La chambre noire

Dix jours que je n'ai pas quitté mon lit. Dix jours que je ne dors plus. Dix jours plongés dans le noir de mes nuits blanches. Porte close-combat, fenêtres condamnées à mort, rideaux tirés à vue. Plus rien à manger, plus rien à boire, plus rien à espérer. Sonnette, téléphone, ordinateur, j'ai coupé toutes les veines de la sitcommunication, avant de me retrancher dans le camp des invalides. Figé dans la gangue protectrice de mes déjections, j'attends la délivrance. L'odeur méphitique de mes escarres infectées me donne une nausée permanente, mais je n'ai plus rien à vomir. Tous les sens en éveil, je la devine. Elle est là tout près, tapie sous mon lit, n'attendant qu'un geste de ma part pour m'engloutir. Je devine sa forme hideuse, pestant sans bruit contre cette noirceur qui la paralyse. Je ne bougerai pas. Elle s'éteindra avec moi, mais elle ne m'étreindra pas. J'écrirai mon épitaphe en lettres de sang, et non avec l'encre distillée par ma goule ombreuse.

992 signes

Ah ouais... très bon. "Je devine sa forme hideuse, pestant sans bruit contre cette noirceur qui la paralyse. Je ne bougerai pas", ça, c'est du grand art !

Whoo ! Ça va être dur de faire mieux.

Le concours démarre sur des chapeaux de roue !

Très bon exercice.

Merci beaucoup à vous trois.
Je me rends compte à présent que ce texte, bien qu'inédit, pourrait être un fragment de mon roman Bloodfist.
Comme quoi il est difficile de se débarrasser d'un travail qu'on a longtemps porté.
Ravi en tout cas de constater que cette forme d'expression n'est pas limitée au strict créneau Trash.

ouhaou ! Quelle atmosphère ! Ca ne donne pas trop envie d'y être certes, mais qu'il est bien décrit.
Tu as l'adresse pour les portes "close-combat" ? J'en mettrai bien une chez moi !

L'Ombre qui est la Mort ... très bonne idée. Tu manies les mots à la truelle et ça passe.

Ambiance angoissante très bien maniée

Merci beaucoup à tous les trois: vos commentaires me font très plaisir.
Et un petit spoiler pour Françoise, parce qu'elle le vaut bien

Spoiler:

Merci pour ces explications : j'étais en effet passé à côté ! Je me disais bien que le mot goule était incongru à cette première lecture ! Maintenant, il se justifie...

Porte close-combat, fenêtres condamnées à mort, rideaux tirés à vue.

J'adore!

Mais, comme Françoise, je suis passée à côté de la signification. Mais c'est bien quand même, hein.


(C'était le commentaire vachement détaillé et utile de Naëlle.)

Un commentaire qui commence par "J'adore !" n'est jamais inutile, Naëlle.
Et je prends note de vos remarques concernant le sens du texte.
Il est vrai que je ne tenais pas à me montrer explicite, mais peut-être que l'ombre m'a absorbé, moi aussi...
En tout cas, ce petit problème d'opacité n'a pas l'air de trop nuire à l'impression d'ensemble, c'est l'essentiel.

Séduite par le texte, les mots, le suspense, la mort attend son heure mais un combat singulier a lieu. Elle n'aura sans doute pas le dernier mot ! Bravo !

Merci Anouk et Catherine.
Il semble que j'aie décidément bien fait de me purger de cet instantané malade et macabre.
Continuez comme ça, et peut-être même que vos commentaires positifs m'aideront à guérir.
On ne sait jamais...