La destinée du zombie
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La destinée du zombie
Quand les morts-vivants ont commencé à envahir le monde, je me suis dis : « c'est le moment ! » Le moment de faire, enfin, quelque chose de ma vie. Je sais, c'est pathétique d'attendre une crise pour se révéler au grand jour... Mais que voulez-vous, la vie ne m'a jamais fait de cadeaux...
Qu'avais-je à conserver dans ce monde capitaliste, fait d'actions, d'obligations, de Cac40, de grandes surfaces ? Pas grand chose. La loose, on la porte en soi dès le plus jeune âge, et moi je l'avais... J'ai pratiqué un boulot sans intérêt pendant dix ans avant qu'on vienne m'expliquer que, à la suite d'une restructuration, le siège de l'usine allait être délocalisé dans un pays de l'Est (je ne sais plus lequel) et que de ce fait, soit je suivais, soit j'étais viré. Inutile de préciser que j'ai pas suivi. J'avais trouvé ce job après des années de galère, allant de stages en intérim, et avec mes dix années « d'expérience » en pliage de papier, j'embarquais dans le même bateau... Quel succès ! Quelle réussite ! A 35 ans, je me retrouvais aussi fauché et minable qu'à la sortie du lycée...
Ma femme et mon fils, avec qui j'entretenais des rapports de plus en plus distanciés, m'observaient avec exaspération.
C'est pour retrouver un peu de crédit auprès d'eux, que j'ai décidé de combattre cette invasion morbide. Une invasion incroyable, inexplicable... Les morts se réanimaient, mus d'une envie de massacrer les êtres vivants, humains ou animaux, qu'ils croisaient. Les nouveaux morts venaient alors grossir leurs rangs. Leur armée ne faisait qu'augmenter alors que la nôtre, celle des vivants, se réduisait peu à peu. Je m'étais lancé dans une cause perdue. J'aurais pu m'y révéler. Mais comme je l'ai dit, je portais la gangrène de l'échec en moi.
Je suis parti un soir en chasse avec mon groupe de chasseurs, et nous avons nettoyé tout un village. Quand je dis nettoyé, c'est une façon de parler, car la méthode pour rendre inoffensifs ces cadavres est loin d'être propre. Il faut leur trancher les membres et les brûler. On peut leur broyer le crâne, mais ils remuent encore et peuvent attaquer en aveugle... De retour de ce carnage, c'est avec effroi que j'ai vu ma maison, que je croyais sécurisée, mise à sac. Des zombies avaient pénétré par une fenêtre et avaient tout dévasté. Ma femme et mon fils avaient disparu.
Mon plan de « réhabilitation » était tombé en quenouilles. J'avais encore échoué. Lors d'une patrouille nous avons croisé ma femme et mon fils déambulant le long d'une route avec d'autres zombies. Nous leur avons fait subir le sort qu'il convenait.
Sans but et sans peur, je me suis illustré par des actes de bravoure inédits. La colère, la haine, ne faisaient qu'accroître mon illusion de réussite. Les autres m'applaudissaient. Certaines soirées, nous faisions la fête en mon honneur ! Belle heure de gloire ! Je devenais tout simplement inhumain, brutal, sans pitié...
Le camp militaire où j'étais retranché depuis quatre ans a subi une attaque, un soir. Nous étions tous ivres. Une mariée noire de zombies s'est abattue sur nous. Nous n'en avions jamais vu autant. Ce fut une vraie débandade, doublée d'un véritable massacre. Je suis parvenu à m'enfuir en poussant devant moi quelques camarades. Peu glorieux, certes, mais efficace.
Après des jours et nuits d'errance, j'ai été recueilli par des survivants. Ils m'ont transporté dans une zone fortifiée et sécurisée, nichée au cœur des collines vosgiennes. On y trouve des magasins, des écoles, des centres de soins. Une vraie petite cité ! Mais rapidement, je me suis heurté à l'évidence. Je ne servais à rien dans ce paradis. Mon inculture et mon incompétence réapparaissaient au grand jour. Je faisais même peur aux enfants avec mes cicatrices !
