Sous un aulne
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FRançoise GRDR
Perroccina
Cancereugène
Tak
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Sous un aulne
Bon, c'est pas grand-chose, mais comme je n'ai rien écrit depuis des mois et que je me sens un peu rouillé, je reviens aux affaires avec un petit atelier.
Ceci dit, je n'ai jamais été très fort pour les scènes d'amour, alors je me suis un peu inspiré de mon vécu A vous de me dire si ça se laisse lire ou pas...
____________
Ce jour-là, le programme était qu'elle me fasse découvrir un sentier de randonnée au départ d'une magnifique vallée glaciaire.
Le soleil estival était au rendez-vous et la rivière coulait au milieu, apportant au cadre sa délicieuse note chantante. La journée s'annonçait exceptionnelle. Mais au final, nous nous retrouvâmes tous les deux à nous bécoter sur un coin de gazon, sur le talus herbeux descendant vers la rive. Après quelques pas, nous avions plutôt décidé de nous coller sur une couverture et de profiter du paysage en attendant l'heure du déjeuner.
Comme souvent aux premiers jours d'une relation, nous pouvions passer des heures entières à nous embrasser. A nous découvrir mutuellement sous la tendresse des caresses. Et à chaque fois je m'enivrais de ces échange à en perdre la tête, à en oublier où et qui j'étais. Son haleine chaude et épicée, cet arrière-goût de fruits rouges et de noisette... Et dire qu'elle m'avait choisi, moi, petit geek insignifiant du trou-du-cul de la campagne Yonnaise. Comment était-ce possible ? Je m'en extasiais encore une fois tout en l'embrassant, porté par un sentiment de privilège et de plénitude. Tout était là à sa place. J'étais dans les bras de celle que j'aimais et tout participait à l'unicité de ce moment. La légère brise dans ses cheveux, la température idéale - si nous étions seuls, peut-être aurais-je pu la dénuder couche par couche, sans que l'on y trouve à y redire - les paillettes dorées du soleil filtrant par les frondaisons, au-dessus de nos têtes. Ma femme. Le babil cristallin de l'eau. Son corps enlacé contre le mien. Elle. Toujours elle.
Un moment, porté par ma fougue, mes mains descendirent le long de ses hanches dans un mouvement plus appuyé. Avec douceur, elle se dégagea puis me sourit.
-- Allons doudou, tu sais bien qu'il peut y avoir des gens, fit-elle indiquant du menton le parking à quelques dizaines de mètres plus haut.
-- Mouais, ils vont pas venir nous traquer non plus dans les fourrés, marmonnais-je un peu dépité.
Elle pouffa sans méchanceté, me colla un baiser au coin des lèvres puis vint se lover entre mes jambes ouvertes, son dos contre mon buste. J'enroulais mes bras autour de sa taille et me laissa aller à mon tour dans un soupir de contentement.
-- Tu nous imagines comment dans une dizaine d'années... ? me demanda-t-elle après quelques instants de silence.
Le cours d'eau dévalait en nous murmurant sa mélodie venue des glaciers.
La question du "où cette relation nous conduit-elle ?" ne s'était même pas posée. Nous voulions vivre ensemble et partager nos vies, notre quotidien. Je connaissais certains aspects déplaisants de sa personnalité, comme elle connaissait également mes propres travers. Nous savions ce que nous avions à nous offrir de meilleur comme de pire.
-- Je t'imagines en mode super instit' avec le chignon et les lunettes de maman, l'air sévère. Moi, je serais devenu milliardaire après la parution de mon premier roman, futur best-seller en devenir.
Elle râla en se débattant légèrement dans mes bras. Je souris en imaginant sa grimace.
-- Sérieusement, doudou...
-- Eh bien, je nous vois toujours ici, dans les montagnes, à contempler les cimes et peut-être avec un ou deux (ou trois) enfants sous le bras. Peut-être avec quelques kilos en plus, mais toujours amoureux. Tu y crois, toi ?
Elle se retourna et quelque chose dans son regard brillait.
-- Je croirais tout ce que tu veux, du moment que tu restes avec moi d'ici là.
-- A ton avis ? Je t'aime, chérie.
-- Moi aussi je t'aime, fit-elle m'embrassant une nouvelle fois.
Puis elle se cala à nouveau entre mes jambes.
Je gravais la perfection du moment dans ma mémoire : le soleil sur ma peau, les couleurs, le chuchotis des feuillages sous la brise légère, la rivière et ses reflets. Tout était parfait, authentique, à sa place. Au bon endroit. La nature, nous deux ; l'amour, la vie.
