Le repos

Le Repos

Richard pris une longue respiration en regardant l'enseigne. « Le Repos » clignotait en rouge et bleu, un rythme lent, presque apaisant. Le banquier n'était pas forcément appréciateur du nom de l'établissement, mais ce n'était, après tout, pas pour ça qu'il l'avait choisi. Prenant son courage à deux mains, il finit par pousser la porte et entra dans le bar.

Il eu un bref moment d'hésitation lorsqu'il vit qu'il était le seul présent. Bien entendu, il ne s'attendait pas à trouver les lieux bondés, mais un ou deux autres clients peut-être. Voire une connaissance, venue boire avec lui. Il ne put retenir un rictus à cette dernière pensée.

S'il venait ici, c'est justement parce qu'il n'avait personne avec qui boire un verre.

Une fois assis au bar, il vit s'approcher de lui la véritable raison de sa présence ici, dans ce bar en particulier : une jeune femme, probablement la trentaine, ses longs cheveux blonds poussés à hauteur des hanches qui dansaient alors qu'elle venait vers lui, tandis qu'elle le regarde d'un air amical de ses deux yeux bleus clair.

Pour la première fois depuis ce matin, un véritable sourire vint éclairer le visage de Richard. Il sut qu'il avait fait le bon choix. La photo sur le site du bar ne rendait pas hommage à la véritable beauté qu'il avait en face de lui.

«  - Bonjour, et bienvenue au Repos ! Qu'est-ce que je peux vous servir monsieur... ?

- Duncan ! Richard Duncan. Un plaisir de vous rencontrer. Et vous pouvez me donner une simple bière s'il vous plaît.

- Moi c'est Julie, je vous donne ça tout de suite ! »

Elle lui fit un rapide clin d'oeil avant de se retourner, prenant un verre dans la longue collection derrière elle. Richard en profita pour admirer ses courbes, son regard se posant sur les hanches de Julie, descendant ensuite sur son derrière, comme attiré par ce dernier. Lorsqu'elle vint lui faire face à nouveau, le banquier détourna rapidement les yeux, rougissant légèrement, gêné d'avoir probablement été pris sur le fait.

Julie cependant ne semblait pas l'avoir vu, ou alors feignait-elle de l'ignorer. Elle lui offrit sa bière, toujours aussi souriante, et Richard ne put s’empêcher de lui sourire, un peu niaisement, en retour. Il n'avait pas l'habitude qu'une femme, surtout une aussi belle que celle-ci le regarde ainsi et il ne savait pas vraiment comme réagir au mieux. Aussi attrapa-t-il son verre et en but une longue gorgée, cherchant un peu de courage dans l'alcool.

«-  Vous... vous êtes vraiment belle vous savez ? Je suis content que ce soit vous !

- C'est gentil Richard. Je suis heureuse aussi d'être là pour toi. »

Il ouvrit la bouche, et la ferma aussitôt. Il venait de percevoir quelque chose d'autre dans son visage. Si ses lèvres souriaient, son regard lui exprimait tout autre chose. De la pitié, et un rien de tristesse, pour le semblant d'homme qu'elle avait de lui. Il but ce qui lui restait, avant de claquer son verre sur le comptoir.

« - Comment ça se passe du coup ? Je dois faire quelque chose ?

- C'est déjà fait. Le poison était dans ton verre. Il ne reste plus qu'à attendre un peu. Tu vas bientôt t'endormir, et tu ne te réveilleras plus.

-Ho... je... je pensais que j'aurais un peu plus de temps que ça. Je peux vous demander un petit quelque chose ?

- Tout ce que tu veux Richard. Je suis là pour que tout se passe au mieux.

- Je pourrais avoir un baiser ? Sur le front. C'est comme ça que ma mère me disait bonne nuit quand j'étais gosse. »

Richard sentait ses muscles s'engourdir. Le produit agissait rapidement, et il n'avait plus le temps d'éprouver de la honte. Plus besoin non plus. Il allait bientôt partir, comme il le souhaitait. Julie lui offrit à nouveau un regard triste, avant de se pencher au dessus du comptoir, posant ses lèvres sur le front du condamné.

« Bonne nuit Richard. »

Le banquier sourit, une dernière fois, avant de s'écrouler sur le comptoir, endormi à jamais. Julie pressa un bouton d'appel et deux infirmier sortirent de l'arrière du bar pour emporter le corps. La belle médecin en profita pour remplir les documents administratifs, indiquant la date et l'heure de l'euthanasie.