J'ai beaucoup réfléchi. L'univers des vivants est en perdition. Ce petit havre de paix est bien misérable, malgré son confort, comparé aux océans de chair pourrissante qui se pressent contre ses murailles. Cette résistance me paraît de plus en plus ridicule.
Je possède un pistolet, que je conserve en toute illégalité avec moi. Dedans, il y a une balle.
Cette balle est pour moi.
Je vais me brûler la cervelle loin des surveillants, près de l'école. Peu de temps après, je reviendrais plus affamé que jamais.
La réussite que j'ai pas eue de mon vivant, je l'aurais dans la mort...
Qu'avais-je à conserver dans ce monde capitaliste, fait d'actions, d'obligations, de Cac40, de grandes surfaces ? Pas grand chose. La loose, on la porte en soi dès le plus jeune âge, et moi je l'avais... J'ai pratiqué un boulot sans intérêt pendant dix ans avant qu'on vienne m'expliquer que, à la suite d'une restructuration, le siège de l'usine allait être délocalisé dans un pays de l'Est (je ne sais plus lequel) et que de ce fait, soit je suivais, soit j'étais viré. Inutile de préciser que j'ai pas suivi. J'avais trouvé ce job après des années de galère, allant de stages en intérim, et avec mes dix années « d'expérience » en pliage de papier, j'embarquais dans le même bateau... Quel succès ! Quelle réussite ! A 35 ans, je me retrouvais aussi fauché et minable qu'à la sortie du lycée...
Ma femme et mon fils, avec qui j'entretenais des rapports de plus en plus distanciés, m'observaient avec exaspération.
C'est pour retrouver un peu de crédit auprès d'eux, que j'ai décidé de combattre cette invasion morbide. Une invasion incroyable, inexplicable... Les morts se réanimaient, mus d'une envie de massacrer les êtres vivants, humains ou animaux, qu'ils croisaient. Les nouveaux morts venaient alors grossir leurs rangs. Leur armée ne faisait qu'augmenter alors que la nôtre, celle des vivants, se réduisait peu à peu. Je m'étais lancé dans une cause perdue. J'aurais pu m'y révéler. Mais comme je l'ai dit, je portais la gangrène de l'échec en moi.
Je suis parti un soir en chasse avec mon groupe de chasseurs, et nous avons nettoyé tout un village. Quand je dis nettoyé, c'est une façon de parler, car la méthode pour rendre inoffensifs ces cadavres est loin d'être propre. Il faut leur trancher les membres et les brûler. On peut leur broyer le crâne, mais ils remuent encore et peuvent attaquer en aveugle... De retour de ce carnage, c'est avec effroi que j'ai vu ma maison, que je croyais sécurisée, mise à sac. Des zombies avaient pénétré par une fenêtre et avaient tout dévasté. Ma femme et mon fils avaient disparu.
Mon plan de « réhabilitation » était tombé en quenouilles. J'avais encore échoué. Lors d'une patrouille nous avons croisé ma femme et mon fils déambulant le long d'une route avec d'autres zombies. Nous leur avons fait subir le sort qu'il convenait.
Sans but et sans peur, je me suis illustré par des actes de bravoure inédits. La colère, la haine, ne faisaient qu'accroître mon illusion de réussite. Les autres m'applaudissaient. Certaines soirées, nous faisions la fête en mon honneur ! Belle heure de gloire ! Je devenais tout simplement inhumain, brutal, sans pitié...
Le camp militaire où j'étais retranché depuis quatre ans a subi une attaque, un soir. Nous étions tous ivres. Une mariée noire de zombies s'est abattue sur nous. Nous n'en avions jamais vu autant. Ce fut une vraie débandade, doublée d'un véritable massacre. Je suis parvenu à m'enfuir en poussant devant moi quelques camarades. Peu glorieux, certes, mais efficace.
Après des jours et nuits d'errance, j'ai été recueilli par des survivants. Ils m'ont transporté dans une zone fortifiée et sécurisée, nichée au cœur des collines vosgiennes. On y trouve des magasins, des écoles, des centres de soins. Une vraie petite cité ! Mais rapidement, je me suis heurté à l'évidence. Je ne servais à rien dans ce paradis. Mon inculture et mon incompétence réapparaissaient au grand jour. Je faisais même peur aux enfants avec mes cicatrices !
