint l'adolescence. C'est significatif, je trouve. Les Grecs en train de crever méprisaient les Barbares. Les adultes dévorés par le cancer – et je parle pas de métastase qui grouille à travers la viande mais de cancer métaphysique, de cancer de l'âme – les adultes, qui érigent la rationalité, le compromis, la mesure, la tempérance en valeurs, tous ces synonymes de la mesquinerie, toutes ces nuances de la veulerie, raillent l'intransigeance, la naïveté, l'enthousiasme des adolescents. Qu'importe. Les Grecs ont terminé dans les livres d'Histoire et les Barbares ont prospéré. Ce qui meurt méprise ce qui vit, c'est un mouvement naturel, tandis que ce qui vit ignore purement et simplement ce qui meurt, ce qui vit assassine ce qui meurt en toute impunité et en toute inconscience.
54
Les bourgeois blancs hétéros ont fantasmé un monde ou les hommes n'auraient pas le devoir d'être beaux mais riches à la place, ni d'être intelligents mais d'être éduqués, pas besoin d'être en vie, il y a l'art pour ça ; les bourgeois blancs hétéros ont fantasmé un monde où ils seraient bourgeois et où ça suffirait, ils ont rêvé d'un monde où des filles très belles et très intelligentes se soumettraient à eux et nommeraient ça l'amour.
Ils l'ont construit ce monde. Oui, ils l'ont fabriqué. Vous ne sentez pas, dans les rues, dans les beaux quartiers des grandes villes, cette odeur de malaise ?
Nouvelle rafale, avec un mini-cycle thématique qui me fait penser au dernier roman finalisé du regretté Thierry Jonquet, Ils sont votre épouvante et vous êtes leur crainte.
49
Il y a des séparations qui sont comme des arbres foudroyés, comme des maisons qui flambent et dont le toit s'effondre et tue les habitants, il y a des séparations pleines de fracas, il y a des séparations qui sont comme des catastrophes, et il y a des séparations qui sont comme une dent usée dont la racine, invisible dans la gencive, s'érode, s'érode, comme une dent usée qui bouge, se détache progressivement, finit par ne tenir qu'à un bout de racine, qui un jour se détache sans qu'on puisse bien savoir pourquoi c'est aujourd'hui et pourquoi pas hier, et pourquoi pas demain.
50
Sur France-Inter ils croient
Les bienheureux connards
Que l'argot des ados
Verlan, mots inventés
Ça leur sert à parler
Sans que les parents pigent
Ce serait supposer
Espèces d'hypocrites
Que les adultes écoutent
Ce que disent les jeunes
51
Moi en ce moment ce qui m'intéresse au cinéma, dans les films de Bonitzer par exemple, ou bien ceux avec Luchini, c'est de voir les actrices interpréter des cruches, des potiches, des jolies gourdes, à la télé ce qui m'intéresse, en ce moment, c'est de voir des pubs sexistes avec de séduisantes actrices, ça me fascine, je pourrais passer des heures à regarder ça, je pourrais y passer des heures, à voir ça, à me demander à quoi pensent ces actrices quand elles jouent des connes, quand elles jouent des personnages qui sont tellement, tellement des fantasmes de vieux bourgeois de cinquante ans, à quoi pensent ces actrices quand elles incarnent les fantasmes de jeune femme charmante et conne, discrète, soumise, cultivée, que les réalisateurs mâles de cinquante ans mettent en scène sans vergogne, sans aucun sens du ridicule, à quoi pensent ces femmes qui se prêtent à ce jeu, c'est ça qui me fascine.
