Ressorts dramatiques

Salut Jack,
J'ai découvert ton message hier alors que j'étais dans le train, désolé donc de répondre avec retard. Et en plus comme je suis malade, et donc vaguement crevé, je ne suis pas certain d'avoir compris le sens de ton propos. Sur le fond, oui, ce texte est bizarre et plus que perfectible (doux euphémisme). D'un autre côté, il s'agissait d'une sorte défi que je me suis lancé après une discussion avec Lester après que je me sois acheté une (nouvelle) machine à écrire dans un vide-grenier. L'idée pour moi était d'écrire une histoire très rapidement dans la mesure où à l'époque où j'ai écrit ce texte j'étais en pleine période de correction des copies à la fac. Bref...
Ce texte a donc des faiblesses évidentes, notamment dans sa cohérence. Pour autant, je ne suis pas certain que les éléments que tu avances soient forcément plus logiques. Tu dis par exemple que sans le deuil de sa femme, Théo ne se serait pas laissé aussi facilement berner par cette machine sortie de nulle part. Ah ? Pourquoi ? Rien ne permet de le penser. Je m'explique : je reçois chez moi une machine à écrire assortie d'une lettre farfelue. Serais-je le seul à me dire que ce n'est qu'une machine à écrire ? Et pourquoi pas, à un moment ou à un autre, essayer d'inscrire le code inscrit sur la lettre ? Pas parce que j'y crois, mais parce qu'il faudrait être sacrément cinglé pour prendre la chose au pied de la lettre, pas vrai ? Du coup, puisqu'a priori je n'ai rien à craindre, eh bien quoi ?, Allons-y franchement ! On pourrait peut-être tabler sur le fait que seuls les farfelus se seraient tenus à l'écart de la machine, précisément parce qu'ils auraient accordé crédit à ce qui est dit dans la lettre... Le fait que la femme de Théo soit morte n'est finalement qu'un point parmi d'autres. Une explication certes facile de l'attitude de Théo, mais une explication qui en vaut bien une autre, me semble-t-il.
Par ailleurs, n'étant pas un habitué de la SF, j'ai du mal à comprendre les observations qui consistent à dire que, dans un multivers, il aurait été logique que les choses se passent de cette façon plutôt que de telle autre. Je suis parti d'une idée type Sliders. Dans cette série, les mondes parallèles étaient très différents les uns des autres et les personnages que l'on retrouvait dans ces mondes plus ou moins avancés technologiquement et donc pas forcément au courant de l'existence du multivers. Du coup, ne pouvons-nous pas avancer l'existence d'un multivers au sein duquel seule une version de Singh et de Pernel serait au courant de l'existence de ce multivers ? Pourquoi faudrait-il absolument qu'il y en ait plusieurs ? Je veux dire par là que c'est un peu comme le chat de Schrödinger : tant que l'on n'ouvre pas la boîte, le chat n'est ni vivant ni mort, non ? Je ne sais pas si je suis clair (ou peut-être la maladie me fait-elle divaguer ?). Par ailleurs j'aime bien mon idée de virus susceptible de passer d'un univers à l'autre.
Ceci étant dit, je suis bien d'accord avec toi. Ce texte est vraiment à reprendre et à retravailler du point de vue de la cohérence. Et je suis d'accord également avec l'idée selon laquelle avoir une vision d'ensemble d'un texte avant de l'écrire est sans doute la meilleure des solutions afin d'éviter les incohérences. En ce sens, cher Jack, tu prêches un converti. Mais, mon problème est le suivant : j'écris assez peu et si je veux, dans de brefs délais, réussir à écrire une histoire, je suis bien souvent obligé de me lancer sans avoir aucune idée de ce que je vais écrire, ni de l'endroit où cela va me mener... Je n'ai jamais dit que le résultat était toujours concluant !
Merci à toi Jack d'avoir pris le temps de lire ce texte ! Et comme d'hab, merci pour tes observations.
Bien à toi,
S.

Désolé de n'avoir pu te répondre plus tôt. Je suis resté 4 jours sans internet, ni téléphone (même la fibre peut avoir des vapeurs, hé si !)
Du coup, j'espère que tu es requinqué aussi.
Bref, ta Machine... Bon, je sais bien qu'il y a des accros au jeu prêts aux défis les plus dingues mais si on m'annonce comme ça, à l'improviste, que je viens de gagner un appart à Courchevel ou un séjour en orbite, je sais aussi que mon premier réflexe sera de me dire : "Où est le piège ?". Et je ne crois pas être plus méfiant que la moyenne mais il y a tant de malfaisants ici bas ! En outre, dans ton histoire, on ne te promet pas seulement de réaliser ton voeu le plus cher mais on ne te cache pas que ça n'ira pas sans souffrance. Donc, déjà, il faut un peu plus que de la simple curiosité pour se laisser tenter mais, après un premier essai passablement douloureux, je pense qu'il faut être sacrément motivé pour y revenir. Motivé ou désespéré... Enfin, c'est ainsi que je le perçois.
Mais pas sûr que ça mérite un débat...
Au sujet des univers parallèles, je te concède une liberté totale en tant qu'auteur, de te fixer ou pas les limites ou les postulats qui te chantent. Je me disais simplement que s'il y avait 474 versions d'Adler qui avaient poursuivi des recherches similaires en biogénétique, cela pouvait laisser supposer autant de variantes "Terre" assez proches de la nôtre. Qu'il n'y ait pas une bonne douzaine de Singh et de Pernel embrigadables dans le tas, avoue que ce n'est vraiment pas de bol. D'autant que prévenir les contacts accidentels entre une infinitude de mondes me paraît une tâche titanesque, sinon insurmontable, pour un organisme unique et et centralisé comme celui du Directeur Knapp. Je verrais plutôt un réseau tentaculaire d'observateurs occultes, une ruche de patrouilleurs avec des ramifications à tous les niveaux... Je me demande ce qu'un Dan Simmons tirerait d'un tel concept...
En tout cas, merci pour ta patience avec un vieux bonhomme qui aime sans doute un peu trop s'amuser à réfléchir autour des idées des autres.

J'avais imprimé ce texte en même temps que d'autres, ce qui fait qu'en le lisant j'en ignorait l'auteur. Il a fallu que je retourne sur l'Ecritoire pour le découvrir. Et pourtant,  j'avais des indices : une écriture au top, une influence certaine de Stephen King (qui, comme le dit Catherine, a écrit une histoire de machine à traitement de texte plus optimiste ) une thématique familiale : bien sûr, c'était Silence ! J'ai eu peur moi aussi un instant que ce soit une variante de la nouvelle de King, mais c'est tout autre chose !
Moi je dois dire que j'ai aimé. Je ne dirais pas qu'elle est en dessous de ce que tu écrit d'habitude. Au maximum on dira qu'elle est un peu plus simple, moins ambitieuse, mais efficace !
J'ai beaucoup aimé les révélations finales, et moi ca ne me gêne pas qu'on en sache pas plus sur le virus K  (tiens, K, ca me dit quelque chose    ) c'est une nouvelle, pas un roman, et j'aime bien les nouvelles avec des éléments ouverts, mystérieux, comme ces employés du multivers. Ensuite le lecteur peut en tirer ses propres interprétations ! Je serais juste d'accord avec Raven sur le fait que donner un nombre fini de Théodore Adler rend mal le côté infini du multivers. Sinon pour moi c'est une réussite !

Merci Paladin ! Pour tout te dire, je ne m'attendais pas à recevoir un commentaire sur l'un de mes textes (je croyais les avoir tous plus ou moins retirés du forum), encore moins sur celui-ci ! Dire que cela me fait plaisir serait en dessous de la vérité, d'autant que tu dis l'avoir aimé. Bref, cela fait ma journée ! Encore merci d'avoir pris le temps de me lire, et merci pour ton avis. Je lirai quelques textes pendant le week-end, histoire de ne pas être en reste !

Je suis un peu plus mitigé que les commentaires précédents, j'en suis vraiment désolé.

Ce qui m'a bloqué, c'est la finalité de l'histoire en fait. C'est "seulement" ça et, en même temps, il suffit de ce seul point pour me laisser hors d'un texte, si bon soit-il aux autres niveaux. Peut-être aussi que mes attentes ont joué : je l'ai déjà dit je pense mais tu es à mes yeux un des meilleurs écrivains qui soient, avec un style imbattable et une maîtrise totale du scénario. D'où peut-être des exigences bien plus hautes que la moyenne quand j'ai ouvert le fichier.
Bref. Pour y revenir, l'histoire est très intéressante mais repose sur un postulat qui ne m'a pas convaincu : à savoir des "agents" du multivers qui se cassent la tête pour éliminer une menace de cette manière, avec mise en scène et vœu exaucé à la clé. Même en leur prêtant toutes les meilleures intentions du monde, je n'arrive pas à trouver crédible qu'ils perdent du temps avec cette méthode, sachant qu'ils doivent répliquer leur meurtre x fois (plus de 400 fois encore à la fin du texte, on ne sait pas combien de centaines il y a eu avant). Un banal poison dans un verre m'aurait semblé bien plus logique et crédible - mais ç'aurait été au détriment de l'histoire telle qu'elle existe actuellement.
Du coup, autant j'adore les histoires de multivers et de vœux exaucés (à ce titre, ton texte m'a rappelé celui que j'ai pondu pour le concours "Dans le coffre" ; mais le tien est bien plus clair et mieux maîtrisé dans son concept !), autant j'ai eu du mal à être convaincu ici, à cause de cet écart trop grand à mon goût entre mobile et moyens mis en œuvre.

A un moindre niveau, le vœu de revivre un seul souvenir (si j'ai bien compris car je ne crois pas qu'on nous révèle le vœu mot pour mot dans le texte ?) m'a paru peu crédible. Très poétique, c'est sûr, mais n'aurait-il pas été plus logique de demander à ce que sa femme revienne, tout simplement ? Ou alors, elle ne revient au format "souvenir incarné" que parce que c'est ainsi que la machine pervertit le vœu? Ca pourrait me convaincre mais, comme dit, on ne nous indique pas clairement le vœu en question donc c'est un point à l'appréciation du lecteur malheureusement. Ou alors j'ai loupé l'info au détour d'une phrase sautée par erreur.

Reste un style toujours au top et des personnages très bien dépeints, 2 de tes marques de fabrique.

2 bémols moins gênants, au niveau purement formel cette fois :
- La police d'écriture difficile à lire, je ne sais pas si c'est un bug de mon côté, mais elle apparaît comme "effacée" en partie ou "tremblotante", je ne saurais comment l'expliquer :

Ca a été une vraie galère de passer outre, et c'est peut-être pour ça que j'ai loupé la révélation du vœu, si elle y est effectivement dans le texte.

- Pas mal de coquilles, je crois d'ailleurs que c'est la 1ere fois que j'en vois dans un de tes textes. Soucis de conjugaison entre autres, et même des phrases au présent sur la fin, alors que le texte était au passé jusque-là. Un temps, j'ai pensé à une évolution volontaire de la narration, en mode "on change de point de vue et donc de temps avec", mais non, puisqu'on retrouve quelques phrases au passé çà et là, sans que j'aie pu trouver de logique particulière à cette alternance.
Je n'ai pas relevé tous ces soucis à mesure que je lisais comme je fais d'habitude, j'en suis vraiment désolé. A vrai dire, je galérais tellement à me concentrer pour passer outre la police effacée que je n'ai pas trouvé la motivation de me sortir du texte pour traiter les coquilles.
En survolant le texte après lecture, je retrouve ces 2-là :
P3 : qu’il bu d’une traite) => buT
P4 : Il se redressa vivement ; parcouru du regard la pièce => parcouruT

Reste que je trouve que ce texte à un potentiel monstrueux. Je ne sais pas si tu penses le remanier un jour, ni dans quel sens. Pour ma part, j'adhèrerais totalement si
1. l'aspect "vœu piégeur" était plus clair pour le lecteur et plus réfléchi par le personnage et surtout
2. l'émergence de cette machine avait un autre mobile. Par exemple, elle pourrait avoir été créé non seulement pour tuer sa proie mais surtout pour absorber son "essence" et empêcher des versions alternatives de se créer à partir du moment du meurtre (ainsi, il n'y aurait aucune version alternée où la cible échapperait à la mort pour x raisons). Voire, elle provoquerait une crise cardiaque chez l'ensemble des Adler du moment qu'elle en aspire un seul. Problème réglé : le piège devient logique puisqu'il faut appâter la proie (donc pourquoi pas avec un vœu à réaliser) et la méthode cohérente vu la mission des agents : au lieu de se décarcasser sans raisons valables (à mon sens, toujours, évidemment), ils utiliseraient au contraire une méthode qui les accommodent. Et à la fin, y a plus qu'à remballer et amener la machine à une nouvelle cible, pour une nouvelle mission. Bon là j'improvise, il y a sûrement plein de failles dans ma suggestion. Mais il suffirait d'un changement de ce goût-là pour faire de cette nouvelle une pépite comme tu sais si bien en faire.

J'espère que tu ne m'en voudras pas pour ce pavé plutôt négatif. Comme je disais au début, il faut dire aussi que mes attentes sont toujours immenses quand j'ouvre un de tes textes, ce qui a dû aussi jouer dans mon ressenti.

Ne sois pas désolé Murphy, je comprends parfaitement tes observations et préventions vis-à-vis de ce texte. Je suis clairement sorti de ma zone de confort avec cette histoire de multivers sortie de nulle part ! J'ai plus ou moins écrit cette histoire à la suite d'une idée lancée par Lester après que je me sois acheté une énième machine à écrire. Je me suis lancé sans avoir quoi écrire, sans savoir où j'allais ni qui étaient mes personnages... Alors de là à essayer de trouver une fin crédible, je ne suis pas certain. Pas sûr d'ailleurs qu'elle ait autant de potentiel que cela cette histoire. En tout cas, je ne compte pas m'atteler à la réécriture dans les prochaines semaines ou dans les prochains mois. Je note toutefois tes idées au passage, sait-on jamais !