Les barbelés de l'enfer
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Re: Les barbelés de l'enfer
Blahom
merci pour ta lecture. J'aime bien le genre fantastique mais je m'y prends mal assurément.
Tant mieux pour le concours puisque cette version ne participe pas.
D'un côté on me dit de développer, de l'autre on me dit de ne pas expliciter, les avis divergent... Bref, je rends les armes (mdr). A trop modifier, le texte perd en authenticité.
merci pour ta lecture. J'aime bien le genre fantastique mais je m'y prends mal assurément.
Tant mieux pour le concours puisque cette version ne participe pas.
D'un côté on me dit de développer, de l'autre on me dit de ne pas expliciter, les avis divergent... Bref, je rends les armes (mdr). A trop modifier, le texte perd en authenticité.
Re: Les barbelés de l'enfer
Du coup, j'arrive un peu tard
C'est dommage d'abandonner même si je comprends très bien cette tentation. Je pense que chacun à sa propre idée du fantastique, entre tout dire ou ne rien révéler (personnellement, mes préférences se font au cas par cas), et que c'est à toi de choisir quelle idée est la tienne. Jamais une même histoire ne satisfera le monde entier, de toute façon, c'est à toi de voir à quels commentaires t'adhèrent ou non. On est ici pour échanger des avis, ne pas être d'accord avec certains d'entre eux est inévitable. Mais au final, ça reste l'auteur qui décide et ce n'est pas parce qu'il a suivi des conseils qu'il a trouvé justes que l'histoire est moins la sienne ou moins authentique. M'enfin, ça peut se comprendre aussi si tu veux passer à d'autres écrits et laisser celui-là tel quel. Les commentaires qui ont été faits dessus peuvent toujours te servir pour tes prochains textes.
Bref. Je mets un tout petit avis supplémentaire malgré tout :
- En tant que non fan des histoires de guerre, j'ai préféré cette version qui s'attache plus aux veuves qu'elle a laissée qu'aux hommes qu'elle a prise.
- Je n'ai pas trop compris ce que venait faire un démon ici par contre.
- Je trouve l'idée de la lettre très bonne, surtout son début où on peut s'imaginer soit qu'il parle de l'Enfer avec démon et compagnie soit de l'enfer de la guerre en tant que vivant.
- Du coup, j'aurais adoré que la lettre reste à double sens jusqu'au bout. Pas dans le sens "on n'explique rien ou on explique tout". Mais dans le sens "on peut comprendre qu'un fantôme en enfer a envoyé une lettre autant qu'on peut comprendre qu'un homme en guerre a fait une lettre avant sa mort, lettre arrivée à destination 1 an trop tard" et laisser chacun choisir sa préférence dans sa tête.
C'est dommage d'abandonner même si je comprends très bien cette tentation. Je pense que chacun à sa propre idée du fantastique, entre tout dire ou ne rien révéler (personnellement, mes préférences se font au cas par cas), et que c'est à toi de choisir quelle idée est la tienne. Jamais une même histoire ne satisfera le monde entier, de toute façon, c'est à toi de voir à quels commentaires t'adhèrent ou non. On est ici pour échanger des avis, ne pas être d'accord avec certains d'entre eux est inévitable. Mais au final, ça reste l'auteur qui décide et ce n'est pas parce qu'il a suivi des conseils qu'il a trouvé justes que l'histoire est moins la sienne ou moins authentique. M'enfin, ça peut se comprendre aussi si tu veux passer à d'autres écrits et laisser celui-là tel quel. Les commentaires qui ont été faits dessus peuvent toujours te servir pour tes prochains textes.
Bref. Je mets un tout petit avis supplémentaire malgré tout :
- En tant que non fan des histoires de guerre, j'ai préféré cette version qui s'attache plus aux veuves qu'elle a laissée qu'aux hommes qu'elle a prise.
- Je n'ai pas trop compris ce que venait faire un démon ici par contre.
- Je trouve l'idée de la lettre très bonne, surtout son début où on peut s'imaginer soit qu'il parle de l'Enfer avec démon et compagnie soit de l'enfer de la guerre en tant que vivant.