52
Ça c'est passé en cinq temps
Un
Nous avons oublié que nos enfants nous étaient en tous points supérieurs
Deux
Ils nous étaient soumis et nous les dominions
Trois
Mais nous avons voulu rétablir l'équilibre
Quatre
Nous avons découvert leur supériorité
D'abord avec surprise
Et puis ravissement
Maintenant nous flippons
Cinq
Oui nous avons peur d'eux
53
On est dans une civilisation qui méprise et craint l'adolescence. C'est significatif, je trouve. Les Grecs en train de crever méprisaient les Barbares. Les adultes dévorés par le cancer – et je parle pas de métastase qui grouille à travers la viande mais de cancer métaphysique, de cancer de l'âme – les adultes, qui érigent la rationalité, le compromis, la mesure, la tempérance en valeurs, tous ces synonymes de la mesquinerie, toutes ces nuances de la veulerie, raillent l'intransigeance, la naïveté, l'enthousiasme des adolescents. Qu'importe. Les Grecs ont terminé dans les livres d'Histoire et les Barbares ont prospéré. Ce qui meurt méprise ce qui vit, c'est un mouvement naturel, tandis que ce qui vit ignore purement et simplement ce qui meurt, ce qui vit assassine ce qui meurt en toute impunité et en toute inconscience.
54
Les bourgeois blancs hétéros ont fantasmé un monde ou les hommes n'auraient pas le devoir d'être beaux mais riches à la place, ni d'être intelligents mais d'être éduqués, pas besoin d'être en vie, il y a l'art pour ça ; les bourgeois blancs hétéros ont fantasmé un monde où ils seraient bourgeois et où ça suffirait, ils ont rêvé d'un monde où des filles très belles et très intelligentes se soumettraient à eux et nommeraient ça l'amour.
Ils l'ont construit ce monde. Oui, ils l'ont fabriqué. Vous ne sentez pas, dans les rues, dans les beaux quartiers des grandes villes, cette odeur de malaise ?
Re: "Un autre recueil", la suite, de Christophe Siébert
Le 49 est très juste. Le 50 m'a fait rire. Le 51 est encore une fois très juste, mais je pourrais le dire pour les suivants aussi. Donc, je l'ai dit et je n'ai plus rien à dire.
Une jolie volée.
Une jolie volée.
Re: "Un autre recueil", la suite, de Christophe Siébert
Très philosophique tout ça. Mais à la sauce Siébert.
Re: "Un autre recueil", la suite, de Christophe Siébert
Evidemment , mon coeur de féministe bat au rythme du 51 et du 54.
Bon, 2 fois que j'entends parler de ce bouquin par deux personnes à plusieurs mois d'intervalle.. Il faut que je le lise.
Ma fille s'avance doucement vers cet âge que l'on dit ingrat...j'espère ne pas trop merder.
Bon, 2 fois que j'entends parler de ce bouquin par deux personnes à plusieurs mois d'intervalle.. Il faut que je le lise.
Ma fille s'avance doucement vers cet âge que l'on dit ingrat...j'espère ne pas trop merder.
Ulysse- Écritoirien émérite
- Messages : 890
Date d'inscription : 18/05/2013
Age : 48
Localisation : Berlin
Re: "Un autre recueil", la suite, de Christophe Siébert
Merci pour votre lecture, Catherine, Zaroff et Ulysse.
Et je relance de six, avec au menu un jeu de dupes, l'insidieux sablier, un barbecue en banlieue, une putain de sonnerie et des gens qui n'existent pas. Heureusement, Eve Ruggieri.