Nous gardâmes ainsi le silence quelques minutes, à nous abreuver de ce spectacle, de nos propres sensations. Enfin, le bruit d'un moteur en approche brisa la magie de l'instant et elle se leva d'un mouvement souple en imitant les gargouillis d'un diable de Tasmanie. J'éclatai de rire. Elle avait le don pour passer du registre sentimental à la trivialité la plus élémentaire en un claquement de doigts.
-- J'ai la dalle doudou, on se casse une petite croûte ?
-- Bien sûr, dis-je en me levant à mon tour, passant une main possessive autour de ses hanches. Seulement on s'attardera pas trop après... se rouler dans les herbes m'a donné des envies qui ne sauraient être assouvies en public.
Elle me lança un clin d’œil complice sans en dire plus.
Avant de remonter la pente, je lançai toutefois un ultime regard à l'aulne sous lequel nous avions posé la couverture. Je gravais chaque détail dans mes circuits mémoriels. Rien d'exceptionnel en soi : un joli coin, un jeune couple. Mais ici, nous nous étions aimé et projeté cet amour dans notre avenir commun, avec simplicité et naturel. Rien de plus, ni rien de moins.
Ce décor et cette journée restèrent ancrés en moi et j'en emportais le souvenir avec moi, lorsque que des années plus tard, devant l'élu de la mairie je lui dis "oui".
Ceci dit, je n'ai jamais été très fort pour les scènes d'amour, alors je me suis un peu inspiré de mon vécu A vous de me dire si ça se laisse lire ou pas...
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Ce jour-là, le programme était qu'elle me fasse découvrir un sentier de randonnée au départ d'une magnifique vallée glaciaire.
Le soleil estival était au rendez-vous et la rivière coulait au milieu, apportant au cadre sa délicieuse note chantante. La journée s'annonçait exceptionnelle. Mais au final, nous nous retrouvâmes tous les deux à nous bécoter sur un coin de gazon, sur le talus herbeux descendant vers la rive. Après quelques pas, nous avions plutôt décidé de nous coller sur une couverture et de profiter du paysage en attendant l'heure du déjeuner.
Comme souvent aux premiers jours d'une relation, nous pouvions passer des heures entières à nous embrasser. A nous découvrir mutuellement sous la tendresse des caresses. Et à chaque fois je m'enivrais de ces échange à en perdre la tête, à en oublier où et qui j'étais. Son haleine chaude et épicée, cet arrière-goût de fruits rouges et de noisette... Et dire qu'elle m'avait choisi, moi, petit geek insignifiant du trou-du-cul de la campagne Yonnaise. Comment était-ce possible ? Je m'en extasiais encore une fois tout en l'embrassant, porté par un sentiment de privilège et de plénitude. Tout était là à sa place. J'étais dans les bras de celle que j'aimais et tout participait à l'unicité de ce moment. La légère brise dans ses cheveux, la température idéale - si nous étions seuls, peut-être aurais-je pu la dénuder couche par couche, sans que l'on y trouve à y redire - les paillettes dorées du soleil filtrant par les frondaisons, au-dessus de nos têtes. Ma femme. Le babil cristallin de l'eau. Son corps enlacé contre le mien. Elle. Toujours elle.
Un moment, porté par ma fougue, mes mains descendirent le long de ses hanches dans un mouvement plus appuyé. Avec douceur, elle se dégagea puis me sourit.
-- Allons doudou, tu sais bien qu'il peut y avoir des gens, fit-elle indiquant du menton le parking à quelques dizaines de mètres plus haut.
-- Mouais, ils vont pas venir nous traquer non plus dans les fourrés, marmonnais-je un peu dépité.
Elle pouffa sans méchanceté, me colla un baiser au coin des lèvres puis vint se lover entre mes jambes ouvertes, son dos contre mon buste. J'enroulais mes bras autour de sa taille et me laissa aller à mon tour dans un soupir de contentement.
-- Tu nous imagines comment dans une dizaine d'années... ? me demanda-t-elle après quelques instants de silence.
Le cours d'eau dévalait en nous murmurant sa mélodie venue des glaciers.
La question du "où cette relation nous conduit-elle ?" ne s'était même pas posée. Nous voulions vivre ensemble et partager nos vies, notre quotidien. Je connaissais certains aspects déplaisants de sa personnalité, comme elle connaissait également mes propres travers. Nous savions ce que nous avions à nous offrir de meilleur comme de pire.
-- Je t'imagines en mode super instit' avec le chignon et les lunettes de maman, l'air sévère. Moi, je serais devenu milliardaire après la parution de mon premier roman, futur best-seller en devenir.
Elle râla en se débattant légèrement dans mes bras. Je souris en imaginant sa grimace.
-- Sérieusement, doudou...
-- Eh bien, je nous vois toujours ici, dans les montagnes, à contempler les cimes et peut-être avec un ou deux (ou trois) enfants sous le bras. Peut-être avec quelques kilos en plus, mais toujours amoureux. Tu y crois, toi ?
Elle se retourna et quelque chose dans son regard brillait.
-- Je croirais tout ce que tu veux, du moment que tu restes avec moi d'ici là.
-- A ton avis ? Je t'aime, chérie.
-- Moi aussi je t'aime, fit-elle m'embrassant une nouvelle fois.
Puis elle se cala à nouveau entre mes jambes.
Je gravais la perfection du moment dans ma mémoire : le soleil sur ma peau, les couleurs, le chuchotis des feuillages sous la brise légère, la rivière et ses reflets. Tout était parfait, authentique, à sa place. Au bon endroit. La nature, nous deux ; l'amour, la vie.
Nous gardâmes ainsi le silence quelques minutes, à nous abreuver de ce spectacle, de nos propres sensations. Enfin, le bruit d'un moteur en approche brisa la magie de l'instant et elle se leva d'un mouvement souple en imitant les gargouillis d'un diable de Tasmanie. J'éclatai de rire. Elle avait le don pour passer du registre sentimental à la trivialité la plus élémentaire en un claquement de doigts.
-- J'ai la dalle doudou, on se casse une petite croûte ?
-- Bien sûr, dis-je en me levant à mon tour, passant une main possessive autour de ses hanches. Seulement on s'attardera pas trop après... se rouler dans les herbes m'a donné des envies qui ne sauraient être assouvies en public.
Elle me lança un clin d’œil complice sans en dire plus.
Avant de remonter la pente, je lançai toutefois un ultime regard à l'aulne sous lequel nous avions posé la couverture. Je gravais chaque détail dans mes circuits mémoriels. Rien d'exceptionnel en soi : un joli coin, un jeune couple. Mais ici, nous nous étions aimé et projeté cet amour dans notre avenir commun, avec simplicité et naturel. Rien de plus, ni rien de moins.
Ce décor et cette journée restèrent ancrés en moi et j'en emportais le souvenir avec moi, lorsque que des années plus tard, devant l'élu de la mairie je lui dis "oui".
Dernière édition par Tak le Dim 5 Fév 2017 - 9:37, édité 1 fois
Tak- Mélomane des Ondes Noires
Disciple des Livres de Sang - Messages : 6299
Date d'inscription : 01/12/2012
Age : 42
Localisation : Briançon, Hautes-Alpes
Re: Sous un aulne
Après avoir lu 3 nouvelles dans Moisson d’épouvante 3 j'enchaîne avec cette petite bluette, le contraste est saisissant !
Je parle bien sûr du genre proposé !
En tout cas, pour un retour, tu as bien soigné ton texte. Rien ne m'a paru saillant. Il y a bien quelques répétitions mais rien de gênant à la lecture. Ton histoire est tout à fait dans le thème, sans doute l'une des plus conformes, d'ailleurs.
Je parle bien sûr du genre proposé !
En tout cas, pour un retour, tu as bien soigné ton texte. Rien ne m'a paru saillant. Il y a bien quelques répétitions mais rien de gênant à la lecture. Ton histoire est tout à fait dans le thème, sans doute l'une des plus conformes, d'ailleurs.
Re: Sous un aulne
Très belle réussite pile poil dans le thème de l'atelier. Bien écrit, une ou deux étourderies mais rien de bien méchant.c'est avant tout un texte qui nous plonge bien dans l'ambiance. Très romantique et très agréable à lire.
Comme quoi même Hulk au féminin peut être sensible au romantisme.
Comme quoi même Hulk au féminin peut être sensible au romantisme.
Perroccina- — — — — E.T à moto — — — — Disciple asimovienne
- Messages : 4109
Date d'inscription : 26/12/2012
Age : 59
Localisation : Béarn
Re: Sous un aulne
Bah merci à vous pour votre lecture et vos jolis commentaires.
Concernant les étourderies et les répétitions, je plaide coupable : j'ai écrit et posté ce texte "en direct", sans trop de relectures, pour garder intacte mon et mon impression de base. Comme je disais, je ne suis pas très doué pour le romantisme, mais j'ai essayé d'y donner le ton qui collait le plus à mes sentiments et souvenirs.
Heureux que ça vous aie plu.
Concernant les étourderies et les répétitions, je plaide coupable : j'ai écrit et posté ce texte "en direct", sans trop de relectures, pour garder intacte mon et mon impression de base. Comme je disais, je ne suis pas très doué pour le romantisme, mais j'ai essayé d'y donner le ton qui collait le plus à mes sentiments et souvenirs.
Heureux que ça vous aie plu.
Tak- Mélomane des Ondes Noires
Disciple des Livres de Sang - Messages : 6299
Date d'inscription : 01/12/2012
Age : 42
Localisation : Briançon, Hautes-Alpes
Re: Sous un aulne
Très joli texte plein de douceur et d'amour. Rien à dire, c'est du bon. Atelier amplement validé.
Re: Sous un aulne
Une ou deux boulettes, mais dans l'ensemble, je résumerais mon opinion en disant :
"C'est Crop Meugnon !"
Beau travail, donc !
"C'est Crop Meugnon !"
Beau travail, donc !
K²- — Kmarade Carré — Rassembleur de points perdus
- Messages : 1307
Date d'inscription : 27/03/2014
Age : 41
Localisation : Montarroi
Re: Sous un aulne
Merci à vous deux.
Ben ouais, faut croire que je dois avoir un petit côté fleur bleue...
Ben ouais, faut croire que je dois avoir un petit côté fleur bleue...
Tak- Mélomane des Ondes Noires
Disciple des Livres de Sang - Messages : 6299
Date d'inscription : 01/12/2012
Age : 42
Localisation : Briançon, Hautes-Alpes
Re: Sous un aulne
Bon, je viens de faire lire mon texte à ma femme et elle approuvé (malgré quelques remarques sur le style : c'est une lectrice très exigeante). Ce qui me fait penser que ce petit machin a bien réussi son test, à la fois sur le fond et la forme.
Prochaine étape : écrire un texte trash (pas évident pour moi) et le lui faire lire
Prochaine étape : écrire un texte trash (pas évident pour moi) et le lui faire lire
Tak- Mélomane des Ondes Noires
Disciple des Livres de Sang - Messages : 6299
Date d'inscription : 01/12/2012
Age : 42
Localisation : Briançon, Hautes-Alpes
Re: Sous un aulne
C'est meeeeugnoooon ! tak tak n'aura pas lieu sous l'aulne ah ah. Par contre, dans le monde réel, vous parlez vraiment avec cette classe littéraire (de certains passages)? ^^ Elle aurait dû te dire "tak" devant le maire, c'est du polonais xD
Pour les coquilles :
filtrant par (filtrée par ? je tique sur ta formulation)
marmonnai(s)-je
J'enroulai(s) mes bras autour de sa taille et me laiss(a)
je gravai(s)
nous nous étions aimé(s) et projeté(s)
Pour les coquilles :
filtrant par (filtrée par ? je tique sur ta formulation)
marmonnai(s)-je
J'enroulai(s) mes bras autour de sa taille et me laiss(a)
je gravai(s)
nous nous étions aimé(s) et projeté(s)
Re: Sous un aulne
Romantique, sans être gnangnan, une vraie scène d'amour réaliste et qui surtout sonne juste, c'est beau. En plus, ça colle parfaitement à l'exercice. J'ai aimé.
Sacripan- Écritoirien émasculé
- Messages : 353
Date d'inscription : 03/10/2020
Age : 43
Re: Sous un aulne
Ah tiens, une vieillerie exhumée !
Merci à toi Sacripan, ravi que ça t'aies plu. C'est vrai que la scène d'amour est un exercice déjà casse-gueule en soi, mais encore plus pour les amoureux de tripailles sanguinolentes que nous sommes, qui n'écrivent en général pas du tout dans ce registre. Un atelier intéressant, mais plus ardu qu'il n'y paraît... (j'irais lire le tien sous peu, of course).
Merci à toi Sacripan, ravi que ça t'aies plu. C'est vrai que la scène d'amour est un exercice déjà casse-gueule en soi, mais encore plus pour les amoureux de tripailles sanguinolentes que nous sommes, qui n'écrivent en général pas du tout dans ce registre. Un atelier intéressant, mais plus ardu qu'il n'y paraît... (j'irais lire le tien sous peu, of course).
Tak- Mélomane des Ondes Noires
Disciple des Livres de Sang - Messages : 6299
Date d'inscription : 01/12/2012
Age : 42
Localisation : Briançon, Hautes-Alpes
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