Annonce de parution : Une vie normale

Mon recueil de poésie Une vie normale est paru !

Le traditionnel gif de l'amour pour fêter ça !



Format A4, 36 pages, entièrement sérigraphié, édité par Le dernier cri​ et illustré par Cha Kinon​, Clo Porte​, Dav Guedin​, Fanny Nie​, Lilas​, Marc Brunier-Mestas​ et Pakito Bolino​, tirage 200 exemplaires, j'en ai 20 dédicacé à vendre, pas un de plus !



25 euros frais de port compris :
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Quelques extraits :

J'aurais pu couler mais j'ai échappé à ça. Je flotte entre deux eaux et aperçois la surface. Elle s'étend au-dessus de ma tête, aussi éloignée de moi que je le suis du fond, et je suis assez léger pour ne pas tomber mais pas assez fort pour me déplacer horizontalement ni remonter jusqu'à elle. Parfois le soleil la perce, sa lumière alors me parvient mais pas sa chaleur : il ne m'en reste qu'une empreinte claire et froide et je n'arrive pas à savoir si ça me frustre ou me réjouit.
À différentes distances de moi, et à des hauteurs variées, j'aperçois des silhouettes dont la précision s'estompe en fonction de leur éloignement. Aux plus proches, je parle ; quelquefois, elle me répondent ; la quantité d'eau nous séparant déforme le son de nos voix, de sorte qu'entre ce que je dis et ce qu'on comprend, et entre ce qu'on dit et ce que je comprends, il y a une séparation dont l'ampleur et la profondeur sont difficiles à mesurer.

*

Entre le moment
Où tu échappes à tes parents et deviens libre un peu
Et celui
Où tes sphincters devenus méduses reprennent les commandes
Il y a l'age adulte
Ça dure pas longtemps, fais gaffe
Entre les deux enfers bien brève est l'échappée
Cet intermède
Faut le mettre à profit
Faut pas déconner, faut pas
Faut le mettre à profit, vite
Le temps de se demander quoi foutre et c'est déjà trop tard
Qu'est-ce qu'on peut raconter, quand on est écrivain, à part ça ?
Faut bien, pourtant, donner envie de vivre, un peu
Entre l'agonie de l'enfance et celle de la vieillesse
Piquer les culs des ânes pour les faire avancer
Un peu

*

Faire les choses avec ténacité
Faire les choses avec compétence
Faire la preuve de son talent
Faire les choses bien
Faire en sorte d'être un bon artisan
Faire en sorte de progresser
Être fier de soi
Faire les choses avec ténacité
Faire les choses avec compétence
Faire la preuve de quelque chose mais sans trop savoir quoi
Faire les choses tantôt bien, tantôt mal
Savoir ce qu'il faut faire, ce qu'il ne faut pas faire
Savoir ce qu'on attend de soi
S'éloigner par principe
Devenir écrivain
Contempler son travail
Contempler son échec
Se demander pourquoi ça ne veut pas marcher
Refuser la réponse alors qu'elle s'étale plus grosse que l'échec
Ne pas jouer le jeu
S'étonner de ne pas le gagner
Se croire intelligent

*

Dans un long entretien
À paraître dans Marie-Claire
Et dont quelques extraits
Sont lisibles sur Pure-People
Laurent Ruquier nous dit
Qu'il a beaucoup souffert
Et qu'il comprend les autres
Et qu'il ressent les choses
« Ah ! Si vous saviez ! »
« Ah ! Si vous saviez ! »
Mais non Laurent Ruquier
Quand on ne souffre plus on oublie la souffrance
Quand on mange à sa faim
Qu'on éjacule dans la soie
On oublie les matins creux les draps rêches les nuits lourdes
La compassion est un théâtre
Une figure de style imposée par un autre
Depuis quand les amoureux
Pleurent les chagrins d'amour
De ceux qui sont désespérés
Depuis quand les ventres pleins
Se creusent à l'idée
Du tiers-monde affamé
Depuis quand les bras dans les manteaux
Se couvrent de chair de poule
À chaque clochard mort de froid dans le métro
La compassion c'est du tourisme
Une visite dans la souffrance de l'autre
Un bon appareil photo
De bonnes chaussures de marche
Dans la poche le Guide du Tristard
Tout ce que tu fais Laurent Ruquier
C'est te souvenir que tu fus pauvre
C'est te souvenir que tu en chias
Mais les souvenirs ne sont pas réels, Laurent Ruquier
Les souvenirs ne sont rien d'autre qu'une reconstitution historique
Comme les animations médiévales tu sais ?
On voit ça des fois dans les villes
Et quand on a marre
De tous ces abrutis
Vêtus de cotte de maille
Plus ou moins bien imitées
Qui traînent leurs épées qui ne tueraient personne
Et quand on en marre
De boire de la Leffe
Déguisée en cervoise
On reprend sa bagnole
On retourne au présent

Chaque deuil est un carnaval, Laurent Ruquier
On déguise les morts pour qu'ils aient l'air vivants
Et les vivants enfilent leur masque de tristesse et gueulent intérieurement
C'est pas moi !
C'est pas moi !
Qui suis dans le tombeau
C'est pas moi !
C'est pas moi !
Qui mange de la terre
C'est pas moi !
C'est pas moi !
Qui appartient aux asticots
C'est pas moi !
C'est pas moi !
Qui me tait pour toujours
C'est pas moi

*

Les récits qu'on écrit pour les petits garçons ont pour fonction de dire : l'aventure c'est cool et surtout entre mecs, on ne veut pas de filles pour nous casser nos trips. Les récits qu'on écrit pour les petites filles ont pour fonction de dire : la maison c'est chouette surtout si le mari en rentrant du boulot est content de la bouffe. Moi quand j'étais petit je jouais aux Big Jims. Entre deux aventures le grand kiff de Big Jim c'était faire la vaisselle, et puis faire le ménage, ranger ses accessoires, ses costumes de héros, et puis glander chez lui. Je lui avais construit un joli coin cosy, j'y passais mes journées à glander avec lui, nous n'y foutions pas grand chose. L'aventure m'emmerdait, ce qui m'intéressait c'était le quotidien.
Et un jour j'ai pigé que les petits garçons doivent être des brutes, doivent être insolents, et les petites filles serviable et câlines. Ce jour-là j'ai pigé que les petits garçons et les petites filles n'ont pour seule fonction qu'être des animaux, oui, animaux sauvages pour les petits garçons, animaux domestiques pour les petites filles, alors je me suis dit non merci. Ni garçon, ni fille, je vous emmerde.





un extrait de lecture au Barlok, à Bruxelles, avec Fraulein Flo à la musique :

Bravo pour ces textes très forts… Merci pour le partage.

Avec plaisir ! N'hésite pas à acheter le bouquin, si tu veux en lire d'autres

J'avais vu passer ça en d'autres lieux, mes félicitations, c'est toujours un plaisir de lire ta prose !

Raven, corbeau abruti qui porte la cotte de maille. Parfois.

Ah oui tiens ! (il me semblait avoir laissé un comm', mais en fait non).

Outre ceux-ci, j'ai déjà vu passer quelques uns de tes poèmes ailleurs et ils défouraillent méchamment, du genre à foutre des (gros) complexes. Toutes mes félicitations donc, jeune loup