actualités août-septembre 2014
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Léonox
Catherine Robert
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actualités août-septembre 2014
Ce matin en allant pisser un moucheron s'est échappé de mes couilles ; je crois qu'il a passé la nuit là, dans mes poils, bien au chaud.
Bonjour à tous,
Il n'y a pas énormément d'activité à recenser pour ces quinze derniers jours. La vie réelle, quotidienne je veux dire, a nettement pris le pas sur le travail.
J'ai lu, pour la deuxième fois en dix ans, un bouquin de Philip Roth. C'est beau, c'est ennuyeux, c'est très intelligent, ça suscite des interrogations profondes et un émerveillement pour cette écriture à la fois simple et travaillée, et une fois que c'est terminé on lorgne sur Jim Thompson comme quelqu'un qui a été marié pendant quinze ans, vient de divorcer, sort dans la rue et découvre que les jeans sont moulants et les culs très jolis.
J'ai beaucoup pris le train. Comme d'habitude, il en a résulté une flopée de réflexions sur les manuscrits en cours (Une demi-vie, notamment, devrait prendre de sévères beignes lorsque ce sera son tour que je m'occupe de lui – pour l'instant, je suis surtout sur Descente mais l'envie revient de m'occuper de Rien à foutre ; les autres sont tapis dans un coin de ma tête et mûrissent tranquillement) et un bon tas de poèmes. D'ailleurs, ce constat m'a donné envie d'appeler ce recueil Poésie ferroviaire, ou bien Poèmes ferroviaires, ou encore Poème des trains qui partent et qui arrivent. J'aime bien le premier, qui rappelle Poésie portable, mais malheureusement ne veut pas dire grand chose, le deuxième a une construction moins bancale mais le rythme c'est pas trop ça, et le troisième me plaît bien, en ce moment je crois que j'aime bien les titres longs (la nouvelle que j'ai donnée à Jean-François Dalle pour le prochain numéro de la Revue Métèque s'appelle A mon enterrement je veux qu'il fasse beau – ça doit être le titre le plus long de toute a carrière), mon son petit côté Catherine Pancol me gène...
Bref, une vingtaine de nouveaux poèmes dans mon téléphone, que je vais devoir mettre au propre ces jours-ci – oui, c'est pour ça que mon premier recueil, chez Gros Textes, s'appelle Poésie portable, parce que j'en ai noté la moitié dans mon téléphone, je ne suis pas le genre d'écrivain qui se promène les poches bourrées de moleskine et de Mont-blanc, et en attendant, en voici une petite dizaine :
49
Il y a des séparations qui sontcomme des arbres foudroyés, comme des maisons qui flambent et dontle toit s'effondre et tue les habitants, il y a des séparationspleines de fracas, il y a des séparations qui sont comme descatastrophes, et il y a des séparations qui sont comme une dent uséedont la racine, invisible dans la gencive, s'érode, s'érode, commeune dent usée qui bouge, se détache progressivement, finit par netenir qu'à un bout de racine, qui un jour se détache sans qu'onpuisse bien savoir pourquoi c'est aujourd'hui et pourquoi pas hier,et pourquoi pas demain.
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Sur France-Inter ils croient
Les bienheureux connards
Que l'argot des ados
Verlan, mots inventés
Ça leur sert à parler
Sans que les parents pigent
Ce serait supposer
Espèces d'hypocrites
Que les adultes écoutent
Ce que disent les jeunes
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Moi en ce moment ce quim'intéresse au cinéma, dans les films de Bonitzer par exemple, oubien ceux avec Luchini, c'est de voir les actrices interpréter descruches, des potiches, des jolies gourdes, à la télé ce quim'intéresse, en ce moment, c'est de voir des pubs sexistes avec deséduisantes actrices, ça me fascine, je pourrais passer des heuresà regarder ça, je pourrais y passer des heures, à voir ça, à medemander à quoi pensent ces actrices quand elles jouent des connes,quand elles jouent des personnages qui sont tellement, tellement desfantasmes de vieux bourgeois de cinquante ans, à quoi pensent cesactrices quand elles incarnent les fantasmes de jeune femme charmanteet conne, discrète, soumise, cultivée, que les réalisateurs mâlesde cinquante ans mettent en scène sans vergogne, sans aucun sens duridicule, à quoi pensent ces femmes qui se prêtent à ce jeu, c'estça qui me fascine.
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Ça c'est passé en cinq temps
Un
Nous avons oublié que nosenfants nous étaient en tous points supérieurs
Deux
Ils nous étaient soumis et nousles dominions
Trois
Mais nous avons voulu rétablirl'équilibre
Quatre
Nous avons découvert leursupériorité
D'abord avec surprise
Et puis ravissement
Maintenant nous flippons
Cinq
Oui nous avons peur d'eux
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On est dans une civilisation quiméprise et craint l'adolescence. C'est significatif, je trouve. LesGrecs en train de crever méprisaient les Barbares. Les adultesdévorés par le cancer –et je parle pas de métastase qui grouille à travers la viande maisde cancer métaphysique, de cancer de l'âme –les adultes, qui érigent la rationalité, le compromis, la mesure,la tempérance en valeurs, tous ces synonymes de la mesquinerie,toutes ces nuances de la veulerie, raillent l'intransigeance, lanaïveté, l'enthousiasme des adolescents. Qu'importe. Les Grecs ontterminé dans les livres d'Histoire et les Barbares ont prospéré.Ce qui meurt méprise ce qui vit, c'est un mouvement naturel, tandisque ce qui vit ignore purement et simplement ce qui meurt, ce qui vitassassine ce qui meurt en toute impunité et en toute inconscience.
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Les bourgeois blancs hétérosont fantasmé un monde ou les hommes n'auraient pas le devoir d'êtrebeaux mais riches à la place, ni d'être intelligents mais d'êtreéduqués, pas besoin d'être en vie, il y a l'art pour ça ;les bourgeois blancs hétéros ont fantasmé un monde où ilsseraient bourgeois et où ça suffirait, ils ont rêvé d'un monde oùdes filles très belles et très intelligentes se soumettraient àeux et nommeraient ça l'amour.
Ils l'ont construit ce monde.Oui, ils l'ont fabriqué. Vous ne sentez pas, dans les rues, dans lesbeaux quartiers des grandes villes, cette odeur de malaise ?
55
Faire les choses avec ténacité
Faire les choses avec compétence
Faire la preuve de son talent
Faire les choses bien
Faire en sorte d'être un bonartisan
Contempler son travail
Contempler ses progrès
Et être fier de soi
***
Faire les choses avec ténacité
Faire les choses avec compétence
Faire la preuve de quelque chosemais sans trop savoir quoi
Faire les choses tantôt bien,tantôt mal
Savoir ce qu'il faut faire, cequ'il ne faut pas faire
Savoir ce qu'on attend de soi etne jamais le faire, devenir écrivain
Contempler son travail
Contempler son échec
Se demander pourquoi ça ne veutpas marcher, refuser de voir la réponse alors qu'elle s'étale plusgrosse que l'échec
***
Ne pas jouer le jeu
S'étonner de ne pas le gagner
Se croire intelligent
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Le délabrement
Est si progressif
Si lent
Qu'on ne le sent pas
Venir
La souffrance
Remplit
Par si petites touches
Jour après jour
Qu'on ne la sent pas
Venir
Et un beau jour
On est une ruine
Et un beau jour
On en est rempli
De cette douleur
Un beau jour
Ce corps
Ne marche plus
Du tout
Mais on n'a rien vu
Arriver
C'était si lent
Si progressif
On n'a rien vu
Venir
Et on ne souffre
Pas tant que ça
C'est exactement
Comme si on se noyait
En s'éloignant
Du bord
En pente
Si douce
Que pour avoir de l'eau
Jusqu'aux hanches
Il faut marcher
Deux bornes
Tant que j'y suis à mettre des textes, voici la nouvelle qui sera dans la Revue Métèque, que j'ai relue hier soir et que j'aime bien, finalement. Je suis content d'avoir réussi un truc sans pétage de plomb ni cadavre, je pensais pas y arriver sans devenir aussi chiant qu'un écrivain français ; vous me direz si j'ai perdu la niaque ou pas.
A MON ENTERREMENT JE VEUX QU'IL FASSE BEAU
— Tiens,c'est marrant, tu t'en rappelles, de ça ?
Jetenais à la main un cendrier en céramique bleue, avec écrit dessusl'hôtel où nous avions dormi pendant nos vacances en Espagne, jevenais juste de le retrouver au fond du tiroir. J'ai souri. Elle l'aregardé sans expression mais au bout d'un moment, comme j'avaistoujours mon sourire accroché à la figure, elle a souri aussi.
— Tute souviens ? Tu l'avais piqué à la réception.
Jebrandissais toujours l'objet, surjouant quelque chose mais sans biensavoir quoi.
— C'estmarrant, elle a dit, j'avais oublié qu'on l'avait encore, ce truc.Tu l'as trouvé où ? Dans le tiroir ?
— Oui,dans le tiroir. Au fond.
Jene souriais plus. C'était à cause du mot « tiroir ». Etpuis j'ai regardé la valise et remis le cendrier où je l'avaistrouvé, plus certain de grand-chose. J'ai enfilé mes chaussures etune veste, je me suis dirigé vers la porte, je n'ai rien dit.
— Tusors ?
— Cinqminutes, prendre un peu l'air.
J'airefermé sans bruit la porte derrière moi et descendu l'escalier.Dans la rue la lumière jaune et chaude était magnifique, le cielbleu sombre, nettoyé par l'orage, tout qui brillait d'humidité,c'est comme ça que j'aurais voulu que ce soit à mon enterrement.
J'aidéambulé et jeté un œil aux gens et à mon ombre qui parfoiss'étirait comme un Giacometti. A une terrasse j'ai commandé undemi, eu droit en plus à une coupelle de chips, toutes les tablesétaient occupées et tout le monde parlait fort en profitant dusoleil, j'ai savouré tout ça un moment, ça faisait du bien. Je neregardais rien en particulier et j'écoutais sans y faire attentiondes bouts de conversations et peut-être que ça me donnait l'aird'un type en train de réfléchir à des choses importantes maisc'était tout le contraire, j'étais vide de toute pensée, de toutephrase même, il ne me restait plus qu'une poignée de mot,« tiroir », « valise », qui me rendaienttriste, j'essayais de les éviter, et mes émotions étaient réduitesà rien, des petits bouts de peau se détachant tout seuls.
Quandje suis revenu à l'appart il faisait nuit, j'étais bourré et ellen'était plus là, la valise non plus. Le tiroir était refermé avecsans doute le cendrier dedans. Au lieu d'aller vérifier je suisdescendu à l'épicerie m'acheter une bouteille de vodka et unebrique de jus d'orange. C'est à mon retour que j'ai vu la lettre.Elle était posée sur la table, trois feuilles couvertes de sonécriture, je l'ai froissée sans la lire et jetée à la poubelle.
Jeme suis réveillé dans le canapé, il faisait jour depuis longtemps,la lumière plus belle encore que la veille, cendrée, d'une douceurhumide de printemps anglais, le ciel bleu tendre. J'ai regardé unmoment s'effilocher quelques nuages et puis je suis allé à lacuisine récupérer la lettre. Elle avait des tâches de gras et desauce tomate. Je l'ai lue.
Ensuitej'ai essayé d'avancer un peu dans mon travail mais ça ne donnaitrien de bon, alors j'ai fait le ménage et une fois le ménage finije suis retourné dans le canapé et j'ai somnolé devant la téléen m'efforçant de ne penser à rien, ce qui s'est avéré bien moinsdur que prévu. De temps en temps, à voix haute, je me posais laquestion :
— Est-ceque tu es triste ?
Oubien, avec cette variante :
— Est-ceque tu es triste, connard ?
Maisje n'avais pas de réponse. Plus tard mon téléphone a sonné,c'était elle, je ne voulais pas lui parler, j'ai laissé sonner.Trente minutes ont passé. La télé rendait sans significationl'écoulement du temps. La clé a tourné dans la serrure.
— Tiens,elle a dit, tu as fait le ménage.
— Unpeu, j'ai répondu.
— Tuas bien fait. Ça sent bon. Tu as trouvé ma lettre ?
— Oui.
— J'aioublié de prendre des trucs, je suis désolée, je ne voulais pasdébarquer à l'improviste. Mais tu as fait le ménage. C'estmarrant.
— Tues chez toi.
— J'aitéléphoné avant, pour prévenir, tu n'as pas répondu.
— Tues chez toi.
J'aiattrapé la télécommande et baissé le son pendant qu'elle allaitdans la chambre. Je l'ai entendue farfouiller. Je me suis dit que jen'avais même pas cherché à savoir ce qu'elle avait pris la veille,ce qu'elle avait laissé, ou peut-être que je l'avais fait cettenuit mais que je ne m'en souvenais plus.
— Jene trouve plus mon écharpe, tu ne sais pas où elle est ?
J'airépondu non mais c'était inaudible, alors je me suis levé, j'aitraversé le salon et j'ai à nouveau répondu non. Ma voix n'avaitpas beaucoup de vigueur.
Ensuite,je ne sais pas trop comment ça c'est enchaîné, nous avons faitl'amour, et puis j'ai fait du café et elle a fini par descendreacheter du vin à l'épicerie, puis ça a été mon tour, et ainsi desuite. La journée s'est passée de cette manière, nous avonsdiscuté, la glace était rompue, c'était comme un premierrendez-vous mais pour la deuxième fois. J'ai pensé à Fitzgerald.
Aun moment j'ai voulu savoir où elle dormait. Elle m'a répondu àl'hôtel pour quelques jours et puis ensuite chez Sonia. Vers neufheures du soir, nous avions bien bu, elle m'a demandé de lareconduire et j'ai accepté et au bar de l'hôtel nous en avonscommandé un dernier, ça n'était pas mal, nous étions dans desfauteuils en cuir sous une lumière cosy, et nous avons refaitl'amour dans la chambre propre et impersonnelle. Avant de partir,pendant qu'elle prenait une douche, j'ai regardé un moment dehors.C'était bizarre d'observer depuis un point de vue totalement inéditcette rue que je connaissais par cœur, d'être un touriste dans mapropre ville. Quand elle est sortie de la douche elle sentait bonmais c'était l'odeur de l'hôtel, elle sentait bon d'une odeur queje ne lui connaissais pas. A ce moment-là, si j'avais prononcé lesbonnes phrases j'aurais pu rester avec elle, ou bien nous serionsrentrés ensemble, mais je n'avais plus de force, je n'ai rien dit àpart « je vais y aller ». Je lui ai promis qu'ons'appellerait bientôt, je lui ai promis de répondre si elle metéléphonait, et puis nous sommes restés sur le seuil comme unepaire d'idiots sans plus savoir quoi faire. Nous nous sommesfinalement roulés des pelles en nous serrant dans nos bras et deretour à la maison j'ai achevé tout seul la murge que nous avionscommencée ensemble.
Aumilieu de la nuit elle a appelé, aussi bourrée que moi. Nous avonsparlé jusqu'à ce que le soleil se lève, nous l'avons regardé selever, à un moment un avion a passé dans son ciel, devant safenêtre, nous avons compté jusqu'à huit et je l'ai vu aussi. Unefois dans mon lit j'ai trouvé que c'était gros comme une maison, lasuite de tout ça, mais quelques heures plus tard, au réveil, dansune lumière saine et dure de désert californien, ça n'était plusaussi évident.
Jel'ai imaginée s'étirer dans son lit et descendre boire un café encompagnie des touristes. Je me suis demandé quelle serait sa journée.
La place du mort semble bien démarrer. Outre des retours de lecture qui font bien plaisir, je vais avoir une chronique dans le numéro d'août d'Obsküre, probablement une chronique dans le numéro d'octobre de New Noise, et il y a d'autres trucs qui devraient arriver, mais tant que c'est pas confirmé je préfère éviter de me vanter (sauf auprès de mes copains, mais là c'est plus de la vantardise, c'est carrément du radotage).
"Je viens de finir La place du mort et c'est vraiment un regal, je suis vraiment passé de surprise en surprise. Des Tueurs-Nés sans media
Des Punks qui s'amusent et qui vibrent de leurs destructions
Une destruction qui appelle à un renouveau
Des superbes images (yeux fermés au bord de la route, s'allonger sur des rails) qui remuent et émeuvent
J'ai pas vraiment les mots, mais ca fait plaisir de sentir que des NOT DEAD talentueux existent encore."
(Reçu par message Facebook)
***
"Je viens de finir La Place du Mort, que j'ai descendu cul sec. J'ai beaucoup aimé, c'était chouette, un vrai trip. Et va te coucher après ça hein, parce qu'à part prendre une batte en alu et aligner les pequenots au feu rouge, non, je ne vois pas ! la scène de mariage flingué m'a bien plu et le dézinguage de téléphones aussi, deux en un, ça fait un bien fou. Et toujours ton don pour exprimer des ressentis intimes et pour éclairer les comportements humains différemment. C'est très romanesque, très emporté, et ça ne ressemble qu'à du Siébert, je ne vois pas avec qui je pourrais comparer. Sous les croûtes y'a une route, merci et bravo pour ce roman."
(Reçu par message Facebook)
***
"J'ai découvert ce roman grâce à Fabrice Colin (Bal de Givre à New-York, Blue Jay Way, ...), un auteur que j'apprécie énormément. Quand il met en avant un auteur ou un roman sur son blog, je fais confiance en son jugement et acquière le livre. Je n'ai jamais été déçu par ses conseils. Une fois de plus, je viens de me régaler avec "La Place du Mort, série Z existentielle" de Christophe Siébert.
Ames sensibles, s'abstenir! Ici, on ne fait pas dans la dentelle. Une fille paumée rencontre un gars paumé. Ils veulent refaire le monde, pour eux, nous sommes tous des morts vivants. La meilleure façon de refaire le monde, c'est de le détruire, de se détruire mais pas sans gloire, sans plaisir. La mort est le grâle, l'orgasme ultime, originel! Cette histoire est un grand coup d'accélérateur, ne freine jamais, monte et monte encore en puissance, jusqu'à la fin, un bouquet final digne des meilleurs feux de Bengale. Tant par le rythme de l'histoire que par l'écriture.
C'est le monde à l'envers. On fini par aimer les personnages, décalés, amoraux, sans scrupule, hédonistes, qui trouvent leur plaisir dans tout ce que notre société nous a appris à haïr. La répulsion devient séduction. Tout est bon pour arriver à leurs fins. Sexe, drogues, tortures, vols, meurtres, vandalismes. Le bonheur est là, dans le déni de la structure codifiée de notre société.
Peut-on comparer? Je pourrais croire que l'auteur a plongé dans un chaudron "J'Irais Cracher Sur Vos Tombe" de Vian, "Baise Moi" de Despentes, "37,2" de Djian et une pellicule de "A Bout De Souffle" de Godard, a tout fusionné en y ajoutant les piments les plus forts, créant une histoire à vous "cramer" de la première à la dernière ligne, du premier au dernier mot! Ici, on vit dans la tête de l'héroïne, dans son corps, dans sa vie.
C'est ma première rencontre avec cet auteur. Sa plume m'a séduit, son style, le rythme, l'histoire. On est dans le roman noir de chez noir. Cela semble impossible de plonger plus profond dans les abîmes. Ce livre vous aspire, vous entraîne dans sa folle équipée. Vraiment, plus qu'un bon moment de lecture. J'en suis devenu impatient de lire les autres titres de Christophe Siébert."
(Lu sur Babélio - source : http://www.babelio.com/livres/Siebert-LA-PLACE-DU-MORT-Une-serie-Z-existentielle/623384)
***
"bon, j'ai lu ton bouquin hier et j'ai que trois mots à dire nihil nihil nihil"
(Reçu par message Facebook)
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"Je me suis lancé il y a quelque jours dans la lecture de tes livres en commençant par Poésie portable que j'ai enchaîné dans la foulée avec La place du mort.
Explosif! Incandescent!
J'en reviens à ce que t'avais déjà dis sur la poésie : l'instant ! Unique ! Celui qui est immortalisé par les sentiments et dans les yeux d'une personne qui essaie de le traduire.
J'ai trouvé de nombreuses corrélations entre les deux ouvrages ; tout d'abord, avec le poème numéro 10 de Poésie portable, sur la réflectologie des miroirs (oui, c'est un néologisme que j'avais déjà employé dans un de mes textes ou je disait plus précisément " réflectologue" en parlant des miroirs, mais j'aime bien ce mot), dont on retrouve l'idée dans le prologue de La place de mort. Idem pour la mort de Jean-Louis (poème numéro 31) que l'ont retrouve dans les souvenirs de Blandine. Il y a aussi l'idée de la fuite. Pas la fuite par lâcheté mais par nécessité.
D'autre part, j'ai trouvé l'écriture, dès le début du récit, très cinématographique. Je veux dire qu'on à l'impression d'être dans la voiture avec eux. Ensuite la montée de la MD, la route qui cavale dans l'abstraction de la réalité, qui se dérobe sous l'effet de la caméra narrative, l'effet de la substance, du sentiment ! Du moment ! Quelque chose d'instantané.
J'avais l'impression de visionner un traveling tout en restant à leurs côtés.
Ensuite ça s'évapore légèrement lorsque l'on rentre dans l'individualité des personnages. Mais c'est comme ça que je lis un livre ; visuellement. D'ailleurs c'est comme ça que j'écris, car si tu ne peux pas voir la perspective, tu est très restreint et ça obstrue le champ de vision.
Après, la psychologie des personnages. On sent un besoin de révolte. Mais quelque chose d'inné ; comme de primitif. Ce que les événements subis par les protagonistes ont façonné.
L'envie de démolir pour refonder ! Mais malgré tout, je pense que l'on à besoin du passé pour fabriquer le présent.
Et de le démolir à nouveau (le présent).
Je pense à des choses que j'avais déjà écrites, et lisant des trucs bien plus tard, comme Bukowski, Ferré, Lautréamont, Céline, Artaud, tu te dis : mais tous ces fumiers l'on déjà écrit ! Et certainement mieux que moi ! Mais il faut que en parler quand même !
Bref ! Les trois derniers chapitres ; Dans l'église notamment, l'inceste au préalable, dans le musée au final... Que te dire ? Tu exploses les codes et les reformules avec une idéologie nouvelle ! Peut-être pas la bonne d'un point de vue moral ou éthique. Mais on emmerde la morale et l'éthique ! Du très grand et de l'explosif nihilisme ! Avec une morale anarchiste. Si l'anarchisme existe encore...
"L'ordre ! C'est le désordre, moins le pouvoir", disait Ferré.
Bref ! Putain de livre ! Merde!
Je suis défoncé!
Vivent la vodka et la littérature..."
(Reçu par mail)
***
"Je crois que lire d'une traite ce bouquin m'a légèrement perturbée"
(Reçu par mail)
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"Je viens de terminer "La place du mort". Quelques mots sur ma réception...
C'est un fabuleux bouquin, peut-être le meilleur que j'ai pu lire de toi à ce jour. J'y vois en tout cas une sorte de complément direct à "Holocauste" qui m'avait déjà pas mal impressionné à l'époque. La densité narrative y atteint une puissance inouïe, comme un moteur dont on appuierait en permanence sur l'accélérateur. Les derniers chapitres en dégagent une sorte d'énergie en roue libre, incontrôlable. C'est un peu le genre de récit qu'un lecteur normal est obligé d'interrompre de temps à autre, juste histoire de reprendre son souffle. C'est très, mais alors très puissant...
D'une manière générale, la narration au présent et à la première personne est d'une maîtrise absolue. Chaque phrase est comme une respiration. Les scènes pornographiques semblent littéralement haleter, gémir, transpirer jusque dans le rythme, le style. C'est ultra physique. L'influence de Bret E. Elis est très présente (obsession du détail, de ce moment où la perception devient hallucinatoire...) mais est dépassée sur ce terrain-là. Elis, à mon avis, s'est depuis longtemps perdu dans sa propre imagerie glamour là où tu as plutôt opté pour l'exact opposé. En ce sens, tu proposes une oeuvre vraiment unique, à la fois dans le fond et dans la forme.
Contrairement à ce que prétend Ravalec, je ne trouve pas que tu te mettes "au service de la noirceur du monde". Au contraire, il y a dans tout le livre une soif de désir primal, un appétit primitif, insatiable qui habite tous les personnages en permanence. Ça me fait penser à la phrase de Dantec, qui disait : "Survivre, c'est le contraire de sous-vivre". Ce qui est nouveau, c'est qu'on y trouve une authentique histoire d'amour, avec sa part d'enfance, d'absolu, de futile et d’éphémère. Ce qui me touche le plus, c'est cette idée que l'amour n'est ni un "projet de vie", ni un capital, ni une possession, ni même une relation à autrui mais qu'il est juste une flamme sans raison ni but, au-delà même du sexe, de la vie où de la mort. L'amour est ce qui détruit tout. A ma manière, c'est aussi ce que j'essaie de transmettre dans mes textes. En tout cas, ça m'a profondément ému.
Le final au musée du Prado renvoie à l'apocalypse de ton roman précédent, avec l'idée que la fin du monde, c'est la fin de l'art. Dans le genre tabou brisé, ça fait très fort. Voilà une scène hautement satanique et blasphématoire en diable, qui profane le sacré de manière radicale. Là encore, ça me renvoie à une phrase de Nick Cave qui disait à propos du premier concert des Birthday Party : "Nous ne voulions pas choquer, nous voulions faire mal..."
Un truc sur la fin. Arrivé à l'épilogue, je me suis fait la réflexion qu'il y a toujours ce côté post-mortem qui habite tous les bouquins et les films qui ont vraiment compté pour moi. J'ai toujours pensé que le but de toute création est, symboliquement, de nous faire franchir le dernier cap, de nous donner une petite mort comme un avant-goût de la grande. "Enter the void" de Gaspar Noé est entièrement basé sur ce concept. De ce point de vue, ton dernier paragraphe est absolument magnifique. "
(Reçu par mail)
***
"Ayant déjà lu et adoré « Nuit noire » mes attentes envers ce nouveau roman de Christophe Siebert étaient conséquentes, et c’est sans souci qu’elles ont été comblées.
Sordide du début à la fin, ce roman nous raconte la vie de débauche et l’errance d’une jeune femme lucide, désespérée et misanthrope n’ayant plus rien à perdre. À travers une narration très personnelle, Blandine (notre personnage principal) nous expose sa sombre vision du monde avec une souffrance lacérante. Elle nous raconte sa vie, son passé, son présent, et ne mise que peu sur le futur.
D’emblée, les dialogues crus laisseront apparaître l’aspect féministe de se livre nous rappelant quelque peu l’histoire de « Baise moi ». L’aspect traditionnel de la femme est brisé et sa bestialité naturelle reprend le dessus tandis que le dégoût des hommes se prononce à travers leurs faibles pulsions libidinales.
Voici les grandes lignes qui introduiront les grands aspects de ce roman.
Mais concentrons-nous tout d’abord sur le style d’écriture bien particulier consistant, comme le dit Christophe lui-même, à extraire tout « style » et à ne garder que la justesse. Il nous épargnera donc les formulations romantiques, les fins de phrases esthétiques, pour ne laisser que le poids des mots touchant irréversiblement le point névralgique. Malgré des formulations ou des « et » parfois redondants, la fluidité du récit s’amène progressivement d’elle même.
C’est ainsi que nous serons emportés dans la spirale infernale de Blandine qui au gré de ses pérégrinations rencontrera, aimera, détestera, et s’auto-détruira.
« La place du mort » est un roman écrit à vif qui saigne son lecteur, pourtant c’est un roman à la fois dur et à la fois libérateur. Il dégage quelque chose de puissant mais permet au lecteur de s’identifier aux aspects libres et fous de nos protagonistes.
On peut aussi dire que c’est aussi un roman qui ne manque pas d’idée (cf : les cambriolages bien pensées) ni de contenu (cf : Viol homosexuel, torture sur les parties génitales, inceste, fusillade).
Pour conclure, nous avons ici une oeuvre sombre, percutante et viscérale qui nous ramène aux sentiments les plus violents et les plus essentiels de la littérature noire."
(Lu sur le site de Tinam Sadique, source : http://www.sadique-master.com/reviews/la-place-du-mort-2014-christophe-siebert-critique/)
En ce qui me concerne, j'ai vendu tous mes exemplaires. Je suis toujours autant dans la merde alors qu'avec le bénéfice je ne devrais pas, mais c'est parce que je suis un con et un mauvais comptable, ou bien que je m'en fous du fric, ou alors que la pauvreté est une espèce de tare, j'en sais rien. Bref, ça n'est plus la peine de me le commander, il ne m'en reste plus que quelques-uns et ils sont déjà réservés, si vous voulez le lire il va falloir faire comme d'habitude, le commander à l'éditeur (http://www.camionnoir.com/) ou bien harceler votre libraire, et si vous vous sentez une âme de mécène, filez-moi deux ou trois mille euros, j'en ferais bon usage, et pour cette somme je vous écrirai un roman inédit, c'est évidemment une annonce très sérieuse.
J'ai donc écoulé environ 70 exemplaires de La place du mort en un peu plus de deux mois, merci beaucoup à tous ceux qui l'ont acheté et merci aussi à ceux qui m'ont écrit pour me donner leur avis, l'écrivain est un abruti solitaire, les marques d'amour lui réchauffent le cœur.
J'avais fait une sorte de bande-annonce pour vous allécher, bon, maintenant c'est un peu tard, évidemment, mais comme elle est en ligne sur Youtube, autant vous la montrer : https://www.youtube.com/watch?v=AZ5qXu-YGRE.
Et jusqu'à nouvel ordre, la tournée que j'ai fait pour présenter ce livre, tournée de lectures calquée sur ce que font mes copains musiciens, c'était la dernière. J'ai pris bien du plaisir à pour la troisième ou quatrième fois bouffer de la route (enfin, du rail, mais c'est pareil), à être pendant trois semaines dans une ville différente chaque soir, dans le speed, crasseux, repartir tôt le lendemain et rebelote, c'était super mais je sens poindre la routine et je n'en veux plus. Par ailleurs, je commence à avoir trop de bouquins à défendre (Porcherie que je vais peut-être réimprimer, on verra, Poésie portable, La place du mort, Nuit noire qui ressort dans deux mois sous une nouvelle bannière, un nouveau recueil chez Gros Textes début 2016, etc.) pour rester sur le principe 40 mn. de scène / des extraits d'un seul livre. J'ai donc décidé de faire autre chose, et cette chose s'appelle Rituel Drone. J'ai accompli hier, tout seul dans la chambre, le Rituel Drone numéro 1, ça fonctionnait pas mal ; le Rituel Drone numéro 2, et le premier en public, aura lieu à Bourg-en-Bresse dans un hôpital psychiatrique, je vous raconterai ça. Pour ceux qui veulent en savoir un peu plus et/ou m'inviter à venir jouer, j'ai rédigé une petite fiche informative, vous pouvez la lire mais c'est légèrement pompeux, je vous préviens – c'est ma façon d'avoir l'air professionnel.
Christophe Siébert est un écrivain français né en 1974. En 1998, il fonde le collectif konsstrukt. Il est publié à partir de 2007 par La Musardine, Gros Textes, le Camion Noir, etc. Il participe également à divers fanzines et revues (Chimères, Banzaï, Squeeze, Freak Wave, Revue Métèque, etc.) et en crée lui-même (notamment L'Angoisse). Il a reçu en 2007 le prix Art-Psy pour son premier roman "J'ai Peur" et il a été sélectionné en 2012 et en 2014 pour le prix de Sade (respectivement pour "Nuit Noire" et "La place du mort"). Depuis de nombreuses années, il présente sur scène ses parutions, sous forme de lectures musicales plus ou moins performées.
Les romans et la poésie de Christophe Siébert sont empreints de réalisme critique, de violence, de gore, d'horreur sociale, de pornographie, de description naturaliste du quotidien, de métaphysique de comptoir, de féminisme et de postmarxisme. Son style évolue entre une écriture blanche inspirée par les fondateurs du roman noir américain (Hammet, Goodis, etc.), et un lyrisme inspiré par les écrivains français de la génération précédant la sienne (Despentes et Ravalec essentiellement). Selon ses propres termes, son travail relève d'un genre bâtard qu'il nomme : série Z existentielle.
"La densité narrative y atteint une puissance inouïe, comme un moteur dont on appuierait en permanence sur l'accélérateur. Les derniers chapitres en dégagent une sorte d'énergie en roue libre, incontrôlable. C'est un peu le genre de récit qu'un lecteur normal est obligé d'interrompre de temps à autre, juste histoire de reprendre son souffle. C'est très, mais alors très puissant..."
"Je crois que lire d'une traite ce bouquin m'a légèrement perturbée"
(Avis de lecteurs)
Son nouveau projet scénique s'intitule "Rituel Drone". Il consiste à jouer de la musique drone (mélange de parties jouées en direct et de sons préparés) pendant une durée variant de 25 à 120 minutes, cette durée étant décidée à l'avance par Christophe Siébert et par l'organisation. En même temps qu'il jouera cette pièce drone, il lira divers extraits de ses livres, prose et poésie, le tout étant assemblé et monté pour former un ensemble thématiquement cohérent. Cette lecture, soutenue par un jeu de lumière aggressif et oppressant à base de stroboscopes, aura pour but de créer une atmosphère à la fois immersive et de malaise, quelque chose entre le bad trip, le rêve et le fil intime de la pensée qui, selon l'auteur, représente les meilleures conditions possibles pour accéder, si elle existe, à une vérité du texte.
Pour mieux connaître le travail de Christophe Siébert, vous pouvez vous rendre sur son site. Vous y trouverez entr'autres des textes inédits, une bibliographie et des extraits vidéo de ses lectures : http://konsstrukt.wix.com/christophe-siebert
FICHE TECHNIQUE :
Une table de 1m. de large, et assez haute pour pouvoir jouer debout.
Un ampli qui encaisse bien les basses et ne déforme pas trop la voix.
Un espace où C. Siébert pourra disposer des exemplaires de ses ouvrages.
Autant d'obscurité que possible.
Facultativement, quelqu'un qui filme le show.
Installation / balances : 10 minutes.
Durée du show : variable de 25 à 120 minutes, à définir à l'avance.
Désintallation : 10 minutes.
FICHE ECONOMIQUE
Cachet/défraiement : 50 euros + participation aux éventuels bénéfices de la soirée.
Sur place : un repas avant ou après le show.
Un endroit ou dormir.
Voilà, c'est tout pour aujourd'hui. Pas d'extrait de roman, ils n'ont pas avancé. A dans quinze jours !
Christophe Siébert.
Bonjour à tous,
Il n'y a pas énormément d'activité à recenser pour ces quinze derniers jours. La vie réelle, quotidienne je veux dire, a nettement pris le pas sur le travail.
J'ai lu, pour la deuxième fois en dix ans, un bouquin de Philip Roth. C'est beau, c'est ennuyeux, c'est très intelligent, ça suscite des interrogations profondes et un émerveillement pour cette écriture à la fois simple et travaillée, et une fois que c'est terminé on lorgne sur Jim Thompson comme quelqu'un qui a été marié pendant quinze ans, vient de divorcer, sort dans la rue et découvre que les jeans sont moulants et les culs très jolis.
J'ai beaucoup pris le train. Comme d'habitude, il en a résulté une flopée de réflexions sur les manuscrits en cours (Une demi-vie, notamment, devrait prendre de sévères beignes lorsque ce sera son tour que je m'occupe de lui – pour l'instant, je suis surtout sur Descente mais l'envie revient de m'occuper de Rien à foutre ; les autres sont tapis dans un coin de ma tête et mûrissent tranquillement) et un bon tas de poèmes. D'ailleurs, ce constat m'a donné envie d'appeler ce recueil Poésie ferroviaire, ou bien Poèmes ferroviaires, ou encore Poème des trains qui partent et qui arrivent. J'aime bien le premier, qui rappelle Poésie portable, mais malheureusement ne veut pas dire grand chose, le deuxième a une construction moins bancale mais le rythme c'est pas trop ça, et le troisième me plaît bien, en ce moment je crois que j'aime bien les titres longs (la nouvelle que j'ai donnée à Jean-François Dalle pour le prochain numéro de la Revue Métèque s'appelle A mon enterrement je veux qu'il fasse beau – ça doit être le titre le plus long de toute a carrière), mon son petit côté Catherine Pancol me gène...
Bref, une vingtaine de nouveaux poèmes dans mon téléphone, que je vais devoir mettre au propre ces jours-ci – oui, c'est pour ça que mon premier recueil, chez Gros Textes, s'appelle Poésie portable, parce que j'en ai noté la moitié dans mon téléphone, je ne suis pas le genre d'écrivain qui se promène les poches bourrées de moleskine et de Mont-blanc, et en attendant, en voici une petite dizaine :
49
Il y a des séparations qui sontcomme des arbres foudroyés, comme des maisons qui flambent et dontle toit s'effondre et tue les habitants, il y a des séparationspleines de fracas, il y a des séparations qui sont comme descatastrophes, et il y a des séparations qui sont comme une dent uséedont la racine, invisible dans la gencive, s'érode, s'érode, commeune dent usée qui bouge, se détache progressivement, finit par netenir qu'à un bout de racine, qui un jour se détache sans qu'onpuisse bien savoir pourquoi c'est aujourd'hui et pourquoi pas hier,et pourquoi pas demain.
50
Sur France-Inter ils croient
Les bienheureux connards
Que l'argot des ados
Verlan, mots inventés
Ça leur sert à parler
Sans que les parents pigent
Ce serait supposer
Espèces d'hypocrites
Que les adultes écoutent
Ce que disent les jeunes
51
Moi en ce moment ce quim'intéresse au cinéma, dans les films de Bonitzer par exemple, oubien ceux avec Luchini, c'est de voir les actrices interpréter descruches, des potiches, des jolies gourdes, à la télé ce quim'intéresse, en ce moment, c'est de voir des pubs sexistes avec deséduisantes actrices, ça me fascine, je pourrais passer des heuresà regarder ça, je pourrais y passer des heures, à voir ça, à medemander à quoi pensent ces actrices quand elles jouent des connes,quand elles jouent des personnages qui sont tellement, tellement desfantasmes de vieux bourgeois de cinquante ans, à quoi pensent cesactrices quand elles incarnent les fantasmes de jeune femme charmanteet conne, discrète, soumise, cultivée, que les réalisateurs mâlesde cinquante ans mettent en scène sans vergogne, sans aucun sens duridicule, à quoi pensent ces femmes qui se prêtent à ce jeu, c'estça qui me fascine.
52
Ça c'est passé en cinq temps
Un
Nous avons oublié que nosenfants nous étaient en tous points supérieurs
Deux
Ils nous étaient soumis et nousles dominions
Trois
Mais nous avons voulu rétablirl'équilibre
Quatre
Nous avons découvert leursupériorité
D'abord avec surprise
Et puis ravissement
Maintenant nous flippons
Cinq
Oui nous avons peur d'eux
53
On est dans une civilisation quiméprise et craint l'adolescence. C'est significatif, je trouve. LesGrecs en train de crever méprisaient les Barbares. Les adultesdévorés par le cancer –et je parle pas de métastase qui grouille à travers la viande maisde cancer métaphysique, de cancer de l'âme –les adultes, qui érigent la rationalité, le compromis, la mesure,la tempérance en valeurs, tous ces synonymes de la mesquinerie,toutes ces nuances de la veulerie, raillent l'intransigeance, lanaïveté, l'enthousiasme des adolescents. Qu'importe. Les Grecs ontterminé dans les livres d'Histoire et les Barbares ont prospéré.Ce qui meurt méprise ce qui vit, c'est un mouvement naturel, tandisque ce qui vit ignore purement et simplement ce qui meurt, ce qui vitassassine ce qui meurt en toute impunité et en toute inconscience.
54
Les bourgeois blancs hétérosont fantasmé un monde ou les hommes n'auraient pas le devoir d'êtrebeaux mais riches à la place, ni d'être intelligents mais d'êtreéduqués, pas besoin d'être en vie, il y a l'art pour ça ;les bourgeois blancs hétéros ont fantasmé un monde où ilsseraient bourgeois et où ça suffirait, ils ont rêvé d'un monde oùdes filles très belles et très intelligentes se soumettraient àeux et nommeraient ça l'amour.
Ils l'ont construit ce monde.Oui, ils l'ont fabriqué. Vous ne sentez pas, dans les rues, dans lesbeaux quartiers des grandes villes, cette odeur de malaise ?
55
Faire les choses avec ténacité
Faire les choses avec compétence
Faire la preuve de son talent
Faire les choses bien
Faire en sorte d'être un bonartisan
Contempler son travail
Contempler ses progrès
Et être fier de soi
***
Faire les choses avec ténacité
Faire les choses avec compétence
Faire la preuve de quelque chosemais sans trop savoir quoi
Faire les choses tantôt bien,tantôt mal
Savoir ce qu'il faut faire, cequ'il ne faut pas faire
Savoir ce qu'on attend de soi etne jamais le faire, devenir écrivain
Contempler son travail
Contempler son échec
Se demander pourquoi ça ne veutpas marcher, refuser de voir la réponse alors qu'elle s'étale plusgrosse que l'échec
***
Ne pas jouer le jeu
S'étonner de ne pas le gagner
Se croire intelligent
56
Le délabrement
Est si progressif
Si lent
Qu'on ne le sent pas
Venir
La souffrance
Remplit
Par si petites touches
Jour après jour
Qu'on ne la sent pas
Venir
Et un beau jour
On est une ruine
Et un beau jour
On en est rempli
De cette douleur
Un beau jour
Ce corps
Ne marche plus
Du tout
Mais on n'a rien vu
Arriver
C'était si lent
Si progressif
On n'a rien vu
Venir
Et on ne souffre
Pas tant que ça
C'est exactement
Comme si on se noyait
En s'éloignant
Du bord
En pente
Si douce
Que pour avoir de l'eau
Jusqu'aux hanches
Il faut marcher
Deux bornes
Tant que j'y suis à mettre des textes, voici la nouvelle qui sera dans la Revue Métèque, que j'ai relue hier soir et que j'aime bien, finalement. Je suis content d'avoir réussi un truc sans pétage de plomb ni cadavre, je pensais pas y arriver sans devenir aussi chiant qu'un écrivain français ; vous me direz si j'ai perdu la niaque ou pas.
A MON ENTERREMENT JE VEUX QU'IL FASSE BEAU
— Tiens,c'est marrant, tu t'en rappelles, de ça ?
Jetenais à la main un cendrier en céramique bleue, avec écrit dessusl'hôtel où nous avions dormi pendant nos vacances en Espagne, jevenais juste de le retrouver au fond du tiroir. J'ai souri. Elle l'aregardé sans expression mais au bout d'un moment, comme j'avaistoujours mon sourire accroché à la figure, elle a souri aussi.
— Tute souviens ? Tu l'avais piqué à la réception.
Jebrandissais toujours l'objet, surjouant quelque chose mais sans biensavoir quoi.
— C'estmarrant, elle a dit, j'avais oublié qu'on l'avait encore, ce truc.Tu l'as trouvé où ? Dans le tiroir ?
— Oui,dans le tiroir. Au fond.
Jene souriais plus. C'était à cause du mot « tiroir ». Etpuis j'ai regardé la valise et remis le cendrier où je l'avaistrouvé, plus certain de grand-chose. J'ai enfilé mes chaussures etune veste, je me suis dirigé vers la porte, je n'ai rien dit.
— Tusors ?
— Cinqminutes, prendre un peu l'air.
J'airefermé sans bruit la porte derrière moi et descendu l'escalier.Dans la rue la lumière jaune et chaude était magnifique, le cielbleu sombre, nettoyé par l'orage, tout qui brillait d'humidité,c'est comme ça que j'aurais voulu que ce soit à mon enterrement.
J'aidéambulé et jeté un œil aux gens et à mon ombre qui parfoiss'étirait comme un Giacometti. A une terrasse j'ai commandé undemi, eu droit en plus à une coupelle de chips, toutes les tablesétaient occupées et tout le monde parlait fort en profitant dusoleil, j'ai savouré tout ça un moment, ça faisait du bien. Je neregardais rien en particulier et j'écoutais sans y faire attentiondes bouts de conversations et peut-être que ça me donnait l'aird'un type en train de réfléchir à des choses importantes maisc'était tout le contraire, j'étais vide de toute pensée, de toutephrase même, il ne me restait plus qu'une poignée de mot,« tiroir », « valise », qui me rendaienttriste, j'essayais de les éviter, et mes émotions étaient réduitesà rien, des petits bouts de peau se détachant tout seuls.
Quandje suis revenu à l'appart il faisait nuit, j'étais bourré et ellen'était plus là, la valise non plus. Le tiroir était refermé avecsans doute le cendrier dedans. Au lieu d'aller vérifier je suisdescendu à l'épicerie m'acheter une bouteille de vodka et unebrique de jus d'orange. C'est à mon retour que j'ai vu la lettre.Elle était posée sur la table, trois feuilles couvertes de sonécriture, je l'ai froissée sans la lire et jetée à la poubelle.
Jeme suis réveillé dans le canapé, il faisait jour depuis longtemps,la lumière plus belle encore que la veille, cendrée, d'une douceurhumide de printemps anglais, le ciel bleu tendre. J'ai regardé unmoment s'effilocher quelques nuages et puis je suis allé à lacuisine récupérer la lettre. Elle avait des tâches de gras et desauce tomate. Je l'ai lue.
Ensuitej'ai essayé d'avancer un peu dans mon travail mais ça ne donnaitrien de bon, alors j'ai fait le ménage et une fois le ménage finije suis retourné dans le canapé et j'ai somnolé devant la téléen m'efforçant de ne penser à rien, ce qui s'est avéré bien moinsdur que prévu. De temps en temps, à voix haute, je me posais laquestion :
— Est-ceque tu es triste ?
Oubien, avec cette variante :
— Est-ceque tu es triste, connard ?
Maisje n'avais pas de réponse. Plus tard mon téléphone a sonné,c'était elle, je ne voulais pas lui parler, j'ai laissé sonner.Trente minutes ont passé. La télé rendait sans significationl'écoulement du temps. La clé a tourné dans la serrure.
— Tiens,elle a dit, tu as fait le ménage.
— Unpeu, j'ai répondu.
— Tuas bien fait. Ça sent bon. Tu as trouvé ma lettre ?
— Oui.
— J'aioublié de prendre des trucs, je suis désolée, je ne voulais pasdébarquer à l'improviste. Mais tu as fait le ménage. C'estmarrant.
— Tues chez toi.
— J'aitéléphoné avant, pour prévenir, tu n'as pas répondu.
— Tues chez toi.
J'aiattrapé la télécommande et baissé le son pendant qu'elle allaitdans la chambre. Je l'ai entendue farfouiller. Je me suis dit que jen'avais même pas cherché à savoir ce qu'elle avait pris la veille,ce qu'elle avait laissé, ou peut-être que je l'avais fait cettenuit mais que je ne m'en souvenais plus.
— Jene trouve plus mon écharpe, tu ne sais pas où elle est ?
J'airépondu non mais c'était inaudible, alors je me suis levé, j'aitraversé le salon et j'ai à nouveau répondu non. Ma voix n'avaitpas beaucoup de vigueur.
Ensuite,je ne sais pas trop comment ça c'est enchaîné, nous avons faitl'amour, et puis j'ai fait du café et elle a fini par descendreacheter du vin à l'épicerie, puis ça a été mon tour, et ainsi desuite. La journée s'est passée de cette manière, nous avonsdiscuté, la glace était rompue, c'était comme un premierrendez-vous mais pour la deuxième fois. J'ai pensé à Fitzgerald.
Aun moment j'ai voulu savoir où elle dormait. Elle m'a répondu àl'hôtel pour quelques jours et puis ensuite chez Sonia. Vers neufheures du soir, nous avions bien bu, elle m'a demandé de lareconduire et j'ai accepté et au bar de l'hôtel nous en avonscommandé un dernier, ça n'était pas mal, nous étions dans desfauteuils en cuir sous une lumière cosy, et nous avons refaitl'amour dans la chambre propre et impersonnelle. Avant de partir,pendant qu'elle prenait une douche, j'ai regardé un moment dehors.C'était bizarre d'observer depuis un point de vue totalement inéditcette rue que je connaissais par cœur, d'être un touriste dans mapropre ville. Quand elle est sortie de la douche elle sentait bonmais c'était l'odeur de l'hôtel, elle sentait bon d'une odeur queje ne lui connaissais pas. A ce moment-là, si j'avais prononcé lesbonnes phrases j'aurais pu rester avec elle, ou bien nous serionsrentrés ensemble, mais je n'avais plus de force, je n'ai rien dit àpart « je vais y aller ». Je lui ai promis qu'ons'appellerait bientôt, je lui ai promis de répondre si elle metéléphonait, et puis nous sommes restés sur le seuil comme unepaire d'idiots sans plus savoir quoi faire. Nous nous sommesfinalement roulés des pelles en nous serrant dans nos bras et deretour à la maison j'ai achevé tout seul la murge que nous avionscommencée ensemble.
Aumilieu de la nuit elle a appelé, aussi bourrée que moi. Nous avonsparlé jusqu'à ce que le soleil se lève, nous l'avons regardé selever, à un moment un avion a passé dans son ciel, devant safenêtre, nous avons compté jusqu'à huit et je l'ai vu aussi. Unefois dans mon lit j'ai trouvé que c'était gros comme une maison, lasuite de tout ça, mais quelques heures plus tard, au réveil, dansune lumière saine et dure de désert californien, ça n'était plusaussi évident.
Jel'ai imaginée s'étirer dans son lit et descendre boire un café encompagnie des touristes. Je me suis demandé quelle serait sa journée.
La place du mort semble bien démarrer. Outre des retours de lecture qui font bien plaisir, je vais avoir une chronique dans le numéro d'août d'Obsküre, probablement une chronique dans le numéro d'octobre de New Noise, et il y a d'autres trucs qui devraient arriver, mais tant que c'est pas confirmé je préfère éviter de me vanter (sauf auprès de mes copains, mais là c'est plus de la vantardise, c'est carrément du radotage).
"Je viens de finir La place du mort et c'est vraiment un regal, je suis vraiment passé de surprise en surprise. Des Tueurs-Nés sans media
Des Punks qui s'amusent et qui vibrent de leurs destructions
Une destruction qui appelle à un renouveau
Des superbes images (yeux fermés au bord de la route, s'allonger sur des rails) qui remuent et émeuvent
J'ai pas vraiment les mots, mais ca fait plaisir de sentir que des NOT DEAD talentueux existent encore."
(Reçu par message Facebook)
***
"Je viens de finir La Place du Mort, que j'ai descendu cul sec. J'ai beaucoup aimé, c'était chouette, un vrai trip. Et va te coucher après ça hein, parce qu'à part prendre une batte en alu et aligner les pequenots au feu rouge, non, je ne vois pas ! la scène de mariage flingué m'a bien plu et le dézinguage de téléphones aussi, deux en un, ça fait un bien fou. Et toujours ton don pour exprimer des ressentis intimes et pour éclairer les comportements humains différemment. C'est très romanesque, très emporté, et ça ne ressemble qu'à du Siébert, je ne vois pas avec qui je pourrais comparer. Sous les croûtes y'a une route, merci et bravo pour ce roman."
(Reçu par message Facebook)
***
"J'ai découvert ce roman grâce à Fabrice Colin (Bal de Givre à New-York, Blue Jay Way, ...), un auteur que j'apprécie énormément. Quand il met en avant un auteur ou un roman sur son blog, je fais confiance en son jugement et acquière le livre. Je n'ai jamais été déçu par ses conseils. Une fois de plus, je viens de me régaler avec "La Place du Mort, série Z existentielle" de Christophe Siébert.
Ames sensibles, s'abstenir! Ici, on ne fait pas dans la dentelle. Une fille paumée rencontre un gars paumé. Ils veulent refaire le monde, pour eux, nous sommes tous des morts vivants. La meilleure façon de refaire le monde, c'est de le détruire, de se détruire mais pas sans gloire, sans plaisir. La mort est le grâle, l'orgasme ultime, originel! Cette histoire est un grand coup d'accélérateur, ne freine jamais, monte et monte encore en puissance, jusqu'à la fin, un bouquet final digne des meilleurs feux de Bengale. Tant par le rythme de l'histoire que par l'écriture.
C'est le monde à l'envers. On fini par aimer les personnages, décalés, amoraux, sans scrupule, hédonistes, qui trouvent leur plaisir dans tout ce que notre société nous a appris à haïr. La répulsion devient séduction. Tout est bon pour arriver à leurs fins. Sexe, drogues, tortures, vols, meurtres, vandalismes. Le bonheur est là, dans le déni de la structure codifiée de notre société.
Peut-on comparer? Je pourrais croire que l'auteur a plongé dans un chaudron "J'Irais Cracher Sur Vos Tombe" de Vian, "Baise Moi" de Despentes, "37,2" de Djian et une pellicule de "A Bout De Souffle" de Godard, a tout fusionné en y ajoutant les piments les plus forts, créant une histoire à vous "cramer" de la première à la dernière ligne, du premier au dernier mot! Ici, on vit dans la tête de l'héroïne, dans son corps, dans sa vie.
C'est ma première rencontre avec cet auteur. Sa plume m'a séduit, son style, le rythme, l'histoire. On est dans le roman noir de chez noir. Cela semble impossible de plonger plus profond dans les abîmes. Ce livre vous aspire, vous entraîne dans sa folle équipée. Vraiment, plus qu'un bon moment de lecture. J'en suis devenu impatient de lire les autres titres de Christophe Siébert."
(Lu sur Babélio - source : http://www.babelio.com/livres/Siebert-LA-PLACE-DU-MORT-Une-serie-Z-existentielle/623384)
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"bon, j'ai lu ton bouquin hier et j'ai que trois mots à dire nihil nihil nihil"
(Reçu par message Facebook)
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"Je me suis lancé il y a quelque jours dans la lecture de tes livres en commençant par Poésie portable que j'ai enchaîné dans la foulée avec La place du mort.
Explosif! Incandescent!
J'en reviens à ce que t'avais déjà dis sur la poésie : l'instant ! Unique ! Celui qui est immortalisé par les sentiments et dans les yeux d'une personne qui essaie de le traduire.
J'ai trouvé de nombreuses corrélations entre les deux ouvrages ; tout d'abord, avec le poème numéro 10 de Poésie portable, sur la réflectologie des miroirs (oui, c'est un néologisme que j'avais déjà employé dans un de mes textes ou je disait plus précisément " réflectologue" en parlant des miroirs, mais j'aime bien ce mot), dont on retrouve l'idée dans le prologue de La place de mort. Idem pour la mort de Jean-Louis (poème numéro 31) que l'ont retrouve dans les souvenirs de Blandine. Il y a aussi l'idée de la fuite. Pas la fuite par lâcheté mais par nécessité.
D'autre part, j'ai trouvé l'écriture, dès le début du récit, très cinématographique. Je veux dire qu'on à l'impression d'être dans la voiture avec eux. Ensuite la montée de la MD, la route qui cavale dans l'abstraction de la réalité, qui se dérobe sous l'effet de la caméra narrative, l'effet de la substance, du sentiment ! Du moment ! Quelque chose d'instantané.
J'avais l'impression de visionner un traveling tout en restant à leurs côtés.
Ensuite ça s'évapore légèrement lorsque l'on rentre dans l'individualité des personnages. Mais c'est comme ça que je lis un livre ; visuellement. D'ailleurs c'est comme ça que j'écris, car si tu ne peux pas voir la perspective, tu est très restreint et ça obstrue le champ de vision.
Après, la psychologie des personnages. On sent un besoin de révolte. Mais quelque chose d'inné ; comme de primitif. Ce que les événements subis par les protagonistes ont façonné.
L'envie de démolir pour refonder ! Mais malgré tout, je pense que l'on à besoin du passé pour fabriquer le présent.
Et de le démolir à nouveau (le présent).
Je pense à des choses que j'avais déjà écrites, et lisant des trucs bien plus tard, comme Bukowski, Ferré, Lautréamont, Céline, Artaud, tu te dis : mais tous ces fumiers l'on déjà écrit ! Et certainement mieux que moi ! Mais il faut que en parler quand même !
Bref ! Les trois derniers chapitres ; Dans l'église notamment, l'inceste au préalable, dans le musée au final... Que te dire ? Tu exploses les codes et les reformules avec une idéologie nouvelle ! Peut-être pas la bonne d'un point de vue moral ou éthique. Mais on emmerde la morale et l'éthique ! Du très grand et de l'explosif nihilisme ! Avec une morale anarchiste. Si l'anarchisme existe encore...
"L'ordre ! C'est le désordre, moins le pouvoir", disait Ferré.
Bref ! Putain de livre ! Merde!
Je suis défoncé!
Vivent la vodka et la littérature..."
(Reçu par mail)
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"Je crois que lire d'une traite ce bouquin m'a légèrement perturbée"
(Reçu par mail)
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"Je viens de terminer "La place du mort". Quelques mots sur ma réception...
C'est un fabuleux bouquin, peut-être le meilleur que j'ai pu lire de toi à ce jour. J'y vois en tout cas une sorte de complément direct à "Holocauste" qui m'avait déjà pas mal impressionné à l'époque. La densité narrative y atteint une puissance inouïe, comme un moteur dont on appuierait en permanence sur l'accélérateur. Les derniers chapitres en dégagent une sorte d'énergie en roue libre, incontrôlable. C'est un peu le genre de récit qu'un lecteur normal est obligé d'interrompre de temps à autre, juste histoire de reprendre son souffle. C'est très, mais alors très puissant...
D'une manière générale, la narration au présent et à la première personne est d'une maîtrise absolue. Chaque phrase est comme une respiration. Les scènes pornographiques semblent littéralement haleter, gémir, transpirer jusque dans le rythme, le style. C'est ultra physique. L'influence de Bret E. Elis est très présente (obsession du détail, de ce moment où la perception devient hallucinatoire...) mais est dépassée sur ce terrain-là. Elis, à mon avis, s'est depuis longtemps perdu dans sa propre imagerie glamour là où tu as plutôt opté pour l'exact opposé. En ce sens, tu proposes une oeuvre vraiment unique, à la fois dans le fond et dans la forme.
Contrairement à ce que prétend Ravalec, je ne trouve pas que tu te mettes "au service de la noirceur du monde". Au contraire, il y a dans tout le livre une soif de désir primal, un appétit primitif, insatiable qui habite tous les personnages en permanence. Ça me fait penser à la phrase de Dantec, qui disait : "Survivre, c'est le contraire de sous-vivre". Ce qui est nouveau, c'est qu'on y trouve une authentique histoire d'amour, avec sa part d'enfance, d'absolu, de futile et d’éphémère. Ce qui me touche le plus, c'est cette idée que l'amour n'est ni un "projet de vie", ni un capital, ni une possession, ni même une relation à autrui mais qu'il est juste une flamme sans raison ni but, au-delà même du sexe, de la vie où de la mort. L'amour est ce qui détruit tout. A ma manière, c'est aussi ce que j'essaie de transmettre dans mes textes. En tout cas, ça m'a profondément ému.
Le final au musée du Prado renvoie à l'apocalypse de ton roman précédent, avec l'idée que la fin du monde, c'est la fin de l'art. Dans le genre tabou brisé, ça fait très fort. Voilà une scène hautement satanique et blasphématoire en diable, qui profane le sacré de manière radicale. Là encore, ça me renvoie à une phrase de Nick Cave qui disait à propos du premier concert des Birthday Party : "Nous ne voulions pas choquer, nous voulions faire mal..."
Un truc sur la fin. Arrivé à l'épilogue, je me suis fait la réflexion qu'il y a toujours ce côté post-mortem qui habite tous les bouquins et les films qui ont vraiment compté pour moi. J'ai toujours pensé que le but de toute création est, symboliquement, de nous faire franchir le dernier cap, de nous donner une petite mort comme un avant-goût de la grande. "Enter the void" de Gaspar Noé est entièrement basé sur ce concept. De ce point de vue, ton dernier paragraphe est absolument magnifique. "
(Reçu par mail)
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"Ayant déjà lu et adoré « Nuit noire » mes attentes envers ce nouveau roman de Christophe Siebert étaient conséquentes, et c’est sans souci qu’elles ont été comblées.
Sordide du début à la fin, ce roman nous raconte la vie de débauche et l’errance d’une jeune femme lucide, désespérée et misanthrope n’ayant plus rien à perdre. À travers une narration très personnelle, Blandine (notre personnage principal) nous expose sa sombre vision du monde avec une souffrance lacérante. Elle nous raconte sa vie, son passé, son présent, et ne mise que peu sur le futur.
D’emblée, les dialogues crus laisseront apparaître l’aspect féministe de se livre nous rappelant quelque peu l’histoire de « Baise moi ». L’aspect traditionnel de la femme est brisé et sa bestialité naturelle reprend le dessus tandis que le dégoût des hommes se prononce à travers leurs faibles pulsions libidinales.
Voici les grandes lignes qui introduiront les grands aspects de ce roman.
Mais concentrons-nous tout d’abord sur le style d’écriture bien particulier consistant, comme le dit Christophe lui-même, à extraire tout « style » et à ne garder que la justesse. Il nous épargnera donc les formulations romantiques, les fins de phrases esthétiques, pour ne laisser que le poids des mots touchant irréversiblement le point névralgique. Malgré des formulations ou des « et » parfois redondants, la fluidité du récit s’amène progressivement d’elle même.
C’est ainsi que nous serons emportés dans la spirale infernale de Blandine qui au gré de ses pérégrinations rencontrera, aimera, détestera, et s’auto-détruira.
« La place du mort » est un roman écrit à vif qui saigne son lecteur, pourtant c’est un roman à la fois dur et à la fois libérateur. Il dégage quelque chose de puissant mais permet au lecteur de s’identifier aux aspects libres et fous de nos protagonistes.
On peut aussi dire que c’est aussi un roman qui ne manque pas d’idée (cf : les cambriolages bien pensées) ni de contenu (cf : Viol homosexuel, torture sur les parties génitales, inceste, fusillade).
Pour conclure, nous avons ici une oeuvre sombre, percutante et viscérale qui nous ramène aux sentiments les plus violents et les plus essentiels de la littérature noire."
(Lu sur le site de Tinam Sadique, source : http://www.sadique-master.com/reviews/la-place-du-mort-2014-christophe-siebert-critique/)
En ce qui me concerne, j'ai vendu tous mes exemplaires. Je suis toujours autant dans la merde alors qu'avec le bénéfice je ne devrais pas, mais c'est parce que je suis un con et un mauvais comptable, ou bien que je m'en fous du fric, ou alors que la pauvreté est une espèce de tare, j'en sais rien. Bref, ça n'est plus la peine de me le commander, il ne m'en reste plus que quelques-uns et ils sont déjà réservés, si vous voulez le lire il va falloir faire comme d'habitude, le commander à l'éditeur (http://www.camionnoir.com/) ou bien harceler votre libraire, et si vous vous sentez une âme de mécène, filez-moi deux ou trois mille euros, j'en ferais bon usage, et pour cette somme je vous écrirai un roman inédit, c'est évidemment une annonce très sérieuse.
J'ai donc écoulé environ 70 exemplaires de La place du mort en un peu plus de deux mois, merci beaucoup à tous ceux qui l'ont acheté et merci aussi à ceux qui m'ont écrit pour me donner leur avis, l'écrivain est un abruti solitaire, les marques d'amour lui réchauffent le cœur.
J'avais fait une sorte de bande-annonce pour vous allécher, bon, maintenant c'est un peu tard, évidemment, mais comme elle est en ligne sur Youtube, autant vous la montrer : https://www.youtube.com/watch?v=AZ5qXu-YGRE.
Et jusqu'à nouvel ordre, la tournée que j'ai fait pour présenter ce livre, tournée de lectures calquée sur ce que font mes copains musiciens, c'était la dernière. J'ai pris bien du plaisir à pour la troisième ou quatrième fois bouffer de la route (enfin, du rail, mais c'est pareil), à être pendant trois semaines dans une ville différente chaque soir, dans le speed, crasseux, repartir tôt le lendemain et rebelote, c'était super mais je sens poindre la routine et je n'en veux plus. Par ailleurs, je commence à avoir trop de bouquins à défendre (Porcherie que je vais peut-être réimprimer, on verra, Poésie portable, La place du mort, Nuit noire qui ressort dans deux mois sous une nouvelle bannière, un nouveau recueil chez Gros Textes début 2016, etc.) pour rester sur le principe 40 mn. de scène / des extraits d'un seul livre. J'ai donc décidé de faire autre chose, et cette chose s'appelle Rituel Drone. J'ai accompli hier, tout seul dans la chambre, le Rituel Drone numéro 1, ça fonctionnait pas mal ; le Rituel Drone numéro 2, et le premier en public, aura lieu à Bourg-en-Bresse dans un hôpital psychiatrique, je vous raconterai ça. Pour ceux qui veulent en savoir un peu plus et/ou m'inviter à venir jouer, j'ai rédigé une petite fiche informative, vous pouvez la lire mais c'est légèrement pompeux, je vous préviens – c'est ma façon d'avoir l'air professionnel.
Christophe Siébert est un écrivain français né en 1974. En 1998, il fonde le collectif konsstrukt. Il est publié à partir de 2007 par La Musardine, Gros Textes, le Camion Noir, etc. Il participe également à divers fanzines et revues (Chimères, Banzaï, Squeeze, Freak Wave, Revue Métèque, etc.) et en crée lui-même (notamment L'Angoisse). Il a reçu en 2007 le prix Art-Psy pour son premier roman "J'ai Peur" et il a été sélectionné en 2012 et en 2014 pour le prix de Sade (respectivement pour "Nuit Noire" et "La place du mort"). Depuis de nombreuses années, il présente sur scène ses parutions, sous forme de lectures musicales plus ou moins performées.
Les romans et la poésie de Christophe Siébert sont empreints de réalisme critique, de violence, de gore, d'horreur sociale, de pornographie, de description naturaliste du quotidien, de métaphysique de comptoir, de féminisme et de postmarxisme. Son style évolue entre une écriture blanche inspirée par les fondateurs du roman noir américain (Hammet, Goodis, etc.), et un lyrisme inspiré par les écrivains français de la génération précédant la sienne (Despentes et Ravalec essentiellement). Selon ses propres termes, son travail relève d'un genre bâtard qu'il nomme : série Z existentielle.
"La densité narrative y atteint une puissance inouïe, comme un moteur dont on appuierait en permanence sur l'accélérateur. Les derniers chapitres en dégagent une sorte d'énergie en roue libre, incontrôlable. C'est un peu le genre de récit qu'un lecteur normal est obligé d'interrompre de temps à autre, juste histoire de reprendre son souffle. C'est très, mais alors très puissant..."
"Je crois que lire d'une traite ce bouquin m'a légèrement perturbée"
(Avis de lecteurs)
Son nouveau projet scénique s'intitule "Rituel Drone". Il consiste à jouer de la musique drone (mélange de parties jouées en direct et de sons préparés) pendant une durée variant de 25 à 120 minutes, cette durée étant décidée à l'avance par Christophe Siébert et par l'organisation. En même temps qu'il jouera cette pièce drone, il lira divers extraits de ses livres, prose et poésie, le tout étant assemblé et monté pour former un ensemble thématiquement cohérent. Cette lecture, soutenue par un jeu de lumière aggressif et oppressant à base de stroboscopes, aura pour but de créer une atmosphère à la fois immersive et de malaise, quelque chose entre le bad trip, le rêve et le fil intime de la pensée qui, selon l'auteur, représente les meilleures conditions possibles pour accéder, si elle existe, à une vérité du texte.
Pour mieux connaître le travail de Christophe Siébert, vous pouvez vous rendre sur son site. Vous y trouverez entr'autres des textes inédits, une bibliographie et des extraits vidéo de ses lectures : http://konsstrukt.wix.com/christophe-siebert
FICHE TECHNIQUE :
Une table de 1m. de large, et assez haute pour pouvoir jouer debout.
Un ampli qui encaisse bien les basses et ne déforme pas trop la voix.
Un espace où C. Siébert pourra disposer des exemplaires de ses ouvrages.
Autant d'obscurité que possible.
Facultativement, quelqu'un qui filme le show.
Installation / balances : 10 minutes.
Durée du show : variable de 25 à 120 minutes, à définir à l'avance.
Désintallation : 10 minutes.
FICHE ECONOMIQUE
Cachet/défraiement : 50 euros + participation aux éventuels bénéfices de la soirée.
Sur place : un repas avant ou après le show.
Un endroit ou dormir.
Voilà, c'est tout pour aujourd'hui. Pas d'extrait de roman, ils n'ont pas avancé. A dans quinze jours !
Christophe Siébert.
konsstrukt- Écritoirien émérite stagiaire
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Re: actualités août-septembre 2014
Bonjour à tous.
Sur Internet, sur un forum, j'ai trouvé ça :
« Sous l'étain pas dans la boue un chien qui hume un tas qui geint l'obscurité glisse vers la terre grasse l'enchevêtrement brun des restes et glisse encore. Les sols gorgés exsudent les sucres de la pourriture pour des coquelicots frémissants en devenir sous la croûte. De là partent galeries conduits humides boyaux visqueux qui s'enfoncent toujours plus profond dans la germination. C'est ainsi qu'un organisme éclot tout en bouche, un filet de voix noyé à l'hélium. »
Bon. Ça me fait penser, moi, qu'il y a deux écoles, en littérature : ceux qui s'efforcent de trouver la forme la plus simple et la plus efficace pour faire passer des idées ou des émotions complexes, et ceux qui font l'inverse. Ceux-là on le retrouve souvent sur les forums de poésie. Quand j'ai débarqué sur Internet il y a quinze ans, me disant que ce serait un bon moyen de me faire connaître et de trouver des lecteurs – un meilleur moyen, en tout cas, que ce que je faisais à ce moment-là dans ce but, c'est à dire : rien, j'ai fait un petit tour de ce qui s'écrivait, se lisait, se commentait. Il y a une chose qui m'a frappé. Je me suis dit mais bordel, comment faire pour que tout le monde pige de suite que je ne fais pas partie des 95% de tarés qui écrivent de la merde et prennent Internet pour leur déversoir personnel, que je suis un véritable écrivain et pas un débile qui fantasme à l'être ? Ça peut paraître arrogant mais je savais qui j'étais. Je savais que j'étais un mauvais écrivain, c'est à dire un écrivain débutant, sans presque aucun moyen technique, sans discipline, sans que dalle, mais, merde, un écrivain quand même. Je savais que je n'écrivais pas, que je n'écrirais jamais, « sous l'étain pas dans la boue un chien qui hume un tas qui geint » ; je le savais. Et puis j'ai roulé ma bosse, bon. Maintenant je m'éloigne d'Internet. Mais je suis content de constater que depuis tout ce temps le niveau s'est un peu élevé. C'est à dire, les incapables le sont toujours et sont toujours là (il n'y a pas de miracle), mais la jeune génération est meilleure, même s'il n'y a pas souvent de quoi s'en relever la nuit. Bref. Et tandis que je méditais sur l'incroyable beauté de « l'obscurité [qui] glisse vers la terre grasse », j'ai reçu un mail. Vous verrez, il y a quelques phrases qui percutent aussi. Il faudrait, je pense, que quelqu'un tisse des liens théoriques entre la poésie expérimentale du dimanche et les spams automatiquement traduits. Il faudrait un universitaire un peu cinglé.
« Bonjour, Je suis tombé sur votre adresse e-mail lors d'une promenade dans mon temps libre sur internet et c'est là que j'ai décidé de vous contacter dans la mêlée pour vous parler de mon but, car il est dans le fer au feu devient acier et la trempe. C'est la douleur que l'homme est la révélation de sa force. Je souffre d'une maladie qui dégrade ma santé au quotidien et la médecine ne pouvait rien faire pour me sauver pendant trois ans. Conscient de ma décision, j'ai décidé de vous écrire pour vous avoir une affaire avec vous pour sauver les enfants atteints de maladies graves. Je veux mettre dans mon procession des fonds d'une valeur d'environ € 800 000 (cent mille Euros Hui) que j'ai gardé dans une banque parce qu'ils n'ont personne qui peut bénéficier de ma propriété. »
Sinon c'est la rentrée littéraire, bientôt. On parle déjà des premiers livres publiés par les nouveaux romanciers de cette année. Quelques éléments biographiques filtrent dans la presse : étudiante en philosophie ; éditeur ; journaliste ; auteur d'une thèse de philosophie ; ancienne libraire devenue journaliste ; éditorialiste des Inrocks ; étudiant à Normale-Sup. Woaw. Juste pour comparer, quelques éléments biographiques des crevards de La Grosse Revue : employée d'un laboratoire d'analyses ; guide touristique ; femme de ménage ; chômeur ; bénéficiaire de l'AAH ; travailleur social ; prof en mi-temps thérapeutique ; suicidé – bon, j'arrête là la liste, vous avez pigé l'idée.
Moi, je ne tire de tout ça aucune conclusion. Vraiment, aucune. A part que c'est toujours pas cette année que je vais camper devant la FNAC en attendant septembre.
Retour au travail au cours de cette quinzaine, même si elle a été un peu mouvementée. Mes divers manuscrits en cours sont en train, pour certains, de fusionner. Ça me donne l'impression d'un gros ragoût qui mijote, ou alors d'un monstre étrange qui absorbe des trucs et des machins. Le monstre, c'est Descente, et ceux qui se font tranquillement absorber, ce sont Rien à foutre et Zone d'ombre. Je l'avais pressenti il y a quelques semaines, et désormais c'est sûr et certain.
Voici un extrait de Rien à foutre, qui devrait finalement se retrouver dans Descente (c'est du premier jet absolument pas relu) :
CASSETTE 1 / FACE A
TEST
— Bon, raconte quelque chose, c'est juste pour vérifier la bande. Raconte ce que tu veux, on s'en fout.
— Tiens c'est drôle, il y a un truc qui me revient.
— Vas-y, raconte.
— C'est quand j'étais en foyer. C'était en pleine nuit. J'avais entendu du bruit dans les lavabos. Vous savez, c'était le genre de foyer où on pouvait circuler sans problème, j'avais les clés de ma piaule et tout, c'était des bâtiments isolés de la route, en périphérie de la ville, quatre ou cinq bâtiments d'habitations et un autre qui servait de réfectoire, cuisines et bureaux pour les éducs et tout ça.
— Oui...
— Et donc dans chaque bâtiment, une demi-douzaine de chambres individuelles et un local avec quelques douches et des chiottes, et c'est de là que vient le bruit, un bruit de baise j'avais l'impression – sauf que c'était pas mixte, le foyer, et de toute façon ça ressemblait davantage à deux mecs en train de baiser, plutôt qu'à un mec et une fille.
— Et tu as fait quoi ?
— Bin d'abord je suis resté un moment à écouter. Il devait être, je sais pas, deux ou trois heures du matin, quoi, c'était les vacances de Noël, et je pensais être le seul type encore dans le foyer, je pensais qu'ils étaient tous partis en vacances.
— C'est bon, ça enregistre.
— Ah ? Et je [...]
RECIT
— Vas-y, continue ton histoire, termine.
— Ça enregistre, là ?
— Oui.
— Vous êtes sûrs ?
— Oui, oui.
— Bon. J'y vais, alors.
— Nous t'écoutons.
— Au bout d'un moment, je me suis levé pour aller voir. Je me suis approché doucement, pour mater, quoi. Je voulais pas les interrompre ou quoi, et surtout pas me faire voir, juste me marrer un coup, enfin, voir, quoi. Pour une fois qu'il se passait quelque chose. Et moi à l'époque je n'avais pas baisé. Et puis ça me rappelait ce type dans la gare, enfin ça c'est une autre histoire.
— Quel type, quelle gare ?
— C'était avant que je sois au foyer. Vous voulez que je vous raconte tout dans l'ordre ?
— Oui, mais termine ton histoire d'abord. Donc, tu finis par te lever et tu te diriges vers les douches, c'est ça ?
— Oui, c'est ça.
— Continue, alors.
— D'accord.
— Donc me voilà en route vers les chiottes. Je n'allume pas dans le couloir, mais la lumière qui filtre des toilettes, plus une veilleuse qui est allumée en permanence, suffisent. Les bruits se font plus forts, plus intenses. Vu qu'il n'y a personne d'autre que moi dans les couloirs, je comprends que je suis seul, enfin, c'est à dire, seul avec eux, quoi. Je me mets à la serrure, à genoux, et je regarde. Et là, putain, ce que je vois, c'est Samir, un grand Arabe qui vit en principe dans le bâtiment voisin, avec un autre type, tous les deux sont à poil, l'autre type, que je ne connais pas, a la gueule en sang et c'est ça que j'entendais depuis la chambre : Samir qui explosait la tête du type contre les lavabos (il y a du sang partout, sur le sol, sur les miroirs, les robinets, partout) et qui l'enculait – de force, j'imagine.
— Tu as fait quoi ?
— J'ai ouvert la porte et je suis rentré.
— Pourquoi tu as fait ça ?
— J'en sais rien. Je ne sais pas ce qui m'est passé par la tête. Je n'allais pas très bien à l'époque. Enfin, je ne suis jamais allé spécialement bien. Mais là, comment dire. Je n'allais vraiment pas bien. Je n'avais aucune ressource, aucune solution, rien. Je me contentais d'aller mal et c'est tout, quoi. Est-ce que je voulais que Samir me démonte la gueule comme à ce type ? Ou alors est-ce que je voulais qu'il m'encule, qu'il me viole ? Je ne peux pas vous le dire aujourd'hui, je n'en sais rien du tout. Je pense que j'avais juste la tête vide.
— Et tu es entré dans le local.
— Oui, j'y suis entré.
— Que s'est-il passé ?
— Rien. Enfin, rien de plus. Samir m'a vu. Il avait l'air calmé. Il a regardé le type qui ne bougeait pas, au sol, et puis moi, et il a dit : « Ho, c'est bon, j'ai tué personne, ça va. Moi je me casse, je vais dormir, salut. » Sauf que si, il était mort, le type.
— Mort ?
— Oui, mort. C'était la première fois que je voyais un homme mort, mais je peux vous dire que je n'ai pas hésité beaucoup. Mort, il l'était. Aucun risque de confondre. Je suis devenu livide, j'ai cru que j'allais me trouver mal. Je me suis dirigé vers un lavabo propre et je me suis aspergé d'eau.
— Et ensuite ?
— Ensuite j'ai téléphoné aux flics. C'était avant les portables. Il fallait descendre à la cabine téléphonique. Elle était à quatre ou cinq cent mètres, dans la cité voisine. Là-bas, les mecs n'aimaient pas trop ceux du foyer, il y avait souvent des embrouilles. Et moi je téléphonais jamais, je sortais jamais. Là, je priais pour que la cabine ne soit pas détruite et que je puisse appeler le 17 sans devoir mettre de pièce ou un carte, vu que je n'avais ni l'un ni l'autre. Et, bon, tout c'est bien passé. Les flics ont débarqué, ils ont embarqué Samir qui dormait dans son lit comme si de rien n'était, et on ne l'a plus revu. Personne ne m'a jamais posé de question, ni convoqué, ni rien.
Tout à l'heure je parlais de La Grosse Revue. J'ai fini, avec un retard énorme, par en boucler le sommaire. Entretemps, c'est à dire depuis la fin de la souscription, il y a eu quelques changements dans le projet. Au départ, tel que le voyais le truc, ça devait être une revue annuelle, au format A5, d'environ 700 pages, mélangeant poésie, nouvelle, roman, dessin – une sorte d'état des lieux annuel de la création telle qu'on ne la trouve pas à la FNAC ou chez les gros éditeurs, un moyen de leur faire honte, un tremplin, aussi, avec un peu de chance, pour tous mes auteurs, pour s'y retrouver, justement, à la FNAC, et chez les gros. Pour ça j'ai levé des fonds via une souscription sur KissKissBankBank, il me fallait 2000 euros, je les ai obtenus en décembre 2013. Et puis je me suis mis au boulot, l'idée étant de sortir la revue en août 2014, c'est à dire maintenant. Au fur et à mesure que le travail avançait, mes idées changeaient, considérablement. Pas sur le fond, pas du tout. En revanche, la forme a pris une série de claques. La première : ce ne sera pas une revue mais une anthologie. En effet : je ne veux plus refaire un boulot aussi titanesque, donc, il n'y aura pas de numéro 2 dans l'immédiat – peut-être dans quelques années, qui sait ? Du coup, partant de ce constat, je me suis dit, plutôt que de faire un machin A5 avec du papier moche, autrement dit une sorte de super-fanzine, pourquoi ne pas essayer de faire quelque chose de beau, de vraiment haut de gamme, qui claque, qui ait de la gueule ? Et j'ai commencé à réfléchir à ce que je voulais – ce que je voulais vraiment.
Un format carré de belle taille (21x21, par exemple).
Du beau papier.
Une couverture rigide.
Une reliure cousue.
Mille pages.
Mille exemplaires au lieu de cinq cent.
De l'offset au lieu d'une impression numérique.
Payer vraiment les auteurs au lieu de leur jeter une aumône.
Et... un changement de nom.
Au lieu de :
LA GROSSE REVUE,
ça va s'appeler, tout simplement :
LA GROSSE.
Et du coup les coûts se sont envolés. Au lieu de deux mille balles, ce qu'il me faut, désormais, c'est trente mille.
Voici la suite des opérations :
En 2015 je fais, avec les auteurs, tout le travail de correction des textes. Ça devrait prendre environ six mois. Dans le même temps, je m'occupe de la maquette, l'idée étant d'avoir, d'ici septembre 2015, un objet terminé, c'est à dire prêt à être imprimé, afin de le sortir en 2016.
La question c'est donc : où vas-tu trouver le fric, pauvre fou ? J'ai deux solutions à ça : la première, c'est de faire le tour des mécènes possibles en leur montrant sous forme de .pdf l'objet fini et en cherchant de leur part un financement désintéressé – c'est fort possible que ça marche, j'ai quelques noms en tête. La deuxième solution, c'est la vente de ma baraque. Elle est estimée à cinquante mille euros, vous voyez donc que nous sommes larges.
Dans tous les cas, nous en saurons un peu plus d'ici à la fin 2015.
Et d'ici là voici, pour vous faire saliver un peu, le sommaire, par ordre alphabétique :
AL DENTON
ALAIN MINIGHETTI
ALEX BTZ
ANNABELLE VERHAEGHE
ANTONELLA FIORI
AURORE *U*
BARBARA ALBECK
BENJAMIN MONTI
BORIS CRACK
CATHERINE URSIN
CHARLES PENNEQUIN
CHRISTOPHE ESNAULT
CHRISTOPHE SIEBERT
CLAIRE VON CORDA
CLAUDE MARION
COSMINE MARIANE
DAVE 2000
EMMANUEL STEINER
FLUPKE CITRON
FRED GEVART
GASPARD PITIOT
GILLES LAFFAY
HD MARINELLA
HENRI CLERC
IVAN ZEMPLENI
JACQUES CAUDA
JEAN-FRANCOIS DALLE
JEAN-MARC RENAULT
JEAN-MARC SIRE
LAURA VAZQUEZ
LAURE CHIARADIA
LILAS MALA
LORNS BOROWITZ
LOUIS CADIAS
LUCAS OTTIN
MARC BRUNIER-MESTAS
MARLENE TISSOT
MATHIAS RICHARD
MICCAM
MICHEL MEYER
NATYOT
NICOLAS ALBERT G.
NICOLAS BOUDIN
NICOLAS BRULEBOIS
NIKOLA AKILEUS
NILS BERTHO
OLIVIER BKZ
PASCAL BATARD
PAUL KRAWCZAK
PAUL SUNDERLAND
PERRIN LANGDA
PERRINE LE QUERREC
PIERRE GRIMAL
RAYMOND PENBLANC
REMI TEULIERE
RITA PEDRAM
ROMAIN GIORDAN
RONAN ROCHER
SAM ECTOPLASM
SENILE CELINE
SOOMIZ
THIERRY RADIERE
THOMAS VINAU
TINAM SADIQUE
WALTER VAN DER MANTZCHE
YANNICK DOUBIBOP
(C'est pas garanti exempt de fautes)
Je sais pas vous, mais moi je trouve ça foutrement impressionnant.
Rendez-vous donc en 2015 pour les premiers extraits !
La place du mort poursuit son petit bonhomme de chemin. Je suis très fier de vous dire qu'il y a une chronique de ce roman dans le nouveau numéro d'Obsküre mag (paru en principe aujourd'hui, mais j'ai pas encore mis la main dessus). Fier pourquoi ? Parce que, après la critique de Poésie portable dans TGV mag, qui était le premier papier, sur un de mes bouquins, dans un canard à diffusion nationale, la critique de La place du mort dans Obsküre mag est mon premier papier dans un canard payant et diffusé en kiosque. C'est une putain d'étape importante, à mes yeux. Personne n'arrêtera plus mon ascension, prochaine étape, boire une pinte au Flore en utilisant le crâne à Sollers comme chopine.
En attendant, voici quelques nouveaux retours de lecteurs :
« La place Du Mort lu dans une voiture, puis terminé dans une chambre d'enfant rose avec posters de One Direction & J.Bieber : DONE ! J'ai préféré Nuit Noire, mais j'ai beaucoup aimé le passage sur le passé de Sammy ! »
(Reçu par message Facebook)
« Lu la place du mort de C. Siébert.
Si tu regardes la bête alors la bête te regarde... Je crois que
c'est Frédo la Moustache qui a dit ça mais je ne suis pas sûr... Inutile de dire qu'en lisant le bouquin de Siébert tu vois bien les deux yeux luisant de l'immonde te fixer régulièrement.
L’édition
Note à camion noir : ARRETEZ AVEC VOS SERIES Z A B C OU DELTA. Il n'y a que des livres, ou de la merde. On n'élève pas des poulets, et on ne calibre pas des pommes. On œuvre !
Le prix est élevé... Pfff, trop élevé. Mais ça je connais la chanson de l'imprimeur qui te voit arriver toi et ta petite maison d' édition et qui t'allume à bloc parce que tu lui demande un nombre d'exemplaires restreint et que ça le fait chier. Du coup ton bouquin avec une couverture au grammage anorexique se retrouve au prix de l'argent ou de l'or parfois même. La colle est bien, ça tient bien. Le visuel mouais, on a vu pire on a vu mieux. La mise en page OK, la police de caractères plutôt bien : agréable à lire, ne fait pas mal à la tête. Une coquille, deux sûrement. Je ne vois pas C. S. faire une faute d'accord aussi grossière.
La Forme
Formellement, C. S. écrit plutôt bien. Bien mieux que beaucoup aussi, et moins bien que d'autres. Mais si on commence à parler de Dostoïevski, d'Ellis ou de Costes... Bon je laisse Despentes de coté : on pense à elle en lisant ce bouquin mais je trouve qu'on est plus proche d'Ellis que de l'égérie goudou punk des années 90. D'ailleurs ces accumulations de virgules à l'américaine, même maîtrisées, ne sont pas ce qui est le plus efficace dans mon esprit malade. La musique des mots produite en français n'est pas la même qu'en anglais. Quand parfois il passe au point/nouvelle phrase, c'est bien... Bien bien mieux à mon goût. Peu de dialogues, il n'y en a véritablement qu'un, et finalement c'est une réussite. Le plaisir par la frustration est un classique indémodable. C'est aussi très professionnel. On dirait un premier livre. En tant qu'éditeur à la retraite je dirais : lâche-toi! LACHE-TOI ! Mots valises, accumulations erratiques et autres nonsenses qui font sens auraient fait mon bonheur. Je crois aussi qu'un jour C. S. devrait envisager plus long, plus fortement structuré. Là on est assis le cul entre le rythme et les exigences du pulp et une œuvre plus complexe, plus fouillée. Le bouquin se lit vite, trop ou pas assez... Sensation étrange que de ce
point de vue formel C. S. n'a pas voulu déranger l'éditeur, partir dans quelques longueurs... Je le comprends, les directeurs de collection sont d'une telle frilosité de nos jours qu'ils ont besoin d'anoraks au mois d'août.
Le fond
Autant vous dire que si vous voulez passer un moment agréable ça ne sera pas le cas. A moins que vous ayez de fortes tendances metanihil comme il dit, et que le chaos est la destruction soient vos hobby du dimanche. Mais vous passerez un moment rare d'intensité maléfique. Garanti. L'ouvrage grattouille donc un nihilisme adolescent issu d'une réaction à la culture sex/drogue/Rock'n'roll. Le vide, le néant comme seule issue. OK... OK. C’est pas nouveau, mais c'est très bien exprimé. Il en expose avec délectation le potentiel pratique inexploité jusqu’alors. Mais alors, quid des sentiments reliant la communauté de l'anal décrits par l'héroïne instigatrice de ce regroupement infernal de paumés ? Quels sont ils ? Quelle est leur essence même ? Je crois que ce point du récit est faible...
On retrouve par ci par la de petites fulgurances métaphorique tout à fait originales et plaisantes. Finalement ce bouquin a une vertu principale: c'est de nous faire réagir et tape la ou ça fait encore bien mal. Il nous révèle à notre part d'ombre, ne nous laisse pas nous complaire dans les qualités que nous nous attribuons facilement entre deux bouffées d'ego. C. S. ne voit pas la vie en rose et c'est bien ainsi. Il n'est pas la pour vous flatter, ni pour vous plaire et c'est assez rare de nos jours pour être souligné.
Est ce que je l'aurais édité. Oui. même si je ne comprends pas, ne suis pas dans cette démarche, je la trouve pertinente et intéressante. Et surtout, il y a un début de style, un début de panache, qui mériterait qu'on lui laisse le temps et les moyens de s'exprimer. »
(Reçu par mail)
« Salut Christophe,
J'ai fini La place... Fourbu mais jubilant, quel style, quel souffle, comment tu fais pour écrire un marathon à l'allure d'un sprint ?! Chapeau ! J'ai craint sur la fin que la Miss Néant vienne cramer mes toiles, mais non.. Déjà qu'elle m'avait donné l'envie de reprendre la clope, la garce !
Bises, et encore bravo, j'ai joui ! »
(Reçu par mail)
« Bon, oui, effectivement, j'ai traîné, trop occupé à me promener un peu n'importe où les cheveux en l'air et la tête dans la rentrée littéraire. Pas à lire La place du mort, non, mais à te faire un retour à ce sujet.
Déjà, quand je te dis que j'en ai lu des passages entiers à ma copine, qui a adoré (au point de me piquer le livre, donc), ça pèse un peu plus lourd que ce que tu peux penser : je ne lui lis comme ça, à haute voix, que les passages particulièrement excellents - j'entends, très bien écrits, vifs, d'une intelligence presque déroutante - des ouvrages que j'ai entre les mains. Là, par exemple, disons qu'elle m'a lu de beaux passages des textes sur le Funambule de Genêt, tandis que je lui ai offert quelques extraits bien troublants de La Place du mort, de Siébert.
Ensuite, faut aussi savoir que le traitement du cul, en général, dans un roman, et même s'il ne s'agit pas là non plus de l'essence complète de ton texte, me plaît franchement rarement, et me fait plutôt même bailler. Pas là, tu l'auras compris. Plus généralement, j'ai retrouvé dans La place du mort cette écriture incandescente (le terme est galvaudé, mais j'en fais vraiment rarement usage), d'une puissante monstrueuse (au sens propre - puissance et gueule cassée), que j'avais aimé dans tes autres textes que j'ai eu l'occasion de lire.
Même la cavalcade en tant que telle, avec ces épisodes qu'on pourrait estimer à tort (c'est à dire de l'extérieur) rattachés à une forme de fureur adolescente qui, là encore, serait susceptible de me faire somnoler, sans même parler de cette fascination maso-fétichiste de ton héroïne pour les brûlures de poitrine (l'outil de sa survie, mais aussi la marque de sa malédiction), résonnent d'une manière tout à fait particulière, en Grand, dans ma tête, encore aujourd'hui et sans doute pour un moment.
Quant à l'écriture, revenons-y deux secondes quand même : sur le fond, désolé de te dire ça à brûle-pourpoint, mais elle dénote une intelligence rarement égalée / tout est juste, tout est pertinent, tout est saisissant dans sa cruelle emphase, dans ses débordements haineux. Et sur la forme, là aussi, mazette, c'est loin d'être aussi dégueulasse que le propos pourrait l'autoriser (de manière facile, fainéante, et donc lassante). Putain, tu le sais sans doute déjà, et je n'aime pas trop utiliser le terme de "tripes" dans une recension, mais bon, disons pudiquement que tu es un sacré écrivain.
Je souhaite le mieux du monde pour ce bouquin, et vais veiller, à mon petit niveau, à contribuer à ce qu'il en soit ainsi. »
(Reçu par mail)
Et avant de vous raconter le dernier truc dont je voulais vous parler aujourd'hui, une petite annonce : il y a Rémi Teulière (un auteur de La Grosse, ça ne vous aura pas échappé), qui lance une souscription pour son prochain recueil de nouvelle. Toutes les infos sont ici : http://fr.ulule.com/reves-cauchemars/
Le 7 août dernier, j'ai exécuté mon deuxième Rituel Drone, et c'était le premier que je jouais devant un public – et pas n'importe quel public, puisqu'il s'agissait des patients de l'unité Désiré Bourneville du Centre Psychothérapique de l'Ain, à Bourg-en-Bresse, sous la houlette de Vivian Grezzini, et dans le cadre d'un projet thérapeutique qui a pour cadre, entre autres, l'organisation des concerts à destination des patients, des concerts de harsh, de grind, de toutes sortes de musiques bruitistes, en fait. Les patients ne sont pas des psychotiques, pas des junks, pas des suicidaires, c'est pas ce genre-là. Ce sont plutôt des handicapés mentaux sévères, souvent de naissance, et du genre bien lourd, il y a Jean-Paul (oui, alors, les prénoms ont été changé suite à la demande de mon cerveau, totalement dépassé dès qu'il s'agit de se souvenir de ce genre de détail) qui demande toutes les cinq minutes à quelle heure ça commence, et qui trimbale un livre de coloriage ; il y a Anne, qui porte des couches et ne parle pas vraiment ; il y a Thierry, qui se bave dessus (et qui m'a ruiné le micro de salive quand je le lui ai passé, mais ça valait le coup, parce qu'il a envoyé de putains de hurlements de sa mère, ho, yeah) ; il y a Sabine, qui doit avoir dix-neuf ou vingt balais et qui se jette à ton cou et t'embrasse comme une môme de trois ans, ça fait drôle ; il y a tous les autres, Jackie qui a tendance à mordre ses camarade, Henri qui a des croûtes plein le crâne – il est chauve et il tombe beaucoup, j'imagine ? –, Frank qui hurle et applaudit toutes les cinq minutes, Marc dont le principal plaisir est d'aider à ranger le matos une fois que c'est terminé ; il y a ceux qui m'ont dit que j'étais un poète, que c'était bien et qu'en plus ça faisait dormir, il y a ceux qui ont dessiné l'affiche et qui me l'ont donnée (et, petit message destiné aux orgas : c'est la première fois qu'on me file un original, les mecs) ; il y a ceux qui ont trépigné pendant l'installation, ceux qui m'ont scruté pendant les balances, mention spéciale à Georges, qui pendant tout le set s'est tenu presque contre moi, très sage, hyper attentif, le regard rivé à ma liseuse et aux instruments, il y a ceux qui hurlaient pendant la lecture, ceux qui hurlaient pendant les passages musicaux (et quand je parle de hurlement, il ne faut pas imaginer le glapissement glauque façon asile psychiatrique anglais du dix-neuvième siècle, nonon, plutôt le gueulot extatique et joyeux d'un trippé de naissance), il y a ceux qui chantaient, ceux qui écoutaient, ceux qui applaudissaient à tout rompre, ceux qui avaient l'air attentif, il y a ceux qui se sont succédés au micro après le set pour y crier des trucs inintelligibles et très beaux. Merci à Louis d'avoir surveillé notre consommation de café et de clopes (car c'est mauvais pour la santé), merci à tous et toutes de m'avoir accueilli chez eux, dans leur vie quotidienne, et d'avoir échangé avec moi avant et après le concert, c'était formidable, merci à Vivian pour l'orga sans faille et à ses camarades infirmiers pour leur soutien, mention spéciale à une jeune infirmière ou aide-soignante dont j'ai oublié le nom et qui avait l'air terrorisée, je ne sais pas si c'était le public chaud comme la braise ou les saloperies que je disais, mais elle n'en menait pas large.
A titre personnel, enfermé pendant quelques heures là-dedans (il faut qu'un type t'accompagne avec les clefs pour aller pisser, il faut ouvrir trois portes et les refermer derrière toi pour fumer une clope sur le perron, et ce qui déconcerte, c'est pas qu'il faille le faire, c'est que ça paraisse aussi naturel et normal à ceux qui ont les clefs), j'ai revécu tous mes fantasmes de jeunesse, quand je voulais être moine juste pour ne plus voir personne, quand j'étais si bien, en foyer de SDF, parce que je pouvais m'enfermer dans ma chambre et cesser aux yeux des autres d'exister ; j'ai toujours imaginé que je ferais un prisonnier modèle. C'était étrange de parler à ces gens de vingt, trente, cinquante ans et trois ans d'âge mental, ou quatre, ou six, et de pas se sentir tellement différent, de pas se sentir tellement dépaysé. C'était intéressant de mesurer à quel point les handicaps de ces gens faisaient écho à mes propres trous, c'était à la fois confortable (putain, enfin chez moi !) et un peu flippant, pour toutes les raisons que vous imaginez.
J'ai adoré.
A dans quinze jours.
Je vous aime,
Christophe Siébert.
Sur Internet, sur un forum, j'ai trouvé ça :
« Sous l'étain pas dans la boue un chien qui hume un tas qui geint l'obscurité glisse vers la terre grasse l'enchevêtrement brun des restes et glisse encore. Les sols gorgés exsudent les sucres de la pourriture pour des coquelicots frémissants en devenir sous la croûte. De là partent galeries conduits humides boyaux visqueux qui s'enfoncent toujours plus profond dans la germination. C'est ainsi qu'un organisme éclot tout en bouche, un filet de voix noyé à l'hélium. »
Bon. Ça me fait penser, moi, qu'il y a deux écoles, en littérature : ceux qui s'efforcent de trouver la forme la plus simple et la plus efficace pour faire passer des idées ou des émotions complexes, et ceux qui font l'inverse. Ceux-là on le retrouve souvent sur les forums de poésie. Quand j'ai débarqué sur Internet il y a quinze ans, me disant que ce serait un bon moyen de me faire connaître et de trouver des lecteurs – un meilleur moyen, en tout cas, que ce que je faisais à ce moment-là dans ce but, c'est à dire : rien, j'ai fait un petit tour de ce qui s'écrivait, se lisait, se commentait. Il y a une chose qui m'a frappé. Je me suis dit mais bordel, comment faire pour que tout le monde pige de suite que je ne fais pas partie des 95% de tarés qui écrivent de la merde et prennent Internet pour leur déversoir personnel, que je suis un véritable écrivain et pas un débile qui fantasme à l'être ? Ça peut paraître arrogant mais je savais qui j'étais. Je savais que j'étais un mauvais écrivain, c'est à dire un écrivain débutant, sans presque aucun moyen technique, sans discipline, sans que dalle, mais, merde, un écrivain quand même. Je savais que je n'écrivais pas, que je n'écrirais jamais, « sous l'étain pas dans la boue un chien qui hume un tas qui geint » ; je le savais. Et puis j'ai roulé ma bosse, bon. Maintenant je m'éloigne d'Internet. Mais je suis content de constater que depuis tout ce temps le niveau s'est un peu élevé. C'est à dire, les incapables le sont toujours et sont toujours là (il n'y a pas de miracle), mais la jeune génération est meilleure, même s'il n'y a pas souvent de quoi s'en relever la nuit. Bref. Et tandis que je méditais sur l'incroyable beauté de « l'obscurité [qui] glisse vers la terre grasse », j'ai reçu un mail. Vous verrez, il y a quelques phrases qui percutent aussi. Il faudrait, je pense, que quelqu'un tisse des liens théoriques entre la poésie expérimentale du dimanche et les spams automatiquement traduits. Il faudrait un universitaire un peu cinglé.
« Bonjour, Je suis tombé sur votre adresse e-mail lors d'une promenade dans mon temps libre sur internet et c'est là que j'ai décidé de vous contacter dans la mêlée pour vous parler de mon but, car il est dans le fer au feu devient acier et la trempe. C'est la douleur que l'homme est la révélation de sa force. Je souffre d'une maladie qui dégrade ma santé au quotidien et la médecine ne pouvait rien faire pour me sauver pendant trois ans. Conscient de ma décision, j'ai décidé de vous écrire pour vous avoir une affaire avec vous pour sauver les enfants atteints de maladies graves. Je veux mettre dans mon procession des fonds d'une valeur d'environ € 800 000 (cent mille Euros Hui) que j'ai gardé dans une banque parce qu'ils n'ont personne qui peut bénéficier de ma propriété. »
Sinon c'est la rentrée littéraire, bientôt. On parle déjà des premiers livres publiés par les nouveaux romanciers de cette année. Quelques éléments biographiques filtrent dans la presse : étudiante en philosophie ; éditeur ; journaliste ; auteur d'une thèse de philosophie ; ancienne libraire devenue journaliste ; éditorialiste des Inrocks ; étudiant à Normale-Sup. Woaw. Juste pour comparer, quelques éléments biographiques des crevards de La Grosse Revue : employée d'un laboratoire d'analyses ; guide touristique ; femme de ménage ; chômeur ; bénéficiaire de l'AAH ; travailleur social ; prof en mi-temps thérapeutique ; suicidé – bon, j'arrête là la liste, vous avez pigé l'idée.
Moi, je ne tire de tout ça aucune conclusion. Vraiment, aucune. A part que c'est toujours pas cette année que je vais camper devant la FNAC en attendant septembre.
Retour au travail au cours de cette quinzaine, même si elle a été un peu mouvementée. Mes divers manuscrits en cours sont en train, pour certains, de fusionner. Ça me donne l'impression d'un gros ragoût qui mijote, ou alors d'un monstre étrange qui absorbe des trucs et des machins. Le monstre, c'est Descente, et ceux qui se font tranquillement absorber, ce sont Rien à foutre et Zone d'ombre. Je l'avais pressenti il y a quelques semaines, et désormais c'est sûr et certain.
Voici un extrait de Rien à foutre, qui devrait finalement se retrouver dans Descente (c'est du premier jet absolument pas relu) :
CASSETTE 1 / FACE A
TEST
— Bon, raconte quelque chose, c'est juste pour vérifier la bande. Raconte ce que tu veux, on s'en fout.
— Tiens c'est drôle, il y a un truc qui me revient.
— Vas-y, raconte.
— C'est quand j'étais en foyer. C'était en pleine nuit. J'avais entendu du bruit dans les lavabos. Vous savez, c'était le genre de foyer où on pouvait circuler sans problème, j'avais les clés de ma piaule et tout, c'était des bâtiments isolés de la route, en périphérie de la ville, quatre ou cinq bâtiments d'habitations et un autre qui servait de réfectoire, cuisines et bureaux pour les éducs et tout ça.
— Oui...
— Et donc dans chaque bâtiment, une demi-douzaine de chambres individuelles et un local avec quelques douches et des chiottes, et c'est de là que vient le bruit, un bruit de baise j'avais l'impression – sauf que c'était pas mixte, le foyer, et de toute façon ça ressemblait davantage à deux mecs en train de baiser, plutôt qu'à un mec et une fille.
— Et tu as fait quoi ?
— Bin d'abord je suis resté un moment à écouter. Il devait être, je sais pas, deux ou trois heures du matin, quoi, c'était les vacances de Noël, et je pensais être le seul type encore dans le foyer, je pensais qu'ils étaient tous partis en vacances.
— C'est bon, ça enregistre.
— Ah ? Et je [...]
RECIT
— Vas-y, continue ton histoire, termine.
— Ça enregistre, là ?
— Oui.
— Vous êtes sûrs ?
— Oui, oui.
— Bon. J'y vais, alors.
— Nous t'écoutons.
— Au bout d'un moment, je me suis levé pour aller voir. Je me suis approché doucement, pour mater, quoi. Je voulais pas les interrompre ou quoi, et surtout pas me faire voir, juste me marrer un coup, enfin, voir, quoi. Pour une fois qu'il se passait quelque chose. Et moi à l'époque je n'avais pas baisé. Et puis ça me rappelait ce type dans la gare, enfin ça c'est une autre histoire.
— Quel type, quelle gare ?
— C'était avant que je sois au foyer. Vous voulez que je vous raconte tout dans l'ordre ?
— Oui, mais termine ton histoire d'abord. Donc, tu finis par te lever et tu te diriges vers les douches, c'est ça ?
— Oui, c'est ça.
— Continue, alors.
— D'accord.
— Donc me voilà en route vers les chiottes. Je n'allume pas dans le couloir, mais la lumière qui filtre des toilettes, plus une veilleuse qui est allumée en permanence, suffisent. Les bruits se font plus forts, plus intenses. Vu qu'il n'y a personne d'autre que moi dans les couloirs, je comprends que je suis seul, enfin, c'est à dire, seul avec eux, quoi. Je me mets à la serrure, à genoux, et je regarde. Et là, putain, ce que je vois, c'est Samir, un grand Arabe qui vit en principe dans le bâtiment voisin, avec un autre type, tous les deux sont à poil, l'autre type, que je ne connais pas, a la gueule en sang et c'est ça que j'entendais depuis la chambre : Samir qui explosait la tête du type contre les lavabos (il y a du sang partout, sur le sol, sur les miroirs, les robinets, partout) et qui l'enculait – de force, j'imagine.
— Tu as fait quoi ?
— J'ai ouvert la porte et je suis rentré.
— Pourquoi tu as fait ça ?
— J'en sais rien. Je ne sais pas ce qui m'est passé par la tête. Je n'allais pas très bien à l'époque. Enfin, je ne suis jamais allé spécialement bien. Mais là, comment dire. Je n'allais vraiment pas bien. Je n'avais aucune ressource, aucune solution, rien. Je me contentais d'aller mal et c'est tout, quoi. Est-ce que je voulais que Samir me démonte la gueule comme à ce type ? Ou alors est-ce que je voulais qu'il m'encule, qu'il me viole ? Je ne peux pas vous le dire aujourd'hui, je n'en sais rien du tout. Je pense que j'avais juste la tête vide.
— Et tu es entré dans le local.
— Oui, j'y suis entré.
— Que s'est-il passé ?
— Rien. Enfin, rien de plus. Samir m'a vu. Il avait l'air calmé. Il a regardé le type qui ne bougeait pas, au sol, et puis moi, et il a dit : « Ho, c'est bon, j'ai tué personne, ça va. Moi je me casse, je vais dormir, salut. » Sauf que si, il était mort, le type.
— Mort ?
— Oui, mort. C'était la première fois que je voyais un homme mort, mais je peux vous dire que je n'ai pas hésité beaucoup. Mort, il l'était. Aucun risque de confondre. Je suis devenu livide, j'ai cru que j'allais me trouver mal. Je me suis dirigé vers un lavabo propre et je me suis aspergé d'eau.
— Et ensuite ?
— Ensuite j'ai téléphoné aux flics. C'était avant les portables. Il fallait descendre à la cabine téléphonique. Elle était à quatre ou cinq cent mètres, dans la cité voisine. Là-bas, les mecs n'aimaient pas trop ceux du foyer, il y avait souvent des embrouilles. Et moi je téléphonais jamais, je sortais jamais. Là, je priais pour que la cabine ne soit pas détruite et que je puisse appeler le 17 sans devoir mettre de pièce ou un carte, vu que je n'avais ni l'un ni l'autre. Et, bon, tout c'est bien passé. Les flics ont débarqué, ils ont embarqué Samir qui dormait dans son lit comme si de rien n'était, et on ne l'a plus revu. Personne ne m'a jamais posé de question, ni convoqué, ni rien.
Tout à l'heure je parlais de La Grosse Revue. J'ai fini, avec un retard énorme, par en boucler le sommaire. Entretemps, c'est à dire depuis la fin de la souscription, il y a eu quelques changements dans le projet. Au départ, tel que le voyais le truc, ça devait être une revue annuelle, au format A5, d'environ 700 pages, mélangeant poésie, nouvelle, roman, dessin – une sorte d'état des lieux annuel de la création telle qu'on ne la trouve pas à la FNAC ou chez les gros éditeurs, un moyen de leur faire honte, un tremplin, aussi, avec un peu de chance, pour tous mes auteurs, pour s'y retrouver, justement, à la FNAC, et chez les gros. Pour ça j'ai levé des fonds via une souscription sur KissKissBankBank, il me fallait 2000 euros, je les ai obtenus en décembre 2013. Et puis je me suis mis au boulot, l'idée étant de sortir la revue en août 2014, c'est à dire maintenant. Au fur et à mesure que le travail avançait, mes idées changeaient, considérablement. Pas sur le fond, pas du tout. En revanche, la forme a pris une série de claques. La première : ce ne sera pas une revue mais une anthologie. En effet : je ne veux plus refaire un boulot aussi titanesque, donc, il n'y aura pas de numéro 2 dans l'immédiat – peut-être dans quelques années, qui sait ? Du coup, partant de ce constat, je me suis dit, plutôt que de faire un machin A5 avec du papier moche, autrement dit une sorte de super-fanzine, pourquoi ne pas essayer de faire quelque chose de beau, de vraiment haut de gamme, qui claque, qui ait de la gueule ? Et j'ai commencé à réfléchir à ce que je voulais – ce que je voulais vraiment.
Un format carré de belle taille (21x21, par exemple).
Du beau papier.
Une couverture rigide.
Une reliure cousue.
Mille pages.
Mille exemplaires au lieu de cinq cent.
De l'offset au lieu d'une impression numérique.
Payer vraiment les auteurs au lieu de leur jeter une aumône.
Et... un changement de nom.
Au lieu de :
LA GROSSE REVUE,
ça va s'appeler, tout simplement :
LA GROSSE.
Et du coup les coûts se sont envolés. Au lieu de deux mille balles, ce qu'il me faut, désormais, c'est trente mille.
Voici la suite des opérations :
En 2015 je fais, avec les auteurs, tout le travail de correction des textes. Ça devrait prendre environ six mois. Dans le même temps, je m'occupe de la maquette, l'idée étant d'avoir, d'ici septembre 2015, un objet terminé, c'est à dire prêt à être imprimé, afin de le sortir en 2016.
La question c'est donc : où vas-tu trouver le fric, pauvre fou ? J'ai deux solutions à ça : la première, c'est de faire le tour des mécènes possibles en leur montrant sous forme de .pdf l'objet fini et en cherchant de leur part un financement désintéressé – c'est fort possible que ça marche, j'ai quelques noms en tête. La deuxième solution, c'est la vente de ma baraque. Elle est estimée à cinquante mille euros, vous voyez donc que nous sommes larges.
Dans tous les cas, nous en saurons un peu plus d'ici à la fin 2015.
Et d'ici là voici, pour vous faire saliver un peu, le sommaire, par ordre alphabétique :
AL DENTON
ALAIN MINIGHETTI
ALEX BTZ
ANNABELLE VERHAEGHE
ANTONELLA FIORI
AURORE *U*
BARBARA ALBECK
BENJAMIN MONTI
BORIS CRACK
CATHERINE URSIN
CHARLES PENNEQUIN
CHRISTOPHE ESNAULT
CHRISTOPHE SIEBERT
CLAIRE VON CORDA
CLAUDE MARION
COSMINE MARIANE
DAVE 2000
EMMANUEL STEINER
FLUPKE CITRON
FRED GEVART
GASPARD PITIOT
GILLES LAFFAY
HD MARINELLA
HENRI CLERC
IVAN ZEMPLENI
JACQUES CAUDA
JEAN-FRANCOIS DALLE
JEAN-MARC RENAULT
JEAN-MARC SIRE
LAURA VAZQUEZ
LAURE CHIARADIA
LILAS MALA
LORNS BOROWITZ
LOUIS CADIAS
LUCAS OTTIN
MARC BRUNIER-MESTAS
MARLENE TISSOT
MATHIAS RICHARD
MICCAM
MICHEL MEYER
NATYOT
NICOLAS ALBERT G.
NICOLAS BOUDIN
NICOLAS BRULEBOIS
NIKOLA AKILEUS
NILS BERTHO
OLIVIER BKZ
PASCAL BATARD
PAUL KRAWCZAK
PAUL SUNDERLAND
PERRIN LANGDA
PERRINE LE QUERREC
PIERRE GRIMAL
RAYMOND PENBLANC
REMI TEULIERE
RITA PEDRAM
ROMAIN GIORDAN
RONAN ROCHER
SAM ECTOPLASM
SENILE CELINE
SOOMIZ
THIERRY RADIERE
THOMAS VINAU
TINAM SADIQUE
WALTER VAN DER MANTZCHE
YANNICK DOUBIBOP
(C'est pas garanti exempt de fautes)
Je sais pas vous, mais moi je trouve ça foutrement impressionnant.
Rendez-vous donc en 2015 pour les premiers extraits !
La place du mort poursuit son petit bonhomme de chemin. Je suis très fier de vous dire qu'il y a une chronique de ce roman dans le nouveau numéro d'Obsküre mag (paru en principe aujourd'hui, mais j'ai pas encore mis la main dessus). Fier pourquoi ? Parce que, après la critique de Poésie portable dans TGV mag, qui était le premier papier, sur un de mes bouquins, dans un canard à diffusion nationale, la critique de La place du mort dans Obsküre mag est mon premier papier dans un canard payant et diffusé en kiosque. C'est une putain d'étape importante, à mes yeux. Personne n'arrêtera plus mon ascension, prochaine étape, boire une pinte au Flore en utilisant le crâne à Sollers comme chopine.
En attendant, voici quelques nouveaux retours de lecteurs :
« La place Du Mort lu dans une voiture, puis terminé dans une chambre d'enfant rose avec posters de One Direction & J.Bieber : DONE ! J'ai préféré Nuit Noire, mais j'ai beaucoup aimé le passage sur le passé de Sammy ! »
(Reçu par message Facebook)
« Lu la place du mort de C. Siébert.
Si tu regardes la bête alors la bête te regarde... Je crois que
c'est Frédo la Moustache qui a dit ça mais je ne suis pas sûr... Inutile de dire qu'en lisant le bouquin de Siébert tu vois bien les deux yeux luisant de l'immonde te fixer régulièrement.
L’édition
Note à camion noir : ARRETEZ AVEC VOS SERIES Z A B C OU DELTA. Il n'y a que des livres, ou de la merde. On n'élève pas des poulets, et on ne calibre pas des pommes. On œuvre !
Le prix est élevé... Pfff, trop élevé. Mais ça je connais la chanson de l'imprimeur qui te voit arriver toi et ta petite maison d' édition et qui t'allume à bloc parce que tu lui demande un nombre d'exemplaires restreint et que ça le fait chier. Du coup ton bouquin avec une couverture au grammage anorexique se retrouve au prix de l'argent ou de l'or parfois même. La colle est bien, ça tient bien. Le visuel mouais, on a vu pire on a vu mieux. La mise en page OK, la police de caractères plutôt bien : agréable à lire, ne fait pas mal à la tête. Une coquille, deux sûrement. Je ne vois pas C. S. faire une faute d'accord aussi grossière.
La Forme
Formellement, C. S. écrit plutôt bien. Bien mieux que beaucoup aussi, et moins bien que d'autres. Mais si on commence à parler de Dostoïevski, d'Ellis ou de Costes... Bon je laisse Despentes de coté : on pense à elle en lisant ce bouquin mais je trouve qu'on est plus proche d'Ellis que de l'égérie goudou punk des années 90. D'ailleurs ces accumulations de virgules à l'américaine, même maîtrisées, ne sont pas ce qui est le plus efficace dans mon esprit malade. La musique des mots produite en français n'est pas la même qu'en anglais. Quand parfois il passe au point/nouvelle phrase, c'est bien... Bien bien mieux à mon goût. Peu de dialogues, il n'y en a véritablement qu'un, et finalement c'est une réussite. Le plaisir par la frustration est un classique indémodable. C'est aussi très professionnel. On dirait un premier livre. En tant qu'éditeur à la retraite je dirais : lâche-toi! LACHE-TOI ! Mots valises, accumulations erratiques et autres nonsenses qui font sens auraient fait mon bonheur. Je crois aussi qu'un jour C. S. devrait envisager plus long, plus fortement structuré. Là on est assis le cul entre le rythme et les exigences du pulp et une œuvre plus complexe, plus fouillée. Le bouquin se lit vite, trop ou pas assez... Sensation étrange que de ce
point de vue formel C. S. n'a pas voulu déranger l'éditeur, partir dans quelques longueurs... Je le comprends, les directeurs de collection sont d'une telle frilosité de nos jours qu'ils ont besoin d'anoraks au mois d'août.
Le fond
Autant vous dire que si vous voulez passer un moment agréable ça ne sera pas le cas. A moins que vous ayez de fortes tendances metanihil comme il dit, et que le chaos est la destruction soient vos hobby du dimanche. Mais vous passerez un moment rare d'intensité maléfique. Garanti. L'ouvrage grattouille donc un nihilisme adolescent issu d'une réaction à la culture sex/drogue/Rock'n'roll. Le vide, le néant comme seule issue. OK... OK. C’est pas nouveau, mais c'est très bien exprimé. Il en expose avec délectation le potentiel pratique inexploité jusqu’alors. Mais alors, quid des sentiments reliant la communauté de l'anal décrits par l'héroïne instigatrice de ce regroupement infernal de paumés ? Quels sont ils ? Quelle est leur essence même ? Je crois que ce point du récit est faible...
On retrouve par ci par la de petites fulgurances métaphorique tout à fait originales et plaisantes. Finalement ce bouquin a une vertu principale: c'est de nous faire réagir et tape la ou ça fait encore bien mal. Il nous révèle à notre part d'ombre, ne nous laisse pas nous complaire dans les qualités que nous nous attribuons facilement entre deux bouffées d'ego. C. S. ne voit pas la vie en rose et c'est bien ainsi. Il n'est pas la pour vous flatter, ni pour vous plaire et c'est assez rare de nos jours pour être souligné.
Est ce que je l'aurais édité. Oui. même si je ne comprends pas, ne suis pas dans cette démarche, je la trouve pertinente et intéressante. Et surtout, il y a un début de style, un début de panache, qui mériterait qu'on lui laisse le temps et les moyens de s'exprimer. »
(Reçu par mail)
« Salut Christophe,
J'ai fini La place... Fourbu mais jubilant, quel style, quel souffle, comment tu fais pour écrire un marathon à l'allure d'un sprint ?! Chapeau ! J'ai craint sur la fin que la Miss Néant vienne cramer mes toiles, mais non.. Déjà qu'elle m'avait donné l'envie de reprendre la clope, la garce !
Bises, et encore bravo, j'ai joui ! »
(Reçu par mail)
« Bon, oui, effectivement, j'ai traîné, trop occupé à me promener un peu n'importe où les cheveux en l'air et la tête dans la rentrée littéraire. Pas à lire La place du mort, non, mais à te faire un retour à ce sujet.
Déjà, quand je te dis que j'en ai lu des passages entiers à ma copine, qui a adoré (au point de me piquer le livre, donc), ça pèse un peu plus lourd que ce que tu peux penser : je ne lui lis comme ça, à haute voix, que les passages particulièrement excellents - j'entends, très bien écrits, vifs, d'une intelligence presque déroutante - des ouvrages que j'ai entre les mains. Là, par exemple, disons qu'elle m'a lu de beaux passages des textes sur le Funambule de Genêt, tandis que je lui ai offert quelques extraits bien troublants de La Place du mort, de Siébert.
Ensuite, faut aussi savoir que le traitement du cul, en général, dans un roman, et même s'il ne s'agit pas là non plus de l'essence complète de ton texte, me plaît franchement rarement, et me fait plutôt même bailler. Pas là, tu l'auras compris. Plus généralement, j'ai retrouvé dans La place du mort cette écriture incandescente (le terme est galvaudé, mais j'en fais vraiment rarement usage), d'une puissante monstrueuse (au sens propre - puissance et gueule cassée), que j'avais aimé dans tes autres textes que j'ai eu l'occasion de lire.
Même la cavalcade en tant que telle, avec ces épisodes qu'on pourrait estimer à tort (c'est à dire de l'extérieur) rattachés à une forme de fureur adolescente qui, là encore, serait susceptible de me faire somnoler, sans même parler de cette fascination maso-fétichiste de ton héroïne pour les brûlures de poitrine (l'outil de sa survie, mais aussi la marque de sa malédiction), résonnent d'une manière tout à fait particulière, en Grand, dans ma tête, encore aujourd'hui et sans doute pour un moment.
Quant à l'écriture, revenons-y deux secondes quand même : sur le fond, désolé de te dire ça à brûle-pourpoint, mais elle dénote une intelligence rarement égalée / tout est juste, tout est pertinent, tout est saisissant dans sa cruelle emphase, dans ses débordements haineux. Et sur la forme, là aussi, mazette, c'est loin d'être aussi dégueulasse que le propos pourrait l'autoriser (de manière facile, fainéante, et donc lassante). Putain, tu le sais sans doute déjà, et je n'aime pas trop utiliser le terme de "tripes" dans une recension, mais bon, disons pudiquement que tu es un sacré écrivain.
Je souhaite le mieux du monde pour ce bouquin, et vais veiller, à mon petit niveau, à contribuer à ce qu'il en soit ainsi. »
(Reçu par mail)
Et avant de vous raconter le dernier truc dont je voulais vous parler aujourd'hui, une petite annonce : il y a Rémi Teulière (un auteur de La Grosse, ça ne vous aura pas échappé), qui lance une souscription pour son prochain recueil de nouvelle. Toutes les infos sont ici : http://fr.ulule.com/reves-cauchemars/
Le 7 août dernier, j'ai exécuté mon deuxième Rituel Drone, et c'était le premier que je jouais devant un public – et pas n'importe quel public, puisqu'il s'agissait des patients de l'unité Désiré Bourneville du Centre Psychothérapique de l'Ain, à Bourg-en-Bresse, sous la houlette de Vivian Grezzini, et dans le cadre d'un projet thérapeutique qui a pour cadre, entre autres, l'organisation des concerts à destination des patients, des concerts de harsh, de grind, de toutes sortes de musiques bruitistes, en fait. Les patients ne sont pas des psychotiques, pas des junks, pas des suicidaires, c'est pas ce genre-là. Ce sont plutôt des handicapés mentaux sévères, souvent de naissance, et du genre bien lourd, il y a Jean-Paul (oui, alors, les prénoms ont été changé suite à la demande de mon cerveau, totalement dépassé dès qu'il s'agit de se souvenir de ce genre de détail) qui demande toutes les cinq minutes à quelle heure ça commence, et qui trimbale un livre de coloriage ; il y a Anne, qui porte des couches et ne parle pas vraiment ; il y a Thierry, qui se bave dessus (et qui m'a ruiné le micro de salive quand je le lui ai passé, mais ça valait le coup, parce qu'il a envoyé de putains de hurlements de sa mère, ho, yeah) ; il y a Sabine, qui doit avoir dix-neuf ou vingt balais et qui se jette à ton cou et t'embrasse comme une môme de trois ans, ça fait drôle ; il y a tous les autres, Jackie qui a tendance à mordre ses camarade, Henri qui a des croûtes plein le crâne – il est chauve et il tombe beaucoup, j'imagine ? –, Frank qui hurle et applaudit toutes les cinq minutes, Marc dont le principal plaisir est d'aider à ranger le matos une fois que c'est terminé ; il y a ceux qui m'ont dit que j'étais un poète, que c'était bien et qu'en plus ça faisait dormir, il y a ceux qui ont dessiné l'affiche et qui me l'ont donnée (et, petit message destiné aux orgas : c'est la première fois qu'on me file un original, les mecs) ; il y a ceux qui ont trépigné pendant l'installation, ceux qui m'ont scruté pendant les balances, mention spéciale à Georges, qui pendant tout le set s'est tenu presque contre moi, très sage, hyper attentif, le regard rivé à ma liseuse et aux instruments, il y a ceux qui hurlaient pendant la lecture, ceux qui hurlaient pendant les passages musicaux (et quand je parle de hurlement, il ne faut pas imaginer le glapissement glauque façon asile psychiatrique anglais du dix-neuvième siècle, nonon, plutôt le gueulot extatique et joyeux d'un trippé de naissance), il y a ceux qui chantaient, ceux qui écoutaient, ceux qui applaudissaient à tout rompre, ceux qui avaient l'air attentif, il y a ceux qui se sont succédés au micro après le set pour y crier des trucs inintelligibles et très beaux. Merci à Louis d'avoir surveillé notre consommation de café et de clopes (car c'est mauvais pour la santé), merci à tous et toutes de m'avoir accueilli chez eux, dans leur vie quotidienne, et d'avoir échangé avec moi avant et après le concert, c'était formidable, merci à Vivian pour l'orga sans faille et à ses camarades infirmiers pour leur soutien, mention spéciale à une jeune infirmière ou aide-soignante dont j'ai oublié le nom et qui avait l'air terrorisée, je ne sais pas si c'était le public chaud comme la braise ou les saloperies que je disais, mais elle n'en menait pas large.
A titre personnel, enfermé pendant quelques heures là-dedans (il faut qu'un type t'accompagne avec les clefs pour aller pisser, il faut ouvrir trois portes et les refermer derrière toi pour fumer une clope sur le perron, et ce qui déconcerte, c'est pas qu'il faille le faire, c'est que ça paraisse aussi naturel et normal à ceux qui ont les clefs), j'ai revécu tous mes fantasmes de jeunesse, quand je voulais être moine juste pour ne plus voir personne, quand j'étais si bien, en foyer de SDF, parce que je pouvais m'enfermer dans ma chambre et cesser aux yeux des autres d'exister ; j'ai toujours imaginé que je ferais un prisonnier modèle. C'était étrange de parler à ces gens de vingt, trente, cinquante ans et trois ans d'âge mental, ou quatre, ou six, et de pas se sentir tellement différent, de pas se sentir tellement dépaysé. C'était intéressant de mesurer à quel point les handicaps de ces gens faisaient écho à mes propres trous, c'était à la fois confortable (putain, enfin chez moi !) et un peu flippant, pour toutes les raisons que vous imaginez.
J'ai adoré.
A dans quinze jours.
Je vous aime,
Christophe Siébert.
konsstrukt- Écritoirien émérite stagiaire
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Re: actualités août-septembre 2014
« J'ai consulté votre livre en ligne. Si je trouve votre style intéressant, il ne correspond pas au public de mon magasin. Je ne prendrais pas malheureusement votre livre pour une dédicace. Je vous souhaite une bonne continuation. »
Ca, c'est ce que me répondent les libraires, faute incluse, quand je prends contact avec eux. Enfin, ceux qui font l'effort de me répondre, je veux dire.
Bonjour à tous.
Deux nouvelles chroniques de La Place Du Mort, dont je suis très heureux : l'une de Mäx Lachaud, pour Obsküre Magazine ; l'autre de Artikel Unbekannt, pour le fanzine La Tête En Noir :
À tombeau ouvert : La place du mort, de Christophe Siébert.
Christophe Siébert, « prolétaire de la littérature depuis 2007 », présente La place du mort, son dernier livre, paru en mai dernier chez l’excellent éditeur Camion Noir, comme « une série Z existentielle ». Mais c’est aussi un roman noir. Et un sacré morceau de roman noir. Brutal, féroce, radical, impétueux, mais aussi rempli jusqu’à la gueule d’une infinie tendresse et d’une vraie compassion. « Compassion » signifie « souffrir avec ». Or c’est vraiment de ça qu’il s’agit ici. La place du mort, c’est l’histoire d’une fuite en avant, et dès le prologue on sait que l’issue sera fatale.
Alors on souffre avec Blandine à mesure qu’on découvre son passé fracassé. Et on souffre encore plus quand on réalise que son présent est empreint d’une beauté si fragile qu’il ne peut offrir aucune perspective d’avenir. Oui, j’ai bien écrit « beauté fragile », tandis que certains ne verront là que violence extrême, pornographie déviante et nihilisme martelé. Comme si ces trois notions devaient nécessairement exclure la beauté. Comme si un portrait de femme devait nécessairement être peint en rose pastel. Comme si le féminisme avait pu s’imposer sans jamais s’être fait… violence.
Voilà pourquoi Blandine n’hésite pas à se servir de son corps comme d’une arme. C’est elle qui mène la danse, et qui impose son « Sex, drugs and Electronic Body Music ». Car elle écoute Front 242, et les amateurs – dont je suis – apprécieront la totale cohérence de ce choix. Les mots de Christophe Siébert, coupants et précis comme des rasoirs, épousent à merveille les BPM millimétrés et les samples crypto-politiques du quatuor belge. Et si cette formule énergique et froide constitue la bande-son idéale d’une odyssée tragique aux allures de danse macabre, c’est justement parce qu’elle trouve un personnage capable de faire corps avec elle. À musique « virile », femme forte.
« Les vrais durs ne dansent pas », écrivait Norman Mailer. Et pourtant Blandine danse. Et elle joue. Avec le feu, évidemment. Elle se brûle le bout des seins avec des cigarettes pour mieux se sentir vivante. Elle aime Sammy, qui s’est fait ramasser par les flics. Sammy qui comme elle en a vu – et senti – de dures. Elle ferait n’importe quoi pour le libérer. Vraiment n’importe quoi. Alors elle recontacte son frère, aventurier, ami et… amant. Leurs retrouvailles seront pour eux l’occasion de franchir toutes les limites. Au diable codes sociaux et autres normes morales. Au diable les artifices, et vive le feu. La liberté a un prix, et Blandine est prête à le payer comptant.
La place du mort, c’est ce qui pourrait ressortir d’une collision entre La balade sauvage, de Terrence Malick, et le documentaire consacré aux Sex Pistols L’obscénité et la fureur. Comme si Christophe Siébert avait réussi à organiser une impossible rencontre entre Virginie Despentes et le regretté Jean-Patrick Manchette. Comme s’il ne s’était pas contenté de prendre une part – active, forcément – à leur conversation, mais les avait accompagnés jusqu’au bout de la nuit dans une ultime virée furieuse.
Alors, engagé ou dégagé, La place du mort ? Les deux, mon capitaine. Et enragé, surtout. Enragé sans relâche, sans pitié et sans remords. Enragé comme l’était le terrible brûlot de Pierre Pelot, Le sourire des crabes (sorti en 1977, ça ne s’invente pas), à la trame assez similaire, auquel ce roman frénétique donne un écho strident pour mieux enfoncer le clou dans les paumes du lecteur crucifié. On vous a dit que les derniers Punks étaient morts ? On vous a menti. Il reste Christophe Siébert.
Artikel Unbekannt
Mes lectrices sont formidables. Voici l'une d'elles lisant quelques extraits de Poésie Portable à Berlin.
https://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=yZ7SaOuEciA
Et voici ce que m'envoie une autre, par SMS : « la place du mort est un bouquin qui donne envie de baiser et de braquer des banques. »
Y a pas à dire, avec un lectorat pareil, qu'en ai-je à foutre des libraires qui se pincent le nez quand ils lisent mes trucs ? Franchement ?
Bon, j'arrête de me goberger, voici un peu d'infos sur les événements à venir :
Le Rituel Drone se poursuivra le 24 septembre (19h30, 16 rue des Minimes, Métro Chemin Vert) à Paris, pour fêter le numéro 1 de la Revue Métèque . Voici un lien vers l'événement Facebook :
https://www.facebook.com/events/720344128039491/?fref=ts
Et voici le flyer :
(A ce propos, je cherche une bonne âme pour m'héberger pour la nuit. Si vous avez un manoir dans le troisième à disposition des invités, une chambre d'ami ou simplement un bout de canapé, contactez-moi en privé.)
Il y a quelques autres dates prévues à Marseille, Lille, Bruxelles, Toulouse et dans les Alpes, tout ça entre mi-octobre et mi-novembre, je vous en reparlerai la prochaine fois.
Pour ceux que ça intéresse : j'ai de nouveau en stock certains de mes bouquins. Ceux qui aimeraient un exemplaire dédicacé de J'Ai Peur, Poésie Portable ou La Place Du Mort, peuvent me contacter par message privé.
Mes prochaines parutions : un texte inédit dans le numéro 1 de la Revue Métèque ; un texte tiré de Porcherie (mon recueil épuisé) dans le prochain numéro Short Story, la revue électronique de La Matière Noire ; des extraits de Poésie Portable dans le prochain numéro de Ce Qui Reste, une revue également électronique.
La Revue Métèque, dont ce sera le deuxième numéro (le numéro 0 avait paru il y a un peu plus de six mois, si je ne dis pas de bétise), est, du point de vue de l'auteur que je suis et du point de vue du lecteur que vous devriez être, la plus intéressante revue disponible. On y trouve tous les écrivains que j'aime (Marlène Tissot, Nicolas Albert G., Jacques Cauda et j'en passe), elle est belle : maquette travaillée, beau papier, etc., et, ce qui ne gâte rien, Jean-François Dalle, qui est derrière tout ça, réussit à être intransigeant et exigeant sans oublier de nous chouchouter. Bref, on s'y sent aussi bien que dans des rangers fourrées au chichilla. Tout ça pour le prix du dernier Djian, franchement, y a pas de quoi se plaindre.
http://www.revuemeteque.com/
(Le site ouvrira au public dans quelques jours)
Short Stories, c'est la revue des éditions La Matière Noire. La Matière Noire est un éditeur numérique qui aime la poésie et le roman noir et, surtout, qui aime son métier. Déjà, le nom de sa maison. La Matière Noire, pour qui a travaillé (ou tenté de le faire) avec Numériklivres, Edicool ou Emoticourt, ça file moins la honte. De plus, Victorien, l'éditeur, aime ses auteurs. Aimer ses auteurs, ça veut pas dire les accabler de louanges et partir en vacances, non, non. Aimer ses auteurs, je ne le répèterai jamais assez, et sans S à répèterai, je suis pas libraire, moi, je suis écrivain, je sais faire la différence entre un futur et un putain de conditionnel, aimer ses auteurs, disais-je, ça veut dire : faire tout son possible pour vendre leur putains de bouquins.
http://www.short-stories-etc.com/
Ce Qui Reste, je connais pas encore très bien. C'est une revue en ligne, en tout cas, et j'y ai quelques camarades qui y publient. Pour le peu que j'ai vu, c'est sobre, plutôt réussi, et l'ambiance a l'air plutôt intello-minimale, bref, c'est chouette, allez-y voir.
http://www.cequireste.fr/
Un extrait (toujours pareil : non relu, non révisé, garanti 100% premier jet) d'un de mes manuscrits en cours de travail, Descente, voilà :
— Tu vois, ce que je ferais, c'est que m'occuperais en priorité des villages. Des petits magasins, des bus, des conneries comme ça. Des gares paumées, de tout ça. C'est pas compliqué. Un gros sac de sport, ça suffit, de nos jours. Pour contenir la bombe et le détonateur. Regarde comment ils font les Palestiniens. Un truc actionné à distance, avec ton téléphone portable. Sérieux, c'est facile à faire, ça coûte pas cher. Les pharmacies, aussi, tu imagines ? Et les salles d'attente des médecins. Avec tous les petits vieux. Les bureaux de postes. Les médiathèques. Tout. Tu peux tout faire péter si tu vois pas trop grand. Un bus scolaire, dans un village ou une petite ville, et boum ! Quarante merdeux qui partent en fumée. Bon bien sûr ce serait en mode attentat-suicide. Mais en étant finaud y a moyen de le faire aussi sans se faire sauter avec. Et après tu appelles Le Monde ou Libération et tu dis Al-Qaïda ceci, les Juifs cela, et le tour est joué. Tu les regardes s'agiter. Toi, t'es déjà dans un autre village, à cinq cent kilomètres de là, en train de préparer le prochain.
— Mais... Dans quel but, putain ?
— Je sais pas, moi. C'est marrant, non ? Ca fout le bordel, quoi. J'y pense souvent quand je prends le train, avec tous ces mômes, et tous ces vieux qui font chier...
— Ah ouais ?...
— Ouais. Pas toi ?
— Bin, non.
— T'as antisémite, toi ? Au fait ?
— Quoi ? Bien sûr que non, ça va pas ?
— Ah ouais ? Putain, je sais pas comment tu fais. Moi les youtres je peux pas. Enfin, c'est comme ça, hein, t'aimes les Juifs, chacun ses goûts, comme on dit. Quand même... Mais pourquoi tu les aimes ? Je veux dire, ils ont quoi qui te plaît ?
— Mais j'ai pas dit que je les aimais ! Enfin, je m'en fous, je suis pas raciste, quoi, c'est tout !
— Ah. Ouais. Pourquoi pas, remarque. T'aimes bien les youtres, les bicots et les nègres, et t'aimes bien les pédés aussi, j'imagine. T'es de gauche, quoi. De toute façon vous êtes tous de gauche, y a qu'à vous regarder cinq minutes pour le savoir.
— Tu veux pas qu'on parle d'autre chose ?
Celui qui veut faire sauter des bus et n'aime pas les Juifs, c'est Guy Georges. Depuis quelques semaines, on est en cavale. Avant ça, il s'était installé chez moi. En planque. Quelques jours.
Enfin, Guy Georges c'est pas son vrai nom. Son vrai nom c'est Yaya. Mais il se fait appeler Guy Georges parce qu'il trouve ça classe. Une fois il m'a raconté comme il a fait peur à un couple qui sortait d'une vigne et qui venait de baiser. Il m'a raconté qu'il se faisait passer pour un flic en civil et qu'il avait bien envie de casser la gueule au type et de violer la gonzesse. Fallait le voir raconter ça. Les yeux qui brillent et tout.
— Je marchais le long de la route, j'étais vers Avignon, dans les vignes, quoi. J'avais rien de mieux à foutre que marcher, la tire que j'avais fauchée avait plus d'essence, faut dire que j'étais descendu de paris, et je retournais à Avignon, quoi, en faisant du stop mais comme il faisait bon et que j'étais pas très loin, pourquoi pas marcher, hein ? Et là je les vois débarquer des vignes, directement sur la route, en se tenant par la main, le type avait un sourire jusqu'au oreilles et la fille les yeux qui brillent, enfin je te fais pas un dessin, je pouvais presque entendre le sperme lui couler sur les jambes à cette pute. Ils m'ont vu, un peu gênés et un peu rigolard, mais je me suis mis devant eux et moi je rigolais pas du tout, et vu le gabarit du type, ils avaient tous les deux vingt, vingt-deux ans, tu vois, le genre étudiant en lettres, leur sourire s'est direct effacé de leurs gueules. Vous faisiez quoi en bas ? j'ai dit. Ils se sont mis à bredouiller, hein, heu, rien, comment ça ; enfin, tu vois le genre, ils me prenaient pas au sérieux. Alors j'ai joué le grand jeu. Vous savez que c'est une propriété privée ? j'ai dit. Vous savez que vous n'avez pas le droit d'être dans cette vigne ? Alors je veux bien être sympa avec vous mais faut pas me prendre pour un con, OK ? Soit on s'arrage ici tranquillement, soit ce sera avec les collègues, au poste, et ce sera moins marrant. Tu aurais vu leurs gueules, putain ! Un régal ! Bin, euh, on... qu'ils me répondent. La fille, toute rouge, ne dit pas un mot. Vous faisiez des cochonneries ? Je dis. Le type me regarde bizarre et la fille de travers. Alors je hausse le ton. Le prenez pas comme ça ! que je dis. Le prenez pas comme ça ou ça va très mal se passer ! Attentat à la pudeur vous connaissez ? Et là je leur fais un regard vraiment méchant, et je leur fous enfin la trouille. Vous baisiez dans cette putain de vigne ? Je leur gueule ça à la face, je suis près d'eux à les toucher – et elle est putain de bandante, la salope, j'ai des tas d'idées qui me viennent en tête, tu imagines. J'ai mon couteau, aussi, et forcément, j'y pense. Mais finalement cette fois-là je fais rien, je les laisse partir. Je les suis du regard un moment et je pense à ce type, à mon pote gendarme, je t'en ai parlé de lui ? Un rabatteur. Pour des partouzes de la haute. Pour des films spéciaux. Un type marrant. On se connait, on se croise parfois. Rabatteur. C'est comme ça qu'il définit son activité. Gendarme, c'est plus ou moins une couverture, son fric il le gagne autrement – et c'est un sacré paquet de fric, hein, tu peux me croire. De l'oseille, de la vraie. J'aurais bien aimé faire ça, moi aussi, mais je suis pas assez fin, je crois, je suis trop bourrin. Et puis il faut obéir aux ordres et ça j'aime pas, j'ai jamais aimé, et il faut être discrêt, aussi, et ça me fait chier. Bref c'était pas un boulot pour moi, rabatteur, ce qui m'empêchait pas, quand j'avais besoin de fric, d'aller lui filer un coup de main. Des fois il avait besoin d'un type persuasif pour mettre les bonnes idées dans le crâne des gens, pour faire en sorte que tout le monde soit d'accord, tu piges ?
Il parlait comme ça pendant des heures et des heures, il était intarrissable, je n'écoutais que d'une oreille, ses salades ne me passionnaient pas tant que ça mais bon, quand un gros con comme lui a envie de raconter sa vie, c'est pas un mec bâti comme moi qui va lui dire de fermer sa gueule, ça, non. D'ailleurs, c'est pas moi qui l'avait invité chez moi, non, non, c'est lui qui avait décidé que ça serait mieux comme ça. Mieux pour lui, c'est à dire. Une fois il m'avait parlé de son idée de journal télévisé porno. Ca faisait presque quarante-huit heures que nous n'avions pas dormi, pas mangé, nous ne faisions rien d'autre qu'aller de temps en temps à la fenêtre surveiller que personne n'arrive, et, de temps en temps aussi, aller jeter un œil à la vieille, que nous avions ligotée et baillonnée sur son lit, dans sa chambre, histoire de voir qu'elle n'était pas morte. Nous n'avions plus rien à boire et même si le Frigo de la vieille débordait de victuailles, nous étions trop dans la merde pour nous soucier de bouffe. Il m'avait raconté sa vie dans tous les sens, en long et en large, et d'un coup il me demande : tu sais ce que je ferais, si j'avais une chaîne à moi ? Si j'avais ma propre chaîne de télé ? Moi : Non... Et lui qui enchaîne : si j'étais comme l'autre con, comme le rital de mes deux, là, Berlusconi, tu sais ce que je ferais pour que ça marche, pour que les gens soient tous scotchés devant ?
— Non...
— Un journal télévisé porno. Tu imagines le truc ?
Moi je n'avais pas compris. Je pensais qu'il voulait dire : un journal télévisé qui parlerait de l'actualité porno, ou un journal télévisé présenté par une star du porno, mais dans les deux cas ça existait déjà et je le lui ai fait remarquer – oui, des fois, tout de même, nous parlions. Il m'a regardé comme si j'étais le dernier des abrutis.
— Mais non, débile, pas ça. Un-vrai jour-nal por-no. Imagine. Tu as les deux présentateurs, un mec et une nana, ou même deux nanas, hein, peu importe. Le décor, c'est pas une salle de rédaction comme dans les autres JT, mais un salon de massage. D'accord. Et tu en as un qui masse l'autre. Les deux annoncent les titres, les reportages, font tout le truc comme il faut, sauf que voilà, ce sont deux porn-stars en train de se masser. Et au fur et à mesure du journal ça devient de plus en plus chaud, jusqu'à ce qu'ils baisent pour de bon. Ils s'interrompent juste pour annoncer le titre suivant. Tu piges ? Et pendant les reportages le son du studio est pas coupé. Tu sais, comme dans les bétisiers où on entend le mec qui présente se mettre à raler d'un coup ou réclamer un Coca alors qu'à l'image t'as un fait-divers ou l'enterrement de Machin-machine ? Sauf que là c'est pas un bétisier et qu'ils réclament rien : ils s'en foutent plein le cul et ils prennent leur pied. Et à la fin du journal, éjac. T'en penses quoi ? Ca ferait un carton, putain !
J'en pensais quoi ? Qu'est-ce que j'en pensais ?
Et pour finir, je compte sur vous pour croiser des tas de doigts le 10 septembre : en effet, c'est le jour où le jury du prix de Sade sélectionne les livres qui concourront cette année. La Place Du Mort est entre leurs mains, comme le fut Nuit Noire il y a deux ans, qui avait été sélectionné mais n'avait pas remporté le prix (c'est Angot qui l'avait eu, mais l'avait refusé, bref), et je serais bien joyeux s'il était sélectionné – et encore plus, soyons fous, s'il avait le prix.
A la prochaine,
Christophe Siébert.
Ca, c'est ce que me répondent les libraires, faute incluse, quand je prends contact avec eux. Enfin, ceux qui font l'effort de me répondre, je veux dire.
Bonjour à tous.
Deux nouvelles chroniques de La Place Du Mort, dont je suis très heureux : l'une de Mäx Lachaud, pour Obsküre Magazine ; l'autre de Artikel Unbekannt, pour le fanzine La Tête En Noir :
À tombeau ouvert : La place du mort, de Christophe Siébert.
Christophe Siébert, « prolétaire de la littérature depuis 2007 », présente La place du mort, son dernier livre, paru en mai dernier chez l’excellent éditeur Camion Noir, comme « une série Z existentielle ». Mais c’est aussi un roman noir. Et un sacré morceau de roman noir. Brutal, féroce, radical, impétueux, mais aussi rempli jusqu’à la gueule d’une infinie tendresse et d’une vraie compassion. « Compassion » signifie « souffrir avec ». Or c’est vraiment de ça qu’il s’agit ici. La place du mort, c’est l’histoire d’une fuite en avant, et dès le prologue on sait que l’issue sera fatale.
Alors on souffre avec Blandine à mesure qu’on découvre son passé fracassé. Et on souffre encore plus quand on réalise que son présent est empreint d’une beauté si fragile qu’il ne peut offrir aucune perspective d’avenir. Oui, j’ai bien écrit « beauté fragile », tandis que certains ne verront là que violence extrême, pornographie déviante et nihilisme martelé. Comme si ces trois notions devaient nécessairement exclure la beauté. Comme si un portrait de femme devait nécessairement être peint en rose pastel. Comme si le féminisme avait pu s’imposer sans jamais s’être fait… violence.
Voilà pourquoi Blandine n’hésite pas à se servir de son corps comme d’une arme. C’est elle qui mène la danse, et qui impose son « Sex, drugs and Electronic Body Music ». Car elle écoute Front 242, et les amateurs – dont je suis – apprécieront la totale cohérence de ce choix. Les mots de Christophe Siébert, coupants et précis comme des rasoirs, épousent à merveille les BPM millimétrés et les samples crypto-politiques du quatuor belge. Et si cette formule énergique et froide constitue la bande-son idéale d’une odyssée tragique aux allures de danse macabre, c’est justement parce qu’elle trouve un personnage capable de faire corps avec elle. À musique « virile », femme forte.
« Les vrais durs ne dansent pas », écrivait Norman Mailer. Et pourtant Blandine danse. Et elle joue. Avec le feu, évidemment. Elle se brûle le bout des seins avec des cigarettes pour mieux se sentir vivante. Elle aime Sammy, qui s’est fait ramasser par les flics. Sammy qui comme elle en a vu – et senti – de dures. Elle ferait n’importe quoi pour le libérer. Vraiment n’importe quoi. Alors elle recontacte son frère, aventurier, ami et… amant. Leurs retrouvailles seront pour eux l’occasion de franchir toutes les limites. Au diable codes sociaux et autres normes morales. Au diable les artifices, et vive le feu. La liberté a un prix, et Blandine est prête à le payer comptant.
La place du mort, c’est ce qui pourrait ressortir d’une collision entre La balade sauvage, de Terrence Malick, et le documentaire consacré aux Sex Pistols L’obscénité et la fureur. Comme si Christophe Siébert avait réussi à organiser une impossible rencontre entre Virginie Despentes et le regretté Jean-Patrick Manchette. Comme s’il ne s’était pas contenté de prendre une part – active, forcément – à leur conversation, mais les avait accompagnés jusqu’au bout de la nuit dans une ultime virée furieuse.
Alors, engagé ou dégagé, La place du mort ? Les deux, mon capitaine. Et enragé, surtout. Enragé sans relâche, sans pitié et sans remords. Enragé comme l’était le terrible brûlot de Pierre Pelot, Le sourire des crabes (sorti en 1977, ça ne s’invente pas), à la trame assez similaire, auquel ce roman frénétique donne un écho strident pour mieux enfoncer le clou dans les paumes du lecteur crucifié. On vous a dit que les derniers Punks étaient morts ? On vous a menti. Il reste Christophe Siébert.
Artikel Unbekannt
Mes lectrices sont formidables. Voici l'une d'elles lisant quelques extraits de Poésie Portable à Berlin.
https://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=yZ7SaOuEciA
Et voici ce que m'envoie une autre, par SMS : « la place du mort est un bouquin qui donne envie de baiser et de braquer des banques. »
Y a pas à dire, avec un lectorat pareil, qu'en ai-je à foutre des libraires qui se pincent le nez quand ils lisent mes trucs ? Franchement ?
Bon, j'arrête de me goberger, voici un peu d'infos sur les événements à venir :
Le Rituel Drone se poursuivra le 24 septembre (19h30, 16 rue des Minimes, Métro Chemin Vert) à Paris, pour fêter le numéro 1 de la Revue Métèque . Voici un lien vers l'événement Facebook :
https://www.facebook.com/events/720344128039491/?fref=ts
Et voici le flyer :
(A ce propos, je cherche une bonne âme pour m'héberger pour la nuit. Si vous avez un manoir dans le troisième à disposition des invités, une chambre d'ami ou simplement un bout de canapé, contactez-moi en privé.)
Il y a quelques autres dates prévues à Marseille, Lille, Bruxelles, Toulouse et dans les Alpes, tout ça entre mi-octobre et mi-novembre, je vous en reparlerai la prochaine fois.
Pour ceux que ça intéresse : j'ai de nouveau en stock certains de mes bouquins. Ceux qui aimeraient un exemplaire dédicacé de J'Ai Peur, Poésie Portable ou La Place Du Mort, peuvent me contacter par message privé.
Mes prochaines parutions : un texte inédit dans le numéro 1 de la Revue Métèque ; un texte tiré de Porcherie (mon recueil épuisé) dans le prochain numéro Short Story, la revue électronique de La Matière Noire ; des extraits de Poésie Portable dans le prochain numéro de Ce Qui Reste, une revue également électronique.
La Revue Métèque, dont ce sera le deuxième numéro (le numéro 0 avait paru il y a un peu plus de six mois, si je ne dis pas de bétise), est, du point de vue de l'auteur que je suis et du point de vue du lecteur que vous devriez être, la plus intéressante revue disponible. On y trouve tous les écrivains que j'aime (Marlène Tissot, Nicolas Albert G., Jacques Cauda et j'en passe), elle est belle : maquette travaillée, beau papier, etc., et, ce qui ne gâte rien, Jean-François Dalle, qui est derrière tout ça, réussit à être intransigeant et exigeant sans oublier de nous chouchouter. Bref, on s'y sent aussi bien que dans des rangers fourrées au chichilla. Tout ça pour le prix du dernier Djian, franchement, y a pas de quoi se plaindre.
http://www.revuemeteque.com/
(Le site ouvrira au public dans quelques jours)
Short Stories, c'est la revue des éditions La Matière Noire. La Matière Noire est un éditeur numérique qui aime la poésie et le roman noir et, surtout, qui aime son métier. Déjà, le nom de sa maison. La Matière Noire, pour qui a travaillé (ou tenté de le faire) avec Numériklivres, Edicool ou Emoticourt, ça file moins la honte. De plus, Victorien, l'éditeur, aime ses auteurs. Aimer ses auteurs, ça veut pas dire les accabler de louanges et partir en vacances, non, non. Aimer ses auteurs, je ne le répèterai jamais assez, et sans S à répèterai, je suis pas libraire, moi, je suis écrivain, je sais faire la différence entre un futur et un putain de conditionnel, aimer ses auteurs, disais-je, ça veut dire : faire tout son possible pour vendre leur putains de bouquins.
http://www.short-stories-etc.com/
Ce Qui Reste, je connais pas encore très bien. C'est une revue en ligne, en tout cas, et j'y ai quelques camarades qui y publient. Pour le peu que j'ai vu, c'est sobre, plutôt réussi, et l'ambiance a l'air plutôt intello-minimale, bref, c'est chouette, allez-y voir.
http://www.cequireste.fr/
Un extrait (toujours pareil : non relu, non révisé, garanti 100% premier jet) d'un de mes manuscrits en cours de travail, Descente, voilà :
— Tu vois, ce que je ferais, c'est que m'occuperais en priorité des villages. Des petits magasins, des bus, des conneries comme ça. Des gares paumées, de tout ça. C'est pas compliqué. Un gros sac de sport, ça suffit, de nos jours. Pour contenir la bombe et le détonateur. Regarde comment ils font les Palestiniens. Un truc actionné à distance, avec ton téléphone portable. Sérieux, c'est facile à faire, ça coûte pas cher. Les pharmacies, aussi, tu imagines ? Et les salles d'attente des médecins. Avec tous les petits vieux. Les bureaux de postes. Les médiathèques. Tout. Tu peux tout faire péter si tu vois pas trop grand. Un bus scolaire, dans un village ou une petite ville, et boum ! Quarante merdeux qui partent en fumée. Bon bien sûr ce serait en mode attentat-suicide. Mais en étant finaud y a moyen de le faire aussi sans se faire sauter avec. Et après tu appelles Le Monde ou Libération et tu dis Al-Qaïda ceci, les Juifs cela, et le tour est joué. Tu les regardes s'agiter. Toi, t'es déjà dans un autre village, à cinq cent kilomètres de là, en train de préparer le prochain.
— Mais... Dans quel but, putain ?
— Je sais pas, moi. C'est marrant, non ? Ca fout le bordel, quoi. J'y pense souvent quand je prends le train, avec tous ces mômes, et tous ces vieux qui font chier...
— Ah ouais ?...
— Ouais. Pas toi ?
— Bin, non.
— T'as antisémite, toi ? Au fait ?
— Quoi ? Bien sûr que non, ça va pas ?
— Ah ouais ? Putain, je sais pas comment tu fais. Moi les youtres je peux pas. Enfin, c'est comme ça, hein, t'aimes les Juifs, chacun ses goûts, comme on dit. Quand même... Mais pourquoi tu les aimes ? Je veux dire, ils ont quoi qui te plaît ?
— Mais j'ai pas dit que je les aimais ! Enfin, je m'en fous, je suis pas raciste, quoi, c'est tout !
— Ah. Ouais. Pourquoi pas, remarque. T'aimes bien les youtres, les bicots et les nègres, et t'aimes bien les pédés aussi, j'imagine. T'es de gauche, quoi. De toute façon vous êtes tous de gauche, y a qu'à vous regarder cinq minutes pour le savoir.
— Tu veux pas qu'on parle d'autre chose ?
Celui qui veut faire sauter des bus et n'aime pas les Juifs, c'est Guy Georges. Depuis quelques semaines, on est en cavale. Avant ça, il s'était installé chez moi. En planque. Quelques jours.
Enfin, Guy Georges c'est pas son vrai nom. Son vrai nom c'est Yaya. Mais il se fait appeler Guy Georges parce qu'il trouve ça classe. Une fois il m'a raconté comme il a fait peur à un couple qui sortait d'une vigne et qui venait de baiser. Il m'a raconté qu'il se faisait passer pour un flic en civil et qu'il avait bien envie de casser la gueule au type et de violer la gonzesse. Fallait le voir raconter ça. Les yeux qui brillent et tout.
— Je marchais le long de la route, j'étais vers Avignon, dans les vignes, quoi. J'avais rien de mieux à foutre que marcher, la tire que j'avais fauchée avait plus d'essence, faut dire que j'étais descendu de paris, et je retournais à Avignon, quoi, en faisant du stop mais comme il faisait bon et que j'étais pas très loin, pourquoi pas marcher, hein ? Et là je les vois débarquer des vignes, directement sur la route, en se tenant par la main, le type avait un sourire jusqu'au oreilles et la fille les yeux qui brillent, enfin je te fais pas un dessin, je pouvais presque entendre le sperme lui couler sur les jambes à cette pute. Ils m'ont vu, un peu gênés et un peu rigolard, mais je me suis mis devant eux et moi je rigolais pas du tout, et vu le gabarit du type, ils avaient tous les deux vingt, vingt-deux ans, tu vois, le genre étudiant en lettres, leur sourire s'est direct effacé de leurs gueules. Vous faisiez quoi en bas ? j'ai dit. Ils se sont mis à bredouiller, hein, heu, rien, comment ça ; enfin, tu vois le genre, ils me prenaient pas au sérieux. Alors j'ai joué le grand jeu. Vous savez que c'est une propriété privée ? j'ai dit. Vous savez que vous n'avez pas le droit d'être dans cette vigne ? Alors je veux bien être sympa avec vous mais faut pas me prendre pour un con, OK ? Soit on s'arrage ici tranquillement, soit ce sera avec les collègues, au poste, et ce sera moins marrant. Tu aurais vu leurs gueules, putain ! Un régal ! Bin, euh, on... qu'ils me répondent. La fille, toute rouge, ne dit pas un mot. Vous faisiez des cochonneries ? Je dis. Le type me regarde bizarre et la fille de travers. Alors je hausse le ton. Le prenez pas comme ça ! que je dis. Le prenez pas comme ça ou ça va très mal se passer ! Attentat à la pudeur vous connaissez ? Et là je leur fais un regard vraiment méchant, et je leur fous enfin la trouille. Vous baisiez dans cette putain de vigne ? Je leur gueule ça à la face, je suis près d'eux à les toucher – et elle est putain de bandante, la salope, j'ai des tas d'idées qui me viennent en tête, tu imagines. J'ai mon couteau, aussi, et forcément, j'y pense. Mais finalement cette fois-là je fais rien, je les laisse partir. Je les suis du regard un moment et je pense à ce type, à mon pote gendarme, je t'en ai parlé de lui ? Un rabatteur. Pour des partouzes de la haute. Pour des films spéciaux. Un type marrant. On se connait, on se croise parfois. Rabatteur. C'est comme ça qu'il définit son activité. Gendarme, c'est plus ou moins une couverture, son fric il le gagne autrement – et c'est un sacré paquet de fric, hein, tu peux me croire. De l'oseille, de la vraie. J'aurais bien aimé faire ça, moi aussi, mais je suis pas assez fin, je crois, je suis trop bourrin. Et puis il faut obéir aux ordres et ça j'aime pas, j'ai jamais aimé, et il faut être discrêt, aussi, et ça me fait chier. Bref c'était pas un boulot pour moi, rabatteur, ce qui m'empêchait pas, quand j'avais besoin de fric, d'aller lui filer un coup de main. Des fois il avait besoin d'un type persuasif pour mettre les bonnes idées dans le crâne des gens, pour faire en sorte que tout le monde soit d'accord, tu piges ?
Il parlait comme ça pendant des heures et des heures, il était intarrissable, je n'écoutais que d'une oreille, ses salades ne me passionnaient pas tant que ça mais bon, quand un gros con comme lui a envie de raconter sa vie, c'est pas un mec bâti comme moi qui va lui dire de fermer sa gueule, ça, non. D'ailleurs, c'est pas moi qui l'avait invité chez moi, non, non, c'est lui qui avait décidé que ça serait mieux comme ça. Mieux pour lui, c'est à dire. Une fois il m'avait parlé de son idée de journal télévisé porno. Ca faisait presque quarante-huit heures que nous n'avions pas dormi, pas mangé, nous ne faisions rien d'autre qu'aller de temps en temps à la fenêtre surveiller que personne n'arrive, et, de temps en temps aussi, aller jeter un œil à la vieille, que nous avions ligotée et baillonnée sur son lit, dans sa chambre, histoire de voir qu'elle n'était pas morte. Nous n'avions plus rien à boire et même si le Frigo de la vieille débordait de victuailles, nous étions trop dans la merde pour nous soucier de bouffe. Il m'avait raconté sa vie dans tous les sens, en long et en large, et d'un coup il me demande : tu sais ce que je ferais, si j'avais une chaîne à moi ? Si j'avais ma propre chaîne de télé ? Moi : Non... Et lui qui enchaîne : si j'étais comme l'autre con, comme le rital de mes deux, là, Berlusconi, tu sais ce que je ferais pour que ça marche, pour que les gens soient tous scotchés devant ?
— Non...
— Un journal télévisé porno. Tu imagines le truc ?
Moi je n'avais pas compris. Je pensais qu'il voulait dire : un journal télévisé qui parlerait de l'actualité porno, ou un journal télévisé présenté par une star du porno, mais dans les deux cas ça existait déjà et je le lui ai fait remarquer – oui, des fois, tout de même, nous parlions. Il m'a regardé comme si j'étais le dernier des abrutis.
— Mais non, débile, pas ça. Un-vrai jour-nal por-no. Imagine. Tu as les deux présentateurs, un mec et une nana, ou même deux nanas, hein, peu importe. Le décor, c'est pas une salle de rédaction comme dans les autres JT, mais un salon de massage. D'accord. Et tu en as un qui masse l'autre. Les deux annoncent les titres, les reportages, font tout le truc comme il faut, sauf que voilà, ce sont deux porn-stars en train de se masser. Et au fur et à mesure du journal ça devient de plus en plus chaud, jusqu'à ce qu'ils baisent pour de bon. Ils s'interrompent juste pour annoncer le titre suivant. Tu piges ? Et pendant les reportages le son du studio est pas coupé. Tu sais, comme dans les bétisiers où on entend le mec qui présente se mettre à raler d'un coup ou réclamer un Coca alors qu'à l'image t'as un fait-divers ou l'enterrement de Machin-machine ? Sauf que là c'est pas un bétisier et qu'ils réclament rien : ils s'en foutent plein le cul et ils prennent leur pied. Et à la fin du journal, éjac. T'en penses quoi ? Ca ferait un carton, putain !
J'en pensais quoi ? Qu'est-ce que j'en pensais ?
Et pour finir, je compte sur vous pour croiser des tas de doigts le 10 septembre : en effet, c'est le jour où le jury du prix de Sade sélectionne les livres qui concourront cette année. La Place Du Mort est entre leurs mains, comme le fut Nuit Noire il y a deux ans, qui avait été sélectionné mais n'avait pas remporté le prix (c'est Angot qui l'avait eu, mais l'avait refusé, bref), et je serais bien joyeux s'il était sélectionné – et encore plus, soyons fous, s'il avait le prix.
A la prochaine,
Christophe Siébert.
konsstrukt- Écritoirien émérite stagiaire
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Date d'inscription : 02/11/2011
Age : 50
Re: actualités août-septembre 2014
Tout cela est bien sympa et l'extrait j'ai aimé. C'est direct et très moderne.
Quand tu connaîtras tes dates pour Bruxelles, ça peut m'intéresser. Qui sait, si c'est pas un week-end, j'arriverai peut-être à me bouger jusque là.
Quand tu connaîtras tes dates pour Bruxelles, ça peut m'intéresser. Qui sait, si c'est pas un week-end, j'arriverai peut-être à me bouger jusque là.
Re: actualités août-septembre 2014
salut, et merci !
bruxelles, c'est le 29 octobre, à la galerie E-carré.
bruxelles, c'est le 29 octobre, à la galerie E-carré.
konsstrukt- Écritoirien émérite stagiaire
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Date d'inscription : 02/11/2011
Age : 50
Re: actualités août-septembre 2014
Un mercredi, pas mal. Ça reste à voir suivant mon emploi du temps toujours mouvant, mais c'est dans l'ordre du possible.
Re: actualités août-septembre 2014
cool ! peut-être à bientôt, alors !
konsstrukt- Écritoirien émérite stagiaire
- Messages : 514
Date d'inscription : 02/11/2011
Age : 50
Re: actualités août-septembre 2014
Catherine, si tu y vas, pense à faire des photos.
Content que ma chronique te plaise, Christophe.
Pour augmenter la visibilité, elle sera aussi placée sur le blog de Zaroff ce week-end. Puis je collerai le lien menant vers La Tête En Noir sur le topic du roman dès que le zine sera en ligne, ce qui ne devrait plus trop traîner. Et, bien sûr, je te ferai parvenir un exemplaire papier.
Berlin + Konsstrukt + Ulysse, ou trois minutes de plaisir en un clic.
https://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=yZ7SaOuEciA
Content que ma chronique te plaise, Christophe.
Pour augmenter la visibilité, elle sera aussi placée sur le blog de Zaroff ce week-end. Puis je collerai le lien menant vers La Tête En Noir sur le topic du roman dès que le zine sera en ligne, ce qui ne devrait plus trop traîner. Et, bien sûr, je te ferai parvenir un exemplaire papier.
Tous les doigts que j'avais à portée de main sont déjà croisés. Et comme je suis pas sûr que ça suffise, je vais sortir dans la rue pour croiser ceux des passants. Si je me fais ramasser par les flics, tu m'enverras des oranges. Ou un bouquin de toi que j'ai pas encore lu, tiens.konsstrukt a écrit:Et pour finir, je compte sur vous pour croiser des tas de doigts le 10 septembre : en effet, c'est le jour où le jury du prix de Sade sélectionne les livres qui concourront cette année. La Place Du Mort est entre leurs mains, comme le fut Nuit Noire il y a deux ans, qui avait été sélectionné mais n'avait pas remporté le prix (c'est Angot qui l'avait eu, mais l'avait refusé, bref), et je serais bien joyeux s'il était sélectionné – et encore plus, soyons fous, s'il avait le prix.
Mais grave. Allez voir - et écouter -, les amis.konsstrukt a écrit:Mes lectrices sont formidables.
Berlin + Konsstrukt + Ulysse, ou trois minutes de plaisir en un clic.
https://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=yZ7SaOuEciA
Re: actualités août-septembre 2014
Ouais des photos, c'est ça ! Ou alors, juste de Christophe ! Moi pas question !
Re: actualités août-septembre 2014
ho, et un addendum ! j'ai aussi des textes dans le dernier squeeze, formidable revue électronique, à lire ici : http://revuesqueeze.com/actualites/revue-squeeze-n9/
konsstrukt- Écritoirien émérite stagiaire
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Age : 50
Re: actualités août-septembre 2014
Tu penses qu'on va croiser les doigts !
Si cela peut aider, je veux bien aussi allumer un cierge ou sacrifier deux, trois poulets.
Si cela peut aider, je veux bien aussi allumer un cierge ou sacrifier deux, trois poulets.
Ulysse- Écritoirien émérite
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Date d'inscription : 18/05/2013
Age : 48
Localisation : Berlin
Re: actualités août-septembre 2014
d'accord pour les poulets sacrifiés avec un cierge, même si c'est dégueulasse.
konsstrukt- Écritoirien émérite stagiaire
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Date d'inscription : 02/11/2011
Age : 50
Re: actualités août-septembre 2014
Et le cierge, il est allumé au moment de l'utiliser sur les poulets ?
Re: actualités août-septembre 2014
ça sentira meilleur !
konsstrukt- Écritoirien émérite stagiaire
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Date d'inscription : 02/11/2011
Age : 50
Re: actualités août-septembre 2014
Léonox a écrit:
Pour augmenter la visibilité, elle sera aussi placée sur le blog de Zaroff ce week-end.
Celle-ci- peut-être ?
http://gorezaroff.over-blog.com/2014/09/la-place-du-mort-christophe-siebert.html
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