J'ai beaucoup réfléchi. L'univers des vivants est en perdition. Ce petit havre de paix est bien misérable, malgré son confort, comparé aux océans de chair pourrissante qui se pressent contre ses murailles. Cette résistance me paraît de plus en plus ridicule.
Je possède un pistolet, que je conserve en toute illégalité avec moi. Dedans, il y a une balle.
Cette balle est pour moi.
Je vais me brûler la cervelle loin des surveillants, près de l'école. Peu de temps après, je reviendrais plus affamé que jamais.
La réussite que j'ai pas eue de mon vivant, je l'aurais dans la mort...
Re: La destinée du zombie
C'est une façon originale d'aborder le thème, mais ce petit texte je le vois plutôt comme un synopsis pour une nouvelle plus longue: tu devrais développer les idées et le récit, sur un ton moins anecdotique, avec plus d'affect.
Sinon ton style est fluide, agréable à lire...Je serais intéressé de lire la même histoire, développée.
Sinon ton style est fluide, agréable à lire...Je serais intéressé de lire la même histoire, développée.
Re: La destinée du zombie
Même avis que Paladin. Cela ressemble plus à un début de chapitre qu'à une nouvelle complète. Certaines tournures sont maladroites (tomber en quenouilles) et tu vas trop vite en besogne. C'est dommage car on trouve néanmoins de la fluidité dans ton récit.
Re: La destinée du zombie
Intéressant ce récit. Comme Zaroff et paladin, je pense qu'il devrait être étoffé, si ce n'est pas déjà fait étant donné qu'il a 2 ans
La fin m'a semblé toutefois insuffisante. Je ne comprends pas pourquoi la seule motivation de ce héros pour en finir avec tout ça serait d'avoir de la réussite. Il manque à mon sens un petit bout de psychologie pour justifier cet acte extrême de détruire le dernier bastion humain.
Quant au style, il est agréable, mais ne véhicule pas d'émotions.
J'ai bien aimé le lapsus : "Une mariée noire" au lieu de "Une marée noire" ! rire
La fin m'a semblé toutefois insuffisante. Je ne comprends pas pourquoi la seule motivation de ce héros pour en finir avec tout ça serait d'avoir de la réussite. Il manque à mon sens un petit bout de psychologie pour justifier cet acte extrême de détruire le dernier bastion humain.
Quant au style, il est agréable, mais ne véhicule pas d'émotions.
J'ai bien aimé le lapsus : "Une mariée noire" au lieu de "Une marée noire" ! rire
mormir- — Arpenteur des mondes — Disciple de l'arbre noir
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Date d'inscription : 11/05/2013
Age : 60
Localisation : Près de Chartres
Re: La destinée du zombie
C'est bien aimable de se pencher sur ce vieux récit.
Je dois être honnête, je n'ai jamais revu ce texte. Non pas que je le trouve parfait, loin de là. Disons que je le trouve suffisamment explicite pour ce que je voulais en faire : un texte très court avec une chute cynique.
Si je devais étoffer, j'en ferais un roman. Et l'idée du texte est une idée à reprendre dans un roman.
Un roman que je n'ai pas écrit. Mais qui pourrait s'intituler "Les Parias"... à suivre... peut-être...
Je dois être honnête, je n'ai jamais revu ce texte. Non pas que je le trouve parfait, loin de là. Disons que je le trouve suffisamment explicite pour ce que je voulais en faire : un texte très court avec une chute cynique.
Si je devais étoffer, j'en ferais un roman. Et l'idée du texte est une idée à reprendre dans un roman.
Un roman que je n'ai pas écrit. Mais qui pourrait s'intituler "Les Parias"... à suivre... peut-être...
Re: La destinée du zombie
J'ai apprécié la lecture de ce court texte. En l'état, il m'a suffit, même s'il est vrai qu'il pourrait être la base d'une histoire beaucoup plus longue.
J'ai bien aimé la fin, le gars qui préfère espérer une réussite comme zombie que vivre une vie morne parmi les derniers humains.
J'ai bien aimé la fin, le gars qui préfère espérer une réussite comme zombie que vivre une vie morne parmi les derniers humains.
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