55
Faire les choses avec ténacité
Faire les choses avec compétence
Faire la preuve de son talent
Faire les choses bien
Faire en sorte d'être un bon artisan
Contempler son travail
Contempler ses progrès
Et être fier de soi
***
Faire les choses avec ténacité
Faire les choses avec compétence
Faire la preuve de quelque chose mais sans trop savoir quoi
Faire les choses tantôt bien, tantôt mal
Savoir ce qu'il faut faire, ce qu'il ne faut pas faire
Savoir ce qu'on attend de soi et ne jamais le faire, devenir écrivain
Contempler son travail
Contempler son échec
Se demander pourquoi ça ne veut pas marcher, refuser de voir la réponse alors qu'elle s'étale plus grosse que l'échec
***
Ne pas jouer le jeu
S'étonner de ne pas le gagner
Se croire intelligent
56
Le délabrement
Est si progressif
Si lent
Qu'on ne le sent pas
Venir
La souffrance
Remplit
Par si petites touches
Jour après jour
Qu'on ne la sent pas
Venir
Et un beau jour
On est une ruine
Et un beau jour
On en est rempli
De cette douleur
Un beau jour
Ce corps
Ne marche plus
Du tout
Mais on n'a rien vu
Arriver
C'était si lent
Si progressif
On n'a rien vu
Venir
Et on ne souffre
Pas tant que ça
C'est exactement
Comme si on se noyait
En s'éloignant
Du bord
En pente
Si douce
Que pour avoir de l'eau
Jusqu'aux hanches
Il faut marcher
Deux bornes
57
D'un côté de la rue la résidence avec le saule pleureur, les jeux pour enfants, les bancs, le gazon bien taillé qui supporte tout ça
Les merdes de chien
Invisibles
Les insectes
Qu'on ne voit pas
Les oiseaux
Qu'on n'entend pas
De l'autre les pavillons alignés comme des bidasses un jour de fête, les haies à angle droit, les jardins bien taillés et dedans les barbeucs placés au même endroit et le désordre identique des jouets laissés là par Théo, Manon, et compagnie
Les deux faces
Pour moi
Du même
Cauchemar
58
J'ai le privilège
Immense
De me lever chaque matin à l'heure que je veux
Et vous
Êtes-vous
Une mouche
Forçant
Forçant
Pour s'a
Rracher
De la sonnerie mais c'est peine perdue toujours elle vous dévore ?
59
Ève Ruggieri
A des nichons
Délicieusement
Sixties
60
Lire la presse
Lire les magazines
Écouter la radio
Regarder la télé
C'est peu à peu se rendre à l'évidence que le monde, les gens, n'existent pas, n'ont jamais existé
Que tout est séparé
Restent les romans
Sur ces bonnes paroles, et ce dernier mot en particulier, je mets ce sujet en pause, car je n'ai plus de munitions pour l'entretenir. Mais je ne resterai pas longtemps sans vous reparler de Christophe. Alors à bientôt sur un autre topic, moins poétique celui-là. Vous êtes prévenus.
Et je relance de six, avec au menu un jeu de dupes, l'insidieux sablier, un barbecue en banlieue, une putain de sonnerie et des gens qui n'existent pas. Heureusement, Eve Ruggieri.
55
Faire les choses avec ténacité
Faire les choses avec compétence
Faire la preuve de son talent
Faire les choses bien
Faire en sorte d'être un bon artisan
Contempler son travail
Contempler ses progrès
Et être fier de soi
***
Faire les choses avec ténacité
Faire les choses avec compétence
Faire la preuve de quelque chose mais sans trop savoir quoi
Faire les choses tantôt bien, tantôt mal
Savoir ce qu'il faut faire, ce qu'il ne faut pas faire
Savoir ce qu'on attend de soi et ne jamais le faire, devenir écrivain
Contempler son travail
Contempler son échec
Se demander pourquoi ça ne veut pas marcher, refuser de voir la réponse alors qu'elle s'étale plus grosse que l'échec
***
Ne pas jouer le jeu
S'étonner de ne pas le gagner
Se croire intelligent
56
Le délabrement
Est si progressif
Si lent
Qu'on ne le sent pas
Venir
La souffrance
Remplit
Par si petites touches
Jour après jour
Qu'on ne la sent pas
Venir
Et un beau jour
On est une ruine
Et un beau jour
On en est rempli
De cette douleur
Un beau jour
Ce corps
Ne marche plus
Du tout
Mais on n'a rien vu
Arriver
C'était si lent
Si progressif
On n'a rien vu
Venir
Et on ne souffre
Pas tant que ça
C'est exactement
Comme si on se noyait
En s'éloignant
Du bord
En pente
Si douce
Que pour avoir de l'eau
Jusqu'aux hanches
Il faut marcher
Deux bornes
57
D'un côté de la rue la résidence avec le saule pleureur, les jeux pour enfants, les bancs, le gazon bien taillé qui supporte tout ça
Les merdes de chien
Invisibles
Les insectes
Qu'on ne voit pas
Les oiseaux
Qu'on n'entend pas
De l'autre les pavillons alignés comme des bidasses un jour de fête, les haies à angle droit, les jardins bien taillés et dedans les barbeucs placés au même endroit et le désordre identique des jouets laissés là par Théo, Manon, et compagnie
Les deux faces
Pour moi
Du même
Cauchemar
58
J'ai le privilège
Immense
De me lever chaque matin à l'heure que je veux
Et vous
Êtes-vous
Une mouche
Forçant
Forçant
Pour s'a
Rracher
De la sonnerie mais c'est peine perdue toujours elle vous dévore ?