- Du coup, j'aurais adoré que la lettre reste à double sens jusqu'au bout. Pas dans le sens "on n'explique rien ou on explique tout". Mais dans le sens "on peut comprendre qu'un fantôme en enfer a envoyé une lettre autant qu'on peut comprendre qu'un homme en guerre a fait une lettre avant sa mort, lettre arrivée à destination 1 an trop tard" et laisser chacun choisir sa préférence dans sa tête.
Re: Les barbelés de l'enfer
voici le texte revu et corrigé une dernière fois (fin remaniée). Il ne participe pas au concours et figure dans la bonne rubrique.
Re: Les barbelés de l'enfer
Je commence par un petit détail avant de l'oublier :
"Son corps est inhumé à la hâte le long d’un chemin qui se perd dans la plaine dévastée." / "Un an se passe sans que l’on ait retrouvé les restes de Louis." Du coup, on a retrouvé son corps ou pas ? C'est un peu confus de mon côté ; peut-être une "faute de reécriture" ?
Sinon, je ne peux évidemment qu'aimer la nouvelle lettre, étant donné que j'ai justement dit que j'aurais adoré qu'elle soit ainsi. Après, vu que j'ai déjà lu les 2 versions précédentes, j'ai peut-être moins de recul sur la chose qu'un autre, mais je trouve le double sens très bien géré. J'aurais pas mieux fait sur l'ambiguïté de ces lignes. C'est d'ailleurs très poétique avec l'image final d'un spectre qui erre entre les tombes de la guerre (enfin, pour ceux qui veulent le comprendre dans ce sens, comme moi).
C'est aussi une bonne chose de conclure par quelques lignes, pas plus, après la lettre. Un peu comme la veuve, c'est à chacun de se décider sur ce qu'elle veut vraiment dire.
Du coup, c'est sans surprise que cette version est ma préférée. C'est aussi sympa de voir que t'as pas baissé les bras finalement .
"Son corps est inhumé à la hâte le long d’un chemin qui se perd dans la plaine dévastée." / "Un an se passe sans que l’on ait retrouvé les restes de Louis." Du coup, on a retrouvé son corps ou pas ? C'est un peu confus de mon côté ; peut-être une "faute de reécriture" ?
Sinon, je ne peux évidemment qu'aimer la nouvelle lettre, étant donné que j'ai justement dit que j'aurais adoré qu'elle soit ainsi. Après, vu que j'ai déjà lu les 2 versions précédentes, j'ai peut-être moins de recul sur la chose qu'un autre, mais je trouve le double sens très bien géré. J'aurais pas mieux fait sur l'ambiguïté de ces lignes. C'est d'ailleurs très poétique avec l'image final d'un spectre qui erre entre les tombes de la guerre (enfin, pour ceux qui veulent le comprendre dans ce sens, comme moi).
C'est aussi une bonne chose de conclure par quelques lignes, pas plus, après la lettre. Un peu comme la veuve, c'est à chacun de se décider sur ce qu'elle veut vraiment dire.
Du coup, c'est sans surprise que cette version est ma préférée. C'est aussi sympa de voir que t'as pas baissé les bras finalement .
Re: Les barbelés de l'enfer
anouk a écrit:voici le texte revu et corrigé une dernière fois (fin remaniée). Il ne participe pas au concours et figure dans la bonne rubrique.
Je préfère de loin cette version que je trouve plus mystérieuse et par conséquent plus efficace.
Petite remarque pratique, je trouve dommage que tu édites ton texte au lieu de reposter la nouvelle version. Quelqu'un qui prendrait la discussion avec un peu de retard , ne comprendrait rien aux premiers commentaires parlant de démon. Et puis je ne sais pas , je dois avoir un côté maîtresse d'école car je trouve plus "pédagogique" d'avoir la possibilité de lire les 2 versions.
Ulysse- Écritoirien émérite
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Re: Les barbelés de l'enfer
C'est gentil Ulysse mais je ne veux pas envahir trop le forum e t comme je suis très directe et trop tout ou rien, j'ai écrasé mes versions diverses et variées pour m'en tenir à l'ultime et bonne version (mdr). Ainsi je ne me fais pas de pub ... Mais pour les com on peut peut-être faire du nettoyage par le vide (admin)
merci pour ton appréciation. Moi aussi je préfère cette dernière écriture.
merci pour ton appréciation. Moi aussi je préfère cette dernière écriture.
Re: Les barbelés de l'enfer
Bon j'ai fait des corrections concernant la disparition de Louis, j'élude en disant qu'il a servi de cible à un tireur d'élite. Ainsi le doute sur sa mort est mis et j'ai supprimé le passage où son corps était placé avec d'autre dans une fosse commune. Puis ici et là des petits ajouts et le changement du dernier paragraphe sur le mental de Léonie.
voici la dernière version (j'espère à moins que vous ne trouviez à redire ... lol)
Le jour tant redouté finit par arriver. Le train est déjà là, crachant sa fumée noire. Il emmène plusieurs centaines de jeunes gens à la guerre. On dit que cela ne durera pas et qu’à Noël ils seront rentrés chez eux. Dans le hall de la gare centrale, l’émotion est infinie. Chacun fait de son mieux pour retenir ses larmes et encourager les fils ou les maris. Bien souvent, les mots d’amour demeurent inexprimés. Les banalités masquent la détresse des familles. Les mains se cherchent, fébriles et avides.
Assis sur son baluchon dans le couloir bondé d’hommes en uniforme, Louis sourit en pensant à son petit garçon, pas plus haut que trois pommes, mais si téméraire déjà. Léonie, sa femme, se plait à répéter qu’il ira loin, le petit. Elle, il l’adore. Seulement, il ne sait pas comment le lui dire. Alors, il l’embrasse dans le cou, là où les petits cheveux frisottent. Elle sent bon la violette. C’est le parfum de sa poudre de riz. Il ferme les yeux pour mieux garder en lui ces images odorantes. Le poudrier est violet. Il est toujours à la même place dans l’armoire de toilette. Il revoit ses gestes délicats pour manier la houppette. ses bras ronds, sa nuque gracile et la lumière de ses yeux. Il a envie de pleurer. La promiscuité l’en empêche. Il se réfugie dans un sommeil agité, bringuebalé par les cahots du train. Dans le fond du compartiment, un chant naît. C’est un chant patriotique. Un chant de combattant fier de défendre son pays en guerre.
Là-bas, sur le front ouest, les poilus ne pensent qu’à survivre, au jour le jour, dans des conditions extrêmes. Chaque minute peut être la dernière. Les tranchées ennemies se font face, avec des positions avancées ou en retrait selon les victoires et défaites des belligérants. On meurt pour conquérir quelques mètres de cette terre fertile, meurtrie par la mitraille, hérissée de barbelés aux pointes acérées. Les gaz, les balles, les obus de toutes sortes, les corps à corps, les guet-apens, les fusillades pour l’exemple font partie du quotidien. Sur le terrain détrempé, alors que les soldats, au coup de sifflet, montent au feu, les officiers hurlent des ordres étouffés par le tintamarre des obus, des mitrailleuses, de la fureur des éléments, des râles humains, des cris de souffrance. Une sorte de frénésie, à demi-comateuse, procurée par la mauvaise gnole bue au goulot, s'empare de chaque homme. Il faut éviter les projectiles meurtriers, ne pas tomber dans les gouffres de l'enfer provoqués par les tirs d'obus. La mort rôde. Les croix de bois plantées sur les tombes précaires sont innombrables. Les emplacements finissent par manquer. On creuse plus profondément pour empiler les cadavres, aussi bien français qu’allemands. Les bois croisés s’inclinent, sous la poussée du vent, charriant avec lui une odeur putride.
Le 11 novembre 1916, peu de temps avant la fin de la bataille de la Somme, Louis est la cible d’un tireur isolé, à proximité du poste d’observation qu’il doit occuper. Presque simultanément, Léonie met au monde un autre petit gars et lui donne le prénom de son père. A l’annonce officielle de la disparition de son mari – on n’a pu retrouver son corps elle demeure muette et pétrifiée sur le seuil de sa modeste maison, vacillante de douleur. Une étreinte glacée lui serre la poitrine, elle cherche sa respiration, quelque chose d’inconcevable s’abat sur elle.
Des bras vigoureux l’ont portée jusqu’au sofa du salon. Quelqu’un lui fait boire une gorgée de vin rouge, celui qu’elle sert lors d’une visite, l’après-midi avec des gaufrettes. La coutume du nord traverse les siècles. Léonie est de Roubaix et Louis d’Amiens. Elle l’a rejoint dans la Somme. Avant elle travaillait dans les filatures. Lui, il était contremaître dans une usine métallurgique. La perspective d’un emploi qui l’obligerait à donner ses enfants en nourrice l’effraie. Elle reprend des couleurs, a le souci de paraître digne dans le malheur. Une simple cérémonie aura lieu à la mémoire de Louis. Le deuil est d'autant plus difficile à vivre qu'on ne peut se recueillir sur une tombe. Les condoléances sont tristes à pleurer.
Chacun voudrait changer les évènements et rendre le bonheur aux familles éprouvées. La guerre se prolonge, l’hécatombe s’intensifie, le chiffre des soldats tués ou disparus ne cesse d’augmenter. Jamais un conflit armé n’a été aussi sanglant, féroce, sans merci. La mort ne choisit pas sa proie, elle ne tient compte d’aucune circonstance atténuante pour exécuter sa lugubre besogne. La vie que Léonie vient de donner à un nouveau petit être lui apparaît soudain comme un signe du destin. N’y aurait-il pas une corrélation entre les décès et les naissances ? Léonie survit comme beaucoup de femmes. Elle trouve une place à l’usine, confie ses petits à une voisine.
Avant d’aller chercher les enfants chez la voisine, elle s’assied dans la petite cuisine et pose le courrier sur la table. Un café à la chaussette auquel elle a ajouté une cuiller de chicorée, la réchauffera. Après avoir bu quelques gorgées brûlantes du breuvage et trempé un carré de sucre roux qu’elle laisse fondre dans la bouche, elle ouvre soigneusement l’enveloppe. Un cri lui échappe. Elle reconnaît l’écriture. C’est celle de Louis. Ses petites lettres bien formées, son encre violette, cette manière bien à lui de tracer la lettre « t » avec une grande barre bien appuyée. Il n’y a aucune indication de date et de lieu. Le papier tremble entre ses mains rougies par la bise de novembre. En tout cas, cela fait tout juste un an. Déjà ! Le temps assombri par les mauvais jours, cette guerre qui se prolonge sans l’espoir d’une reddition, l’affliction dans laquelle la disparition de Louis l’a plongée, ses journées surchargées, les enfants dont il faut s’occuper matin et soir, elle n’a pas vu les mois défiler.
D’une voix tremblante, elle lit lentement la lettre de Louis.
« Ma chère Léonie,
Que penseras-tu quand tu recevras cette lettre de moi ? J’avoue avoir hésité avant de t’écrire. Mais, là où je suis, j’ai tellement besoin de ton amour. Il fait très froid ici. Je suis en permanence transpercé jusqu’aux os. Enfin je dirais plutôt que j’ai cette sensation. Mais c’est mon âme qui souffre.
Depuis le belvédère d'où je contemple la vallée, je songe à ma vie passée. Tu es toujours ma femme chérie mais je t'en prie, accepte que je ne sois plus à tes côtés au quotidien. Je ne peux t'expliquer les tourments que j'endure, la torture morale et physique de mon enfer personnel. J'erre ici et là, livré à moi-même, condamné à la solitude et au secret.
Ce coup du sort est terrible pour nous deux. Je veille sur toi du mieux que je peux. Ne reste pas seule, trouve un bon compagnon et ne m'attends pas. Tu dois te demander dans quel pétrin je me suis mis pour t'abandonner ainsi avec mes enfants. Sache que cela ne dépend pas entièrement de mon bon vouloir.
J'essaie d'oublier l'horreur de la guerre qui a fait de moi ce que je suis maintenant. Je ne peux te révéler la nature de mon existence actuelle et qui, je le crains, risque d'être infiniment complexe et incroyable.
Moi-même, au détour d'un chemin balisé de croix de bois, je suis en quête de mon identité. Le sort qui s'acharne sur moi ne me rend pas amer. Ce n'est que justice. Sache que mon amour vous accompagne, toi et les enfants. Louis."
Léonie replie la lettre avec soin et la range dans une boite à biscuits. Elle regarde par la fenêtre. Tout semble paisible aux alentours. Il est tard. Elle se rhabille pour aller chercher les enfants. Elle se coiffe en pensant à autre chose. Puis d’un geste machinal, elle prend la houppette et se poudre le visage. Le parfum de violette se répand aussitôt. Alors seulement une larme coule sur sa joue pâle.
. FIN
voici la dernière version (j'espère à moins que vous ne trouviez à redire ... lol)
Le jour tant redouté finit par arriver. Le train est déjà là, crachant sa fumée noire. Il emmène plusieurs centaines de jeunes gens à la guerre. On dit que cela ne durera pas et qu’à Noël ils seront rentrés chez eux. Dans le hall de la gare centrale, l’émotion est infinie. Chacun fait de son mieux pour retenir ses larmes et encourager les fils ou les maris. Bien souvent, les mots d’amour demeurent inexprimés. Les banalités masquent la détresse des familles. Les mains se cherchent, fébriles et avides.
Assis sur son baluchon dans le couloir bondé d’hommes en uniforme, Louis sourit en pensant à son petit garçon, pas plus haut que trois pommes, mais si téméraire déjà. Léonie, sa femme, se plait à répéter qu’il ira loin, le petit. Elle, il l’adore. Seulement, il ne sait pas comment le lui dire. Alors, il l’embrasse dans le cou, là où les petits cheveux frisottent. Elle sent bon la violette. C’est le parfum de sa poudre de riz. Il ferme les yeux pour mieux garder en lui ces images odorantes. Le poudrier est violet. Il est toujours à la même place dans l’armoire de toilette. Il revoit ses gestes délicats pour manier la houppette. ses bras ronds, sa nuque gracile et la lumière de ses yeux. Il a envie de pleurer. La promiscuité l’en empêche. Il se réfugie dans un sommeil agité, bringuebalé par les cahots du train. Dans le fond du compartiment, un chant naît. C’est un chant patriotique. Un chant de combattant fier de défendre son pays en guerre.
Là-bas, sur le front ouest, les poilus ne pensent qu’à survivre, au jour le jour, dans des conditions extrêmes. Chaque minute peut être la dernière. Les tranchées ennemies se font face, avec des positions avancées ou en retrait selon les victoires et défaites des belligérants. On meurt pour conquérir quelques mètres de cette terre fertile, meurtrie par la mitraille, hérissée de barbelés aux pointes acérées. Les gaz, les balles, les obus de toutes sortes, les corps à corps, les guet-apens, les fusillades pour l’exemple font partie du quotidien. Sur le terrain détrempé, alors que les soldats, au coup de sifflet, montent au feu, les officiers hurlent des ordres étouffés par le tintamarre des obus, des mitrailleuses, de la fureur des éléments, des râles humains, des cris de souffrance. Une sorte de frénésie, à demi-comateuse, procurée par la mauvaise gnole bue au goulot, s'empare de chaque homme. Il faut éviter les projectiles meurtriers, ne pas tomber dans les gouffres de l'enfer provoqués par les tirs d'obus. La mort rôde. Les croix de bois plantées sur les tombes précaires sont innombrables. Les emplacements finissent par manquer. On creuse plus profondément pour empiler les cadavres, aussi bien français qu’allemands. Les bois croisés s’inclinent, sous la poussée du vent, charriant avec lui une odeur putride.
Le 11 novembre 1916, peu de temps avant la fin de la bataille de la Somme, Louis est la cible d’un tireur isolé, à proximité du poste d’observation qu’il doit occuper. Presque simultanément, Léonie met au monde un autre petit gars et lui donne le prénom de son père. A l’annonce officielle de la disparition de son mari – on n’a pu retrouver son corps elle demeure muette et pétrifiée sur le seuil de sa modeste maison, vacillante de douleur. Une étreinte glacée lui serre la poitrine, elle cherche sa respiration, quelque chose d’inconcevable s’abat sur elle.
Des bras vigoureux l’ont portée jusqu’au sofa du salon. Quelqu’un lui fait boire une gorgée de vin rouge, celui qu’elle sert lors d’une visite, l’après-midi avec des gaufrettes. La coutume du nord traverse les siècles. Léonie est de Roubaix et Louis d’Amiens. Elle l’a rejoint dans la Somme. Avant elle travaillait dans les filatures. Lui, il était contremaître dans une usine métallurgique. La perspective d’un emploi qui l’obligerait à donner ses enfants en nourrice l’effraie. Elle reprend des couleurs, a le souci de paraître digne dans le malheur. Une simple cérémonie aura lieu à la mémoire de Louis. Le deuil est d'autant plus difficile à vivre qu'on ne peut se recueillir sur une tombe. Les condoléances sont tristes à pleurer.
Chacun voudrait changer les évènements et rendre le bonheur aux familles éprouvées. La guerre se prolonge, l’hécatombe s’intensifie, le chiffre des soldats tués ou disparus ne cesse d’augmenter. Jamais un conflit armé n’a été aussi sanglant, féroce, sans merci. La mort ne choisit pas sa proie, elle ne tient compte d’aucune circonstance atténuante pour exécuter sa lugubre besogne. La vie que Léonie vient de donner à un nouveau petit être lui apparaît soudain comme un signe du destin. N’y aurait-il pas une corrélation entre les décès et les naissances ? Léonie survit comme beaucoup de femmes. Elle trouve une place à l’usine, confie ses petits à une voisine.
Avant d’aller chercher les enfants chez la voisine, elle s’assied dans la petite cuisine et pose le courrier sur la table. Un café à la chaussette auquel elle a ajouté une cuiller de chicorée, la réchauffera. Après avoir bu quelques gorgées brûlantes du breuvage et trempé un carré de sucre roux qu’elle laisse fondre dans la bouche, elle ouvre soigneusement l’enveloppe. Un cri lui échappe. Elle reconnaît l’écriture. C’est celle de Louis. Ses petites lettres bien formées, son encre violette, cette manière bien à lui de tracer la lettre « t » avec une grande barre bien appuyée. Il n’y a aucune indication de date et de lieu. Le papier tremble entre ses mains rougies par la bise de novembre. En tout cas, cela fait tout juste un an. Déjà ! Le temps assombri par les mauvais jours, cette guerre qui se prolonge sans l’espoir d’une reddition, l’affliction dans laquelle la disparition de Louis l’a plongée, ses journées surchargées, les enfants dont il faut s’occuper matin et soir, elle n’a pas vu les mois défiler.
D’une voix tremblante, elle lit lentement la lettre de Louis.
« Ma chère Léonie,
Que penseras-tu quand tu recevras cette lettre de moi ? J’avoue avoir hésité avant de t’écrire. Mais, là où je suis, j’ai tellement besoin de ton amour. Il fait très froid ici. Je suis en permanence transpercé jusqu’aux os. Enfin je dirais plutôt que j’ai cette sensation. Mais c’est mon âme qui souffre.
Depuis le belvédère d'où je contemple la vallée, je songe à ma vie passée. Tu es toujours ma femme chérie mais je t'en prie, accepte que je ne sois plus à tes côtés au quotidien. Je ne peux t'expliquer les tourments que j'endure, la torture morale et physique de mon enfer personnel. J'erre ici et là, livré à moi-même, condamné à la solitude et au secret.
Ce coup du sort est terrible pour nous deux. Je veille sur toi du mieux que je peux. Ne reste pas seule, trouve un bon compagnon et ne m'attends pas. Tu dois te demander dans quel pétrin je me suis mis pour t'abandonner ainsi avec mes enfants. Sache que cela ne dépend pas entièrement de mon bon vouloir.
J'essaie d'oublier l'horreur de la guerre qui a fait de moi ce que je suis maintenant. Je ne peux te révéler la nature de mon existence actuelle et qui, je le crains, risque d'être infiniment complexe et incroyable.
Moi-même, au détour d'un chemin balisé de croix de bois, je suis en quête de mon identité. Le sort qui s'acharne sur moi ne me rend pas amer. Ce n'est que justice. Sache que mon amour vous accompagne, toi et les enfants. Louis."
Léonie replie la lettre avec soin et la range dans une boite à biscuits. Elle regarde par la fenêtre. Tout semble paisible aux alentours. Il est tard. Elle se rhabille pour aller chercher les enfants. Elle se coiffe en pensant à autre chose. Puis d’un geste machinal, elle prend la houppette et se poudre le visage. Le parfum de violette se répand aussitôt. Alors seulement une larme coule sur sa joue pâle.
. FIN
Re: Les barbelés de l'enfer
TiCi a écrit:Je ne vais pas me lancer dans une critique très constructive. J'ai lu le texte original, peut-être que ça ne m'a pas aidé. Mais j'ai le sentiment que cette histoire part dans tous les sens. La guerre et ses victimes, des lettres envoyées depuis le purgatoire, un danger de pacte démoniaque... Tout ça ne cohabite pas très heureusement à mon goût.
L'écriture me parait même moins convaincante que dans ta version précédente, avec cette disproportion entre trop de détails insignifiants, et pas assez de développements.
Je n'ai qu'un conseil : il faut absolument te canaliser. Tu avais largement le temps pour travailler ton texte avant la fin du concours...
Bonjour TiCi
Suite à ton message dans la rubrique "défouloir", je tiens à te préciser que ton com n'est pas passé inaperçu. Je l'ai mis de côté car j'avais bien l'intention de remanier mon texte hors concours, en tenant compte des remarques de tous. Dans le feu de l'action, j'avoue t'avoir ensuite oublié. Non pas que je sois une incorrigible étourdie, j'ai rarement cafouillé autant que sur ce thème, sans doute à cause d'une grosse fatigue et d'une forte émotion personnelle par rapport au sujet ! Je ne cherche pas d'excuse mais j'explique ici mes imbroglii et mes revirements. En fait, j'ai du mal également à répondre aux critiques sévères. Je les accepte cependant mais cela me coupe un peu les bras. Alors je remets au lendemain et j'oublie ensuite.
J'ai pris en considération ton avis et j'ai fait en sorte d'etre moins dispersée dans le texte.
Ces péripéties doivent agacer. Moi même je suis agacée par cela lol
Mais ce n'est pas une habitude chez moi. Mon QI est normal et je ne suis pas encore mariée avec Aloïs que tout le monde connaît. (rire)
Sinon tu n'es pas transparent rassure-toi.
Cordialement,
Re: Les barbelés de l'enfer
Merci d'avoir réagi, Anouk.
Bon courage pour le concours. A+
Bon courage pour le concours. A+
TiCi- Bourreau intérimaire
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Re: Les barbelés de l'enfer
Cette version est plus aboutie effectivement, mais pas moins poétique. Or c'est ce que je retiens principalement de ce texte : la poésie qu'il dégage.
C'est une belle nouvelle.
Merci à toi
C'est une belle nouvelle.
Merci à toi
mormir- — Arpenteur des mondes — Disciple de l'arbre noir
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Re: Les barbelés de l'enfer
Tu es plus à l'aise dans la peinture intimiste que dans l'exposé "documentaire". Ton récit aurait gagné en émotion en restant dans le quotidien de Léonie (évoquer les lettres de Louis, la solidarité des voisins, l'angoisse de l'attente, le menuisier qui vient de perdre un fils, la pénibilité du travail en usine, le lit froid et vide, ce genre de chose).
L'idée d'une dernière lettre venue de nulle part me plaît bien mais je trouve que son potentiel n'est pas exploité au mieux. (Que dirais-tu de l'annonce d'une permission prochaine et l'image de Léonie guettant sur un quai de gare un train dont elle sait que Louis ne descendra pas ?)
(Détail quant aux annonces de décès : elles n'étaient pas glissées dans les boîtes aux lettres mais remises en mains propres par une délégation d'officiels. La moindre des choses.)
Je sais, pas facile pour un naturel "papillon", mais avec un peu plus de concentration, tu pourrais tirer le meilleur de tes sujets.
L'idée d'une dernière lettre venue de nulle part me plaît bien mais je trouve que son potentiel n'est pas exploité au mieux. (Que dirais-tu de l'annonce d'une permission prochaine et l'image de Léonie guettant sur un quai de gare un train dont elle sait que Louis ne descendra pas ?)
(Détail quant aux annonces de décès : elles n'étaient pas glissées dans les boîtes aux lettres mais remises en mains propres par une délégation d'officiels. La moindre des choses.)
Je sais, pas facile pour un naturel "papillon", mais avec un peu plus de concentration, tu pourrais tirer le meilleur de tes sujets.
Jack-the-rimeur- — — Zonard crépusculaire — — Disciple d'Ambrose Bierce
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Re: Les barbelés de l'enfer
Et voilà la fin remaniée :
Suivent quelques mots en post-scriptum. L’encre est délavée. Après quelques hésitations, Léonie déchiffre les mots suivants : « Train 367 dans un an jour pour jour ».
Elle regarde par la fenêtre. Tout semble paisible aux alentours. Il est tard. Elle se rhabille pour aller chercher les enfants et se recoiffe en retournant dans tous les sens l’énigme de la lettre et de ce train mystérieux. Comment est-ce possible ? Et le chiffre 367 ?. Pourtant l’étrange message final sonne comme un rendez-vous aléatoire, une vague promesse de retour après un exil forcé. Le numéro du train et la date sont inscrits sur un calepin. Elle y note presque tout. Elle se promet d’être sur le quai de la gare le jour « J ». Mais en elle s’affirme la certitude que Louis n’est plus. Elle ressent sa protection sans se l’expliquer. La lettre est rangée avec soin dans la boite à biscuits prévue à cet effet.
Il me reste à vérifier les numéros de train de l'époque !
Suivent quelques mots en post-scriptum. L’encre est délavée. Après quelques hésitations, Léonie déchiffre les mots suivants : « Train 367 dans un an jour pour jour ».
Elle regarde par la fenêtre. Tout semble paisible aux alentours. Il est tard. Elle se rhabille pour aller chercher les enfants et se recoiffe en retournant dans tous les sens l’énigme de la lettre et de ce train mystérieux. Comment est-ce possible ? Et le chiffre 367 ?. Pourtant l’étrange message final sonne comme un rendez-vous aléatoire, une vague promesse de retour après un exil forcé. Le numéro du train et la date sont inscrits sur un calepin. Elle y note presque tout. Elle se promet d’être sur le quai de la gare le jour « J ». Mais en elle s’affirme la certitude que Louis n’est plus. Elle ressent sa protection sans se l’expliquer. La lettre est rangée avec soin dans la boite à biscuits prévue à cet effet.
Il me reste à vérifier les numéros de train de l'époque !
Dernière édition par anouk le Lun 12 Mai 2014 - 13:01, édité 1 fois
Re: Les barbelés de l'enfer
Hello !
J'ai trouvé ce texte émouvant. Il tombe pile-poil cette année pour les commémorations et je trouve que l'ambiance des tranchées, bien que succinte, est bien rendue. Joli texte donc, que j'ai eu plaisir à lire...
A+
J'ai trouvé ce texte émouvant. Il tombe pile-poil cette année pour les commémorations et je trouve que l'ambiance des tranchées, bien que succinte, est bien rendue. Joli texte donc, que j'ai eu plaisir à lire...
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Invité- Invité
Re: Les barbelés de l'enfer
Merci. J'ai tenu à laisser un peu de romanesque dans ce récit douloureux. Les tranchées n'incitant pas à cela, j'ai préféré mentionner la poudre à la violette, tout un symbole de la féminité, douce et parfumée.
Merci pour ton retour lecteur !
Merci pour ton retour lecteur !
Re: Les barbelés de l'enfer
J ai beaucoup aimé Anouk, l histoire est simple et belle, c est évocateur, j ai aimé quand tu dis "ces bras rond" c est une expression que je garderai, l histoire m a beaucoup plût, félicitations.
Malbordus- Éventreur titulaire
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