Du bon usage d'un contre-modèle en écriture...

Les fêtes de Noël étant propices à la lecture j'ai donc sacrifié à la tradition et me suis enfermé avec quantité de bouquins. Je vous ferai grâce de la liste. Sachez simplement qu'il y a de tout et quand je dis de tout je veux dire également du Polar et du Thriller. Le meilleur (Les Anonymes de Ellory, ou L'île aux chasseurs d'oiseaux de Peter May) y côtoie bien souvent le pire... Et en parlant de pire, j'ai été gâté cette année puisque je viens de terminer la lecture du très en vogue Lee Child le créateur de Jack Reacher, lequel Reacher est actuellement interprété au cinéma par Tom cruise.
Vous me direz: mais pourquoi avoir acheté un bouquin dont on peut supposer qu'il est ou sera une bouse ? Je répondrai en deux point : d'une, supposer ne veut pas dire qu'il est une bouse et deux : Lee Child a publié un nombre conséquent de bouquins et c'est aussi en lisant que l'on apprend.
Et donc j'ai appris. Beaucoup en fait. D'une part j'ai appris à me fier plus souvent à mon instinct. Ce livre intitulé "Sans douceur excessive" (tout un programme) est effectivement un monument de ringardise et d'invraisemblance. L'histoire est la suivante : Jack Reacher, héros de Child, est à NY à la térasse d'un café et voit un type monter dans sa voiture. De là une histoire qui vous plonge dans l'univers des mercenaires et des milices privées.
L'intrigue quant à elle est d'une nullité crasse et l'on devine bien vite (dès les 50/100 premières pages) ce qui se trame.
Quant au héros, Jack Reacher, Child le présente comme un géant blond (normal c'est un gentil et les gentis dans la littérature de Child doivent a priori être blonds) d'une intelligence redoutable (forcément) et je cite : "invincible". Reacher est donc grand, blond et invincible...
Je ne crois pas avoir lu un livre qui en si peu de place ou de temps faisait autant pour montrer tout ce qu'il ne faut pas faire en littérature.
Un héros invincible ? Alors pourquoi continuer la lecture puisque manifestement rien ne peut lui arriver (même si personnellement j'ai continué la lecture). N'est-ce pas la mort du suspense ? Reacher n'est finalement qu'un cliché formé de tous les clichés du genre. Et l'écriture de Child s'en ressent à user de phrases creuses telles que "Reacher, seul dans le noir, armé et invincible". Ou "Reacher seul dans le noir avec un couteau" Ou "Reacher seul dans le noir avec un miroir au bout d'une perche" (si!si!). Enfin bref...
Je risque une question. J'ai lu et je sais qu'il existe des livres sur l'écriture et des auteurs (ou des héros) qui sont pour nous des repères, des marqueurs, des maîtres. Ceux-là nous aident beaucoup c'est vrai, mais quid des contre-modèles ? Y-a-t'il chez vous des livres/des héros qui, bien qu'étant aux antipodes de ce qui vous fait vibrer, demeurent comme la chose à ne pas faire ? Question bizarre sans doute mais je me la pose et je vous la pose...

Difficile question car je ne lis que ceux que j'aime. Ma bibliothèque se repait d'auteurs que je lis depuis mon enfance : Maupassant, Hemingway, Dorgeles, Gibeau, Céline, Mauriac, Bernanos, Kafka, Jean Ray, King, Orwell, Barjavel... donc pour te répondre, je pense surtout à certains romanciers de FN Anticipation (Douriaux, Limat...) et de la collection GORE (John Russo) et quelques oeuvres mineures de King : Cellulaire, La tempête du siècle, Cujo, Peur bleue...

Je n'irais pas jusqu'à lire une bouse juste pour apprendre ce qu'il ne faut pas faire, il y a trop de livres intéressants à lire pour ça. Mais... Il m'arrive de tomber sur un passage mauvais, mal écrit, et à ce moment-là je me dis que l'auteur a été un peu léger (à moins que ça ne vienne de la traduction). Et c'est vrai que, même si le livre me plaît, j'essaie de mémoriser ce qui me plaît moins pour essayer d'éviter de refaire pareil.
Par exemple, je lis en ce moment la trilogie divine de Dick, et cet auteur, bien que génial, n'a pas une prose exempte de défauts. A un moment donné, il utilise deux fois le mot "énigmatiquement" (dit-il énigmatiquement) en l'espace de deux pages. Personnellement, je trouve ça lourd et laid. La traduction y est certainement pour quelque chose, mais tout ce qui compte c'est que j'essaierai de ne pas le reproduire.
Je n'ai donc pas de livre contre-exemple (sauf si par hasard je tombe sur un truc très nul, mais ça ne m'est jamais vraiment arrivé); dans un livre je suis sensible au bon, pour m'en inspirer, comme au moins bon (quand-même beaucoup plus rare), pour ne pas refaire pareil.

Correction... Je disais que le livre avait l'air d'une bouse notamment parce que le titre est très mauvais (Sans douceur excessive) mais là la traduction y est ici sans doute pour quelque chose (titre original : the hard way). D'un autre côté, il arrive qu'un livre qui paraît très mauvais se révèle excellent à la lecture. Là ce n'était pas le cas. J'essaie de lire de tout, sans préjugé. Je dis de tout, cela signifie notamment des Thrillers puisque c'est le genre qui me plait le plus. Lire pour apprendre et il est vrai que Lee Child est assez bon dans certains domaines (notamment lorsqu'il s'agit de faire part d'une ambiance tendue entre les protagonistes. Croyez le ou non, c'est peut-être un signe mais Lee Child est incontestablement bon lorsque les personnages placés dans ces ambiances ne parlent pas... C'est lorsqu'ils ouvrent la bouche que les choses dégénèrent rapidement...). Et comme Ludwig je me dis : OK, là il fait comme cela et je tente alors de mémoriser la chose. Mais dans l'ensemble le livre est très mauvais. Cela tient à la fois au style qu'à un défaut de caractérisation des personnages et notamment du héros. Et ce sont dans ces deux compartiments du récit que l'on se dit paradoxalement que c'est tellement mauvais qu'il y a certainement quelque chose à retenir ici aussi. Ce qui est le cas : un héros comme Reacher n'est finalement qu'un ramassis de médiocrités littéraires... L'on peut se demander du reste quel est le travail des éditeurs en la matière pour accepter de publier ce qui ne ressemble finalement qu'un une ébauche de roman de gare (avec tout le respect que j'ai pour les trains). Je sais maintenant que lorsque j'essaierai de construire une intrigue, un personnage ou autre, Lee Child et Reacher seront dans un coin de ma tête comme les parfaits exemples de ce que je ne veux surtout pas faire. Cela aurait pu être un bon livre, un livre à suspense, il n'en est rien...