59
Ève Ruggieri
A des nichons
Délicieusement
Sixties
60
Lire la presse
Lire les magazines
Écouter la radio
Regarder la télé
C'est peu à peu se rendre à l'évidence que le monde, les gens, n'existent pas, n'ont jamais existé
Que tout est séparé
Restent les romans
Sur ces bonnes paroles, et ce dernier mot en particulier, je mets ce sujet en pause, car je n'ai plus de munitions pour l'entretenir. Mais je ne resterai pas longtemps sans vous reparler de Christophe. Alors à bientôt sur un autre topic, moins poétique celui-là. Vous êtes prévenus.
Re: "Un autre recueil", la suite, de Christophe Siébert
55, trois façons de voir, trois façons de faire.
56, j'aime bien celui-là, il me parle.
57, oui deux mêmes cauchemars, mais que ce soit une résidence ou des pavillons, la populace est la même. Au final, je ne trouve pas que ce soit deux faces, mais une seule.
58, étonnant. La sonnerie c'est juste une chierie alors que toi t'as juste encore envie de dormir.
59, no comment lol !
60, j'aime bien, ça me fait penser un peu à une grande réflexion philosophique que j'ai couchée sur le papier il y a deux trois jours.
56, j'aime bien celui-là, il me parle.
57, oui deux mêmes cauchemars, mais que ce soit une résidence ou des pavillons, la populace est la même. Au final, je ne trouve pas que ce soit deux faces, mais une seule.
58, étonnant. La sonnerie c'est juste une chierie alors que toi t'as juste encore envie de dormir.
59, no comment lol !
60, j'aime bien, ça me fait penser un peu à une grande réflexion philosophique que j'ai couchée sur le papier il y a deux trois jours.
Re: "Un autre recueil", la suite, de Christophe Siébert
Je dois avouer que cette fournée me parle moins que les autres (pour lesquelles j'ai rien dit, mais ça veut pas dire que je les lis pas). Mais je suis d'accord avec Catherine sur le 56 et le 57. Pour le 60, en revanche, je crois que j'aurais besoin d'explications, parce qu'en l'état, avec ce que je comprends, je suis pas d'accord.
Naëlle- — — Madone des Ombres — — Disciple de la Discipline
- Messages : 3668
Date d'inscription : 29/11/2012
Age : 33
Localisation : Sur la Lune
Page 2 sur 2 • 1, 2
Sujets similaires
» "Un autre recueil", de Christophe Siébert
» "Holocauste" de Christophe Siebert
» PARANOIA de Christophe Siébert
» Holocauste, de Christophe Siébert
» "Sexe connection" de Christophe Siebert
» "Holocauste" de Christophe Siebert
» PARANOIA de Christophe Siébert
» Holocauste, de Christophe Siébert
» "Sexe connection" de Christophe Siebert
Page 2 sur 